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1897

    1. TROIS-CHAPITRES##


TROIS-CHAPITRES. LE SECOND EDIT DE JUSTINIEN

1898

Baluze et rééditée par Mansi, Concil., t. ix, col. 56-58, c’est une lettre des clercs romains de la suite du pape au clergé de Rome et de l’Italie, lui annonçant la condamnation d’Askidas. Pour cette partie de la biographie de Vigile, le Liber pontificalis dépend des pièces 1 et 2. Sa narration n’est certainement pas d’un témoin oculaire.

1. En attendant l’édit de Juslinien.

Divers faits montrent bien qu’au Sacré-Palais on caressait, depuis quelque temps, l’idée d’une nouvelle condamnation.

Le plus curieux fut l’enquête ordonnée dans la ville de Mopsueste pour savoir en quelle estime y était tenue la mémoire de Théodore. Les défenseurs des Trois-Chapitres arguaient que cet évêque était mort dans la paix de l’Église, qu’il avait reçu après sa mort les honneurs que l’on décernait aux prélats défunts, en particulier l’inscription aux diptyques de son Église. Une sacra du 22 mai 550 prescrivit au métropolite de la province de Cilicie de faire une enquête à ce sujet. Les procès-verbaux de la réunion synodale qui se tint à cet effet le 17 juin 550 sont conservés à la session v du Ve concile. Mansi, Concil., t. ix, col. 274288. Celle-ci conclut que l’on n’avait pas souvenance à Mopsueste que Théodore y eût jamais été inscrit aux diptyques. Au contraire on y voyait figurer le nom d’un Cyrille, qui ne pouvait être que le patriarche d’Alexandrie. On pouvait donc conclure que, très tôt après la mort de l’évêque « hérétique », le nom de l’Alexandrin avait été substitué au sien.

En même temps ou un peu plus tard une action énergique s’exerçait contre tous les réluctants. Réparatus était remplacé à Carthage par son diacre Primosus, après que celui-ci eût condamné ce qui avait été fait en synode par les défenseurs des Trois-Chapitres. Firmus primat de Numidie, de séjour dans la capitale, circonvenu par le basileus, signa lui aussi et fut renvoyé en Afrique, mais il mourut de male mort dans le voyage. Primasius, évêque d’Hadrumète, qui avait d’abord refusé sa signature et avait été relégué au couvent des acémètes, chanta la palinodie pour obtenir le rang de primat de la Byzacène. Rentré en Afrique, i ! eut ultérieurement des démêlés avec le synode de sa province. Victor, an. 551 et 552, P. L., t. lxviii, col. 959. A Jérusalem et à Alexandrie, les deux patriarches Macaire et Zoïle étaient eux aussi déposés et remplacés.

2. Le second édit de Justinien.

Cette pression continue sur toutes les consciences tant soit peu indépendantes préparait la manifestation finale. En juillet 551, 1e basileus faisait afficher à la porte des principales églises de Constantinople un nouvel édit de condamnation des Trois-Chapitres. Texte grec et latin dans P. G., t. lxxxvi a, col. 993-1035 ; P. L., t. lxix, col. 226-267 ; Mansi, Concil., t. ix, col. 537-581. Au point de vue de l’histoire des dogmes cet édit est de capitale importance, car c’est lui qui a été remployé pour la rédaction des définitions conciliaires de 553 ; les canons, en particulier, en dérivent presque textuellement.

Il débute par un exposé positif de la foi, qui s’inspire de la théologie de Léonce de Byzance, renvoyant dos à dos nestoriens et monophysites. c Du point de vue de l’union hypostatique, il faut, disait-il, exclure, à rencontre des premiers, la préexistence à cette union de l’humanité du Christ. C’est l’hypostase du Verbe qui s’est créé à elle-même une chair animé*- par une âme raisonnable ; le Verbe ne s’est pas uni à un homme préexistant, comme l’ont dit dans leurs blasphèmes Théodore et Nestorius, qui n’admettent qu’une union de possession (aye-rix^v r>)V Évwoiv). Il faut donc parler d’une double naissance du Verbe, ce qui inclut pour Marie le titre de théoiocos. Tout aussi criticables, d’ailleurs, que les nestoriens sont les monophysite, .

L’enosis kata sunthesin qu’enseigne la foi catholique exclut tout aussi bien la confusion que la division. Les monophysites n’ont aucun droit de s’abriter derrière la formule cyrillienne : mia phusis tou Theou logou sesarkomene, car Cyrille se sert du mot phusis dans le sens d’hypostase et non dans celui d’ousia. On ne saurait même faire appel sans restriction, pour expliquer l’union, à la comparaison tirée des rapports entre l’âme et le corps. Bien qu’elle ait été employée par les Pères, cette comparaison cloche et l’union hypostatique est d’un ordre unique. Les arguments dialectiques des monophysites ne valent pas mieux que leur appel aux textes des Pères. Et, d’ailleurs, il est de nombreux passages de ceux-ci qui établissent que la distinction entre les deux natures n’amène pas la séparation du Christ en deux hypostases. Au fait il est impossible de confondre phusis et hupostasis. La phusis (ousia, morphé en sont les synonymes), c’est ce qu’il y a de commun entre individus de même nature, l’hupostasis, le prosopon (la synonymie est parfaite entre ces deux mots), c’est ce qui est caractéristique de l’individu (to idikon). Deux personnes ne pourraient s’unir hypostatiquement, mais la nature humaine du Christ, qui n’a pas d’hypostase, n’a eu l’être que dans l’hypostase du Verbe. » Cet exposé positif, où d’ailleurs il n’y a rien à reprendre, montre combien l’impérial théologien (ou ses conseillers techniques) s’était assimilé la pensée et le vocabulaire de Léonce.

La même doctrine revenait, sous forme négative, en treize anathématismes, dont les dix premiers ne nous retiendront pas. Les trois derniers vouaient à l’anathème quiconque défendrait Théodore de Mopsueste, à qui grief était fait tant de sa christologie que de son exégèse ; quiconque le défendrait, ou ne l’anathématiserait pas, lui, ses écrits et tous ceux qui auraient pensé ou penseraient de même (n. 11) ; quiconque aussi défendrait les ouvrages de Théodoret composés en faveur de Nestorius et contre l’orthodoxie, contre Cyrille et ses capitula (n. 12) ; quiconque enfin défendrait cette lettre à Maris, que l’on disait être d’Ibas et dont l’édit rappelait les enseignements impies (n. 13). Cette lettre, quoi qu’on eût dit, n’avait pas été reçue par Chalcédoine, où Ibas n’avait pas osé l’avouer ; elle ne figurait pas dans les exemplaires authentiques du concile. Cette petite apologie terminée, l’édit revenait au cas de Théodore et discutait les objections de ceux qui, tout en condamnant les erreurs de l’évêque de Mopsueste se refusaient à le condamner lui-même, sous prétexte qu’on ne doit pas s’en prendre aux morts décédés dans la communion de l’Église. Il terminait en citant devant le tribunal de Dieu ceux qui voulaient trouver en la confession de foi impériale matière à de vaines disputes, lesquelles ne pourraient être que des querelles de mots.

Outre cet édit si péremptoire, Justinien a publié également une longue dissertation sur la culpabilité des auteurs visés dans l’édit officiel. Cette dissertation se donne comme une lettre adressée par le souverain à ceux qui veulent justifier l’impie Théodore et ses misérables enseignements, la lettre dite d’Ibas et les écrits de Théodoret contient la foi orthodoxe. Les défenseurs des Trois-Chapitres ont adressé à ce sujet des observations au basileus. Celui-ci y répond et pour mettre davantage en évidence l’hérésie de Théodore, il apporte une série de textes extraits des œuvres de l’Interprète. Cf. art. Théodore de Mopsueste, col. 243. Si Théodore est hérétique la lettre d’Ibas qui le loue est donc aussi hétérodoxe. Texte de cette dissertation dans P. G., t. lxxxvi a, col. 1041-1096. On a beaucoup discuté sur la date ; cf. ici art. Justinien, t. viii, col. 2282. La façon dont le basileus apporte les textes de Théodore nous paraît indiquer que cette composition prend place entre l’édit et les délibéra -