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    1. UNITÉ DE L’ÉGLISE##


UNITÉ DE L’ÉGLISE. L’ŒCUMÉNISME CHRETIEN

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mais comme « distributives ». Ainsi l’unité religieuse sera l’union des éléments les plus divers considérés comme autant de manifestations de l’expérience de la vie chrétienne dans la liberté et l’indépendance. C’est aussi l’impression qui ressort du petit volume de W. Monod, Le protestantisme, Paris, 1930. Des auteurs courageux n’ont pas manqué de montrer quel danger faisait courir à la religion un tel excès de liberté : danger tout particulièrement signalé par M. Bœgner, L’Église, Paris, 1932, p. 91-92, sans toutefois que le protestantisme le plus orthodoxe puisse trouver en lui-même de quoi y parer. Voir Ami du clergé, 1930, p. 233 sq. ; 1932, p. 388.

Ceux des anglicans qui avaient caressé l’espoir d’un rapprochement avec Rome et qui constatèrent que Rome ne pouvait payer ce rapprochement du prix de ses dogmes et de sa constitution divine, se sont tournés d’eux-mêmes vers l’œcuménisme chrétien : le 2 octobre 1929, au synode de l’Église d’Ecosse, où il représentait lui-même l’Angleterre, lord Davidson, archevêque de Cantorbéry, déclarait : « Nous avons longtemps cherché l’unité de l’Église en nous tournant vers le catholicisme romain. Maintenant, c’est fini. Nous nous tournerons, à l’avenir, vers nos frères protestants. »

Dès 1877, des concentrations protestantes entre presbytériens réformés, luthériens, méthodistes, baptistes, congrégationalistes, préparent les voies à un œcuménisme chrétien. D’autres rapprochements interconfessionnels marquent une nouvelle étape importante : Frères protestants de France (1905), de Suisse, de Tchécoslovaquie ; le Fédéral council américain (1908) ; l’union des Églises du Canada (United Church oj Canada, 1924-1925 ; combinaison des méthodistes, congrégationalistes, presbytériens), de l’Inde (South Indian L’nited Church, 1908, union des communautés réformées, congrégationalistes, luthériennes), etc. Il faut également citer les conférences de l.ambeth quillet 1914 et surtout juillet-août 1920) qui acceptent, pour la communion et la prédication, le concours des ministres non épiscopaliens ordonnés, tout en les excluant de la célébration des saints mystères. Cf. d’Herbigny, Theologica de Ecclesia, Paris, 1921, t. ii, p. 36, note. La conférence d’Edimbourg (1910) marque une étape importante et l’évêque Brent, de l’Église épiscopalienne des États-t mis, y lîl admettre le problème de l’unification des Églises elles-mêmes. Voir, dans En marche vers l’unité chrétienne, tiré à part des Cahiers du Christianisme social, janvier-février 1937, l’article de H. Clavier, L’Œcuménisme, coup

d’ail SUT 80n histoire, ]>. ]~-'2<>.

Ces premières suggestions donnèrent lieu, chez les protestants, au mouvement for l-’ailh and Order (pour la foi et la constitution) et au mouvement for Life and Work (pour la vie et l’action), le premier plus orthodoxe ci cherchant à réagir contre l’émiettement

progressif des dogmes et des institutions authentiquenu ni évangéliques, le second, abandonnant les formes religieuses traditionnelles pour marquer à la religion un but d’action pratique, dans lequel les confessions, malgré leurs divergences même dogmatiques peuvent

trouver un terrain d’entente. Voir Ch. Journet,

L’union des Églises, Paris, 1927, p. 3

I.e mouvement Life and Work elt pour initiateur le primat de l’Église luthérienne de Suède. Nathan SOderblom, archevêque d’Upsal. Mouvement d’union sur le terrain pratique, il avait été inauguré en 1X95. au congres de Waldslena. en prenant comme base

le « Quadrilatère de Lambeth, déjà formulé en 1880 : la Bible comme règle de foi. le credo des apôtres et le credo de Nicée, le baptême et l’eucharistie comme tnents obligatoires, l’éplscopal historique comme fondement de l’ordre ecclésiastique. Préparé (le

longue main, le « concile du christianisme pratique » se réunit à Stockholm du 19 au 30 août 1925, se proposant de réaliser l’unité « au point de vue moral, social, politique et international, évitant de se placer sur le terrain spéculatif de la foi ». Le vœu final fut « que Pierre (le catholicisme romain) ne tardât pas davantage à se joindre à Jean (l’orthodoxie) et à Paul (le protestantisme) ». H. Clavier, art. cit., p. 22. Sur le mouvement de Stockholm, voir aussi Henri Monnier, Vers l’union des Églises, Paris, 1926 ; Élie Gounelle, La conférence du christianisme pratique, Stockholm, 19-29 août 1925, Saint-Étienne, 1926. Cf. G. Coolen, op. cit., p. 99-101.

Le mouvement Faith and Order, qui prit naissance à la conférence d’Edimbourg en 1910, devait s’affirmer, en 1927, à la conférence de Lausanne. Ce « concile- » auquel naturellement les catholiques avaient refusé de prendre part, mais où des orthodoxes vinrent siéger, s’ouvrit, le 3 août 1927 dans la cathédrale de Lausanne. Il était présidé par l’évêque Brent. Les problèmes agités concernaient l’unité de l’Église dans la doctrine. Rien d’étonnant que, dans un pareil mélange d’anglo-catholiques, de luthériens, de calvinistes, d’orthodoxes, l’entente n’ait pas pu se faire. Les évêques orientaux posèrent en principe que l’union n’était possible que sur la base de l’unité de foi et de l’acceptation des sept conciles œcuméniques et de la catholicité des huit premiers siècles. G. Coolen, op. cit., p. 101. Voir aussi H. Clavier, art. cit., p. 24-26. Les documents élaborés à Lausanne devaient être repris, pour le même objet, en août 1937 à la conférence universelle projetée à Edimbourg. Cf. Ch. Merle d’Aubigné, Le mouvement de « Foi et Constitution » el la conférence d’Edimbourg, dans le recueil précité, p. 28 sq.

Ces désirs d’unité se traduisirent pratiquement par une union plus intime entre les missions protestantes, réalisée à la Conférence missionnaire de Jérusalem de 1928. Voir Pour la conquête du monde, supplément au Journal des missions évangéliques, juin 1928.

La plupart des partisans de l’œcuménisme chrétien rejettent l’idée d’une unité conçue sur le plan d’une fédération d’Églises. Cette fédération, dit-on, « ne serait pas même possible à l’heure actuelle. Le lien fédératif suppose une communauté de vues, de sentiments et même d’intérêts qui n’existe pas encore ». Le qu’on veut, c’est « l’unité de l’Église de Jésus-Christ, une unité spirituelle sans doute, mais s’expri niant et se réalisant dans un corps, le corps mystique du Christ, une unité « organique » et non pas une alliance humaine, une simple juxtaposition d’éléments plus ou moins disparates ». Ch. Merle d’Aubigné, art. cit., p. 35. C’est la « communauté des Églises >, séparées sans doute encore par bien des malentendus cl des différends, « mais unies foncièrement entre elles par leur dépendance absolue à l’égard de notre divin .Maître ». [d., ibid.

C’est cette « vaste communion de toutes les Églises chrétiennes que le Congrès de Stockholm appelait de tous ses vieux dans son message final, n. IL Voir II. Monnier, op. cit., p. 91. Les actes officiels de la Conférence de Lausanne, version française publiée sous la direction du pasleur.1. Jézéqucl. apportent d’intéressantes précisions sur la façon dont les mem lues du congrès, soit dans des interventions particulières, soil dans les résolutions collectives, concevaient l’unité de l’Église, fous les orateurs, avec des dlver gences parfois fort accentuées, réclament celle unité. Mais précisément les divergences doctrinales et dis

ciplinaires empêchent de trouver le commun dénominateur nécessaire à l’unité réelle. Aussi le président

de la vir commission, l’archevêque Soderbloin. chargé du rapport sur l’unité, insista pour qu’on substituai