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    1. TROIS-CHAPITRES##


TROIS-CHAPITRES. THEODORET

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confusion, ni commixtion, ni mélange des deux éléments divin et humain ; il savait fort bien que, selon sa nature, le Verbe divin était incapable d’aucun changement ; bref il expliquait de manière acceptable certaines expressions des anathématismes. Synod., n. 145 (56), p. 94 sq. ; col. 661 sq. Dès l’abord Jean d’Antioche parut considérer cette lettre comme une base possible d’entente. À l’encontre de plusieurs de ses amis qui se montreront toujours intraitables à l’endroit de « l’Égyptien », Théodore ! vit, lui aussi, dans la lettre de Cyrille une rétractation suffisante des anathématismes. Mais il entendait néanmoins ne pas abandonner Nestorius. Synod., n. 149 (60), p. 101 ; col. 670, à Acace de Bérée ; n. 150 (61), p. 102 ; col. 671, à André de Samosate ; n. 155 (66), p. 104 ; col. 674, à Alexandre de Hiérapolis ; n. 159 (70), p. 106 ; col. 667, à Helladius de Tarse ; n. 160 (71), p. 107 ; col. 678, à Himère de Nicomédie. Il prenait ainsi une position moyenne entre celle de Jean d’Antioche, qui finalement céderait aux exigences de Cyrille pour ce qui était de la condamnation de Nestorius, et celle des plus exaltés d’entre les Orientaux.

Après d’assez laborieuses négociations l’accord se fit entre Jean d’Antioche et Cyrille, accord constaté par la lettre Lœtentur cœli (avril 433) : les Orientaux acceptaient la déposition de Nestorius et anathématisaient ses « blasphèmes ». Cyrille, de son côté, faisait le silence sur les anathématismes et acceptait une formule de foi, qui, en dernière analyse, provenait de Théodoret. Art. Nestorius, col. 122 sq. Pourtant l’évêque de Cyr ne ressentit aucune joie de la nouvelle que lui transmit de l’accord conclu le patriarche Jean. L’assentiment à la condamnation de Nestorius lui parut inadmissible : les Orientaux passaient l’éponge sur les coups de force de Cyrille, celui-ci ne pouvait donc exiger que les Orientaux abandonnassent les plus distingués des leurs, egregios nostros. On ne se rallierait pas à la communion des Égyptiens avant que les compagnons de luttes n’eussent recouvré leurs sièges épiscopaux. Synod., n. 175 (87), p. 125 ; col. 701, à Jean d’Antioche ; cf. n. 183 (95), p. 131 ; col. 709, au même. Dans cette dernière pièce, dont le Ve concile a fait état, Théodoret opposait la doctrine maintenant acceptée par Cyrille et celle que préconisaient les anathématismes dont il interprétait toujours la pensée dans le même sens que trois ans plus tôt. Tout en constatant les concessions faites par Cyrille, il ne laissait pas de dire ses craintes des exigences que celui-ci pourrait ultérieurement produire ; il croyait donc devoir prévenir Jean des oppositions qui se produiraient inévitablement. Ainsi, aux premiers temps qui suivirent l’accord de 433, Théodoret apparaît comme l’animateur de la résistance aux conditions de Cyrille touchant l’abandon de Nestorius. De son couvent d’Euprépios, aux portes d’Antioche, ce dernier suivait toute cette agitation ; il demeurait en rapports avec Théodoret et une lettre s’est conservée que l’évêque de Cyr adressa, en ces conjonctures, à l’archevêque déposé. Synod., n. 208 (120), p. 149 ; col. 733, citée aussi au Ve concile. Sans doute, son correspondant lui avait-il fait quelque reproche de ses appréciations de la lettre Lœtentur. « C’est après mûre délibération, répond Théodoret, et tous les termes bien pesés, que je l’ai déclarée exempte de toute contamination hérétique. Encore que j’en haïsse l’auteur autant que personne, comme étant le responsable de tous les troubles, je me ferais scrupule de lui donner une note infamante. » Mais quant aux injustices commises contre la personne de Nestorius, dût-on lui couper les deux mains, il ne consentirait pas à les approuver.

Jean d’Antioche, pourtant, était bien décidé à obtenir de gré ou de force l’adhésion de tous ses ressortissants. Des menaces à peine déguisées furent adressées à Théodoret, qui faillit bien, à un moment donné, partager le sort des plus intransigeants parmi ses collègues d’Orient. On fit agir sur lui d’autres influences ; finalement dans une entrevue qu’il eut avec Jean à Antioche même, il s’assura que la doctrine était sauve et que l’on n’exigerait pas à toute force que fût approuvée la déposition de Nestorius. Cf. Synod., n. 210 (122), p. 153 ; col. 738. C’est dans ces conditions qu’il fit sa paix avec Jean d’abord, avec Cyrille lui-même ensuite ; dans les mois qui suivirent on le voit s’efforcer de rallier à son point de vue les opposants restés nombreux en Cilicie, en Isaurie, mais surtout en Euphratésienne, où l’opposition d’Alexandre de Hiérapolis ne désarmait pas. Cf. Synod., 243 (155), 254 (166), 256 (168), 259 (171), 258 (170). Ce fut d’ailleurs peine perdue, et les rigueurs gouvernementales finirent par s’abattre sur les réluctants. Au même moment, ou à peu près, Nestorius était exilé à Pétra, d’abord, puis dans la Grande Oasis (435). Ce fut l’occasion d’exiger de nouvelles signatures, plus précises que les premières, de tous ceux qui, en acceptant l’accord de 433, avaient pu réserver leur adhésion à la déposition de Nestorius. Cyrille pressa Jean de faire signer Théodoret. Synod., n. 301 (210), p. 231 ; col. 836. Et il n’est guère douteux que l’évêque de Cyr ait dû, comme les autres se soumettre et « boire à son tour l’amer calice ». Jean, dans la liste des provinces de son ressort où les signatures ont été exigées, ne signale aucune résistance ni en Euphratésienne, ni en Syrie, Synod., n. 287 (197), p. 208 ; col. 810. Dans une lettre à Dioscore, Théodoret dit expressément qu’il a anathématisé deux fois Nestorius. Epist., lxxxiii, P. G., t. lxxxiii, col. 1273 B. Il ne tint pas qu’à Cyrille que le calice fût plus amer encore. Il entendait maintenant, encouragé par les reculs successifs de Jean, qu’on exigerait une adhésion non seulement aux mesures prises contre Nestorius, mais encore à des propositions dogmatiques qui semblaient revenir en arrière sur les concessions faites en 433. Synod., 283 (194) et 284 (195), p. 206 sq. ; col. 806 sq. Cette fois, Jean résista et Cyrille n’insista pas. Mais c’est là-dessus que se greffa la campagne contre les docteurs antiochiens défunts. Ci-dessus, col. 1871. Jean aurait demandé à Théodoret de réfuter les trois livres de Cyrille contre Théodore et Diodore. Nous ne savons ce qu’il en advint. La fin de non-recevoir opposée par le patriarche d’Antioche aux exigences de Proclus mit un terme à toute cette agitation.

La mort aussi faisait son œuvre ; Jean disparaissait en 441-442, Cyrille en 444. Le trépas de ce dernier fut l’occasion pour bien des Orientaux d’exhaler leurs rancunes contre le. « Pharaon ». Au Ve concile on citera une lettre de Théodoret à Jean — ce qui constitue un grossier anachronisme — où l’évêque de Cyr exprimait, en termes bien peu évangéliques, le soulagement ressenti par tous à la mort de ce « méchant homme », la liberté que l’on aurait maintenant de s’attaquer aux formules les plus criticables de l’Égyptien. Pour admettre cette lettre comme authentique, il faudrait la supposer adressée à Domnus, successeur de Jean, ce qui ne paraît pas impossible. Le ton néanmoins la rend bien suspecte. La pièce n’est conservée que par le texte conciliaire, où se relèvent quelques faux. Des idées analogues s’expriment aussi dans un sermon que Théodoret aurait prononcé à Antioche en présence de Domnus peu après la mort de Cyrille. Un extrait en est transmis par le Ve concile, que l’on retrouve aussi dans la Palalina. Dans A. C. 0., t. i, vol. v, p. 173 ; P. L., t. xlviii, col. 1033. Garnicr y voyait jadis l’expression du plus pur « nestorianisme ». On peut différer d’avis à ce sujet.

De toutes ces interventions de Théodoret dans la grande querelle qui mit aux prises Cyrille et les Orien-