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    1. UNITE DE L’ÉGLISE##


UNITE DE L’ÉGLISE. CONCLUSIONS

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L’auteur divin de l’Église, ayant décrété de lui donner l’unité de foi, de gouvernement, de communion, a choisi Pierre et ses successeurs pour établir en eux le principe et comme le centre de l’unité… Mais l’ordre des évêques ne peut être regardé comme vraiment uni a Pierre, de la façon que le Christ l’a voulu, que s’il est soumis et s’il obéit à Pierre ; sans quoi il se disperse nécessairement en une multitude oii régnent la confusion et le désordre. Pour conserver l’unité de foi et de communion telle qu’il la faut, ni une primauté d’honneur, ni un pouvoir de direction ne suffisent ; il faut absolument une autorité véritable et en même temps souveraine, à laquelle obéisse toute la communauté. ..

C’est pourquoi le concile du Vatican, qui a défini la nature et la portée de la primauté du pontife romain (cf. ici, t. xiii, col. 335 sq.) n’a point introduit une opinion nouvelle, mais a affirmé l’antique et constante foi de tous les siècles. Léon XIII, op. cit., Denz.-Bannw., n. t’JCO-1961.

3. La variété dans l’unité.

Est-il besoin, en terminant, de faire remarquer que l’unité de l’Église n’implique pas nécessairement en tous points l’uniformité. Même dans le dogme, l’unité n’interdit ni le progrès dans l’exposé du dogme, voir Tradition, t. xv, col. 1341, ni la variété des systèmes théologiques, ni la liberté des opinions théologiques : « Dans les questions couramment controversées dans les écoles catholiques entre auteurs de bonne marque, chacun reste libre de suivre l’opinion qu’il estime plus vraisemblable ». Pie XI, encycl. Studiorum ducem, dans Acta aposlolicæ Sedis, t. xv, p. 224.

L’unité de gouvernement n’a pas empêché non plus une certaine évolution dans l’exercice du pouvoir épiscopal et surtout du pouvoir central. Voir ici Pape, t. xi, col. 1878 sq. L’institution des patriarcats, la tenue des conciles, l’organisation des missions, tout cela montre que le gouvernement s’.exerce dans l’Église d’une manière assez souple pour s’adapter aux circonstances et aux nécessités.

C’est surtout dans l’unité de culte que la variété a pu s’affirmer légitimement d’une façon plus accentuée. Sans doute, l’unité du culte est le signe de l’unité de la foi. Sans doute, une certaine unité de culte est essentielle : l’initiation baptismale, les sacrements, la prière, le sacrifice. Mais, sur ce fond commun, que de variété dans l’expression ! Saint Augustin le notait déjà et déclarait que « tout ce qui n’est pas contre la foi et les bonnes mœurs doit être regardé comme indifférent. On se conformera sur ce point à la coutume de ceux avec qui on vit ». Epist., liv, n. 2, cf. lv, n. 34-35, P. L., t. xxxiii, col. 200, 220-221. C’est ainsi que Léon XIII reconnaît la légitimité des divers rites orientaux dans l’unité catholique. Encycl. Orientalium dignitas ou encore Prseclara gratulationis ; Pie XII, Encycl. Orientales omnes ; cf. J. Leclercq, La vie du Christ dans son Église, p. 60-75.

L’argument apologétique tiré de l’unité.

L’anathématisme

préparé dans le schéma sur l’unité de l’Église visait les protestants « latitudinaires » se contentant d’une unité de foi quant à quelques articles fondamentaux et les anglicans partisans de la Branch theory (cf. Adnolalio 53 in primum schéma constil. de Ecclesia, coll. Lac, t. vii, col. 631) ; mais il n’impose aucune forme d’argumentation pour faire valoir l’unité, marque de la véritable Église, contre les confessions chrétiennes non-catholiques. Dans sa thèse sur Les notes de l’Église, M. Thils rappelle qu’on a le plus fréquemment donné à l’argument une forme absolue, soit négative, en déclarant qu’aucune communauté chrétienne, hormis l’Église catholique, ne possède l’unité, soit affirmative, en déclarant — ce qui revient au même — que l’Église catholique seule possède la note de l’unité. Ce procédé risque de conduire à bien des déboires en ne rendant pas suffisamment justice aux faits et aux intentions. La forme comparative serait peut-être plus apte à convaincre

des esprits de bonne foi : montrer que l’Église catholique romaine possède l’unité à un degré notoirement supérieur à celui qui se trouve dans les autres chrétientés, et que cette unité catholique se rapproche, plus que les autres unités chrétiennes, de l’idéal voulu par Jésus-Christ.

Il ne s’agit pas d’établir que les autres Églises n’ont rien de bon, qu’elles ne possèdent à aucun degré chacune des perfections indiquées dans le symbole. Mais il faut montrer que, si l’on trouve trace, chez elles, de chacune ou de quelqu’une de ces perfections, elles y existent à un degré notoirement inférieur à celui qu’on constate dans l’Église catholique : degré notoirement inférieur et, par conséquent, insuffisant, puisqu’il ne peut exister qu’une seule véritable Église. M..Jugie, La démonstration catholique, dans L’Année théologique, 1940, p. 87.

La présentation de l’argument sous la forme comparative a été esquissée avec bonheur par le P. S. Heurtevent, dans L’unité de V Église du Christ, Paris, 1930, p. 109-140. Il parle des « théories insutlisantes » sur l’unité de l’Église, pour aboutir à la doctrine catholique. Avec plus de psychologie peut-être et une réminiscence opportune du point de départ accepté jadis par Mœhler, le P. Congar, dans Chrétiens désunis, Paris, 1937, montre aux dissidents le chemin à parcourir pour « refaire l’unité perdue ».

C’est par l’intérieur qu’il faut d’abord comprendre l’unité de l’Église, car cette unité est celle d’une réalité très spéciale faite d’hommes unis par une vie surnaturelle procédant de Dieu et du Christ, en une forme de vie sociétaire par laquelle est procurée et promue cette vie surnaturelle elle-même. En son être terrestre, l’Église est comme un grand sacrement où tout signifie sensiblement et procure une unité intérieure de grâce… (Ainsi) l’unique Église du Christ… est à la fois et sans séparation socielas fidei et Spiritus Sancti in cordibus et societas exlernarum rerum ac rituum : une unité à la fois incarnée et pneumatique. D’elle, il est également vrai de dire : Ubi Christus, ibi Ecclesia, parce que, dès qu’il y a communication de l’Esprit du Christ, l’Église existe, et : Ubi Petrus, ibi Ecclesia, parce que la communion intérieure de vie est réalisée par des moyens humains, un ministère apostolique qui a lui-même, en Pierre, son critère visible d’unité (p. 108-109).

Ainsi, par le côté où l’unique Église comporte une organisation de la matière humaine pour l’incorporer dans l’unité, il lui faudra s’adapter aux divisions et aux variétés de cette matière. Très rigoureusement une, l’Église se montre ainsi généreusement diverse. La catholicité de l’Église, essentiellement qualitative, s’origine à l’unité, puisquelle vient du Christ, qui appelle tous les hommes. Le rôle de la catholicité sera donc de purifier les diversités humaines et, se les assimilant pour se les incorporer, de les faire renoncer à leur trop grand particularisme. Ainsi, en vertu des principes qui sont à la base même de la conception de l’Église une et catholique du Christ, il faut que le christianisme assimile ce qu’il assume en son unité, et cette assimilation, à quelque degré que ce soit, veut le désintéressement et la subordination de l’assimilé.

Or, l’idéologie de Stockholm quant à la notion d’œcuménisme est inadmissible : elle suppose en effet que l’Église du Christ n’est pas encore actuellement donnée dans le monde… Les congrès, les conférences, les réunions interconfessionnelles peuvent être le symbole de l’apparition d’un nouvel esprit œcuménique au sein de la chrétienté, mais ils ne peuvent prétendre à la création d’une Église qui, pour la première fois, serait authentiquenient œcuménique. L’Église catholique rejette doctrinalement, avec la plus grande netteté, toute forme d’œcuménisme » où les promesses et les dons du Christ relatifs à son Église risquent d’être considérés, au moins en fait, comme ayant été, fût-ce en partie, inefficaces et précaires (p. 177-178).

Dans la théologie anglicane de l’unité, il y a beaucoup de bonnes choses, beaucoup d’éléments vrais ;