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ZOSIME. QUESTION PÉLAGIENNE


Zosime ; en même temps, il relevait l’antiquité du siège qu’il occupait d’une manière plus ou moins légitime. Ainsi s’explique la décrétale Placuit que Zosime signait, au lendemain de sa consécration, le 22 mars 417.

Les concessions faites à Patrocle lésaient des droits acquis et qui avaient été, peu auparavant, reconnus par le concile de Turin. Voir Turin (Concile de), t. xv, col. 1927. Elles empêchaient aussi le fonctionnement de l’organisation métropolitaine, dont ce même concile avait reconnu l’intérêt. Dans la Gaule du Sud-Est un mécontentement assez vif se manifesta. Hilaire, évêque de Narbonne, protesta qu’il avait des droits métropolitains sur la Narbonaise première ; il fut rabroué d’importance, Jafîé, n. 332, du 26 septembre 417 ; le pape Boniface devait d’ailleurs, quelques années plus tard, reconnaître ses droits. Cf. Jaffé, n. 362. Quant à Proculus, évêque de Marseille, à qui le concile de Turin avait fait une situation spéciale dans la Narbonaise deuxième, il se comporta comme si aucune disposition nouvelle n’était intervenue. En dépit de la décrétale Placuit, il donna aux deux localités de Citharista et de Gargaria, dans la banlieue marseillaise, spécialement visées dans la lettre apostolique, deux évêques, Ursus et Tuentius. Renseignée par Patrocle, la Curie réagit avec violence. Jaffé, n. 331, 333, 334, des 22, 26 et 29 septembre 417. La première lettre, Cum aduersus statula, adressée simultanément aux évêques d’Afrique, des Gaules et d’Espagne, leur interdisait de reconnaître comme évêques les deux personnages consacrés par Proculus, au préjudice des droits de Patrocle, et sans qu’eussent été observées les règles les plus élémentaires. La présence à la cérémonie de Lazare d’Aix, personnage taré et que l’évêque de Marseille avait jadis condamne pour ses calomnies, était bien faite pour discréditer les élus ; l’un d’entre eux d’ailleurs, Tuentius, était suspect de mauvaises mœurs, pis encore accusé de priscillianisme. La lettre 334, Multa contra vclerem formam, adressée aux évêques de Viennoise et de Xarbonaise première, faisait en termes d’une incroyable âpreté le procès de l’évêque de Marseille. Remontant à vingt ans en arrière, le pape lui reprochait ses agissements au concile de Turin, ses collusions d’alors avec Simplice, évêque de Vienne, pour faire pièce aux droits du siège d’Arles. De tout cela, Proculus ne semble pas s’être beaucoup ému ; il fut alors sommé de venir s’expliquer devant le synode romain ; il n’y parut pas. Patrocle qui y était venu demanda alors sa déposition que le pape prononça. C’est ce dont témoignent les deux lettres Jaffé, n. 340 et 341, datées du 5 mars 418. La première renouvelait à Patrocle tous les privilèges à lui accordés ; la seconde, adressée au clergé et au peuple de Marseille, leur annonçait que Proculus n’était plus leur évêque et que l’administration religieuse de la cité avait été confiée à Patrocle, en attendant que celui-ci pût lui donner un évêque. Ce déploiement d’autorité n’empêcha pas Proculus de se considérer comme le titulaire régulier de Marseille ; il y restera longtemps encore en exercice. Somme toute l’incroyable condescendance de Zosime à l’endroit de Patrocle n’avait abouti qu’à mettre le trouble dans Il Gaule du Sud-Est.

II. La question péla’.h.nm.. — Elle allait avoir île bien plus graves conséquences dans une affaire qui touchait de près au dogme : la révision du procès de Célestius et de Pelage, ’.f. : irt. I’ûi.aoianisme, t.xii, col. 696 sq. Condamné, sur l’intcrvent ion du diacre Paulin de Milan, en un concile de Carthage de 411, Célestlus avait fait appel au pape Innocent I", puis, sans plus se préoccuper de cet appel, s’était enfui en Asie. Aant lui Pelage avait quitté l’Afrique, s’était

transporté en Palestine, où de vives discussions s’étaient élevées autour de sa doctrine. La dernière et la plus importante manifestation avait été celle du concile de Diospolis ; on se rappelle que l’action synodale avait été déclenchée par l’intervention des deux évêques Héros d’Arles et Lazare d’Aix, pour lors présents en Palestine, mais qui ne purent d’ailleurs soutenir l’accusation autant que de besoin. Si le concile de Diospolis, au point de vue doctrinal, avait réprouvé les enseignements contraires au dogme du péché originel, il avait terminé par un non-lieu la question de la culpabilité personnelle de Pelage. Prévenus par Héros et Lazare, les évêques d’Afrique avaient instantanément réagi. Les deux conciles de Carthage et de Milève avaient mis en sûreté la doctrine compromise, du moins en apparence, par les concessions de Diospolis, la pleine approbation qu’avait donnée à leurs sentences le pape Innocent semblait bien mettre le point final à la controverse ; causa flnita est, avait dit saint Augustin. Cf. art. Innocent I er, t. vii, col. 1948.

Appel à Rome de Célestius.

Il est incontestable

néanmoins qu’il restait à Rome, et dans les hautes sphères du clergé, un parti favorable sinon peut-être aux idées pélagiennes, du moins aux hommes qui avaient fait la fortune de celles-ci. La disparition du pape Innocent et son remplacement par Zosime allaient être le signal, dans la capitale, d’une vraie campagne en faveur de la révision des jugements africains ; d’autant que Célestius et Pelage par un appel en règle saisissaient le Siège apostolique. L’appel de Célestius arriva le premier ; adressé au pape Innocent, il était remis à son successeur. Il était censé reprendre purement et simplement la procédure entamée par Célestius au lendemain de sa condamnation à Carthage, encore que cinq années se fussent déjà écoulées. Célestius, d’ailleurs, ne tarda pas à se présenter en personne au pape Zosime, réclamant justice ; sans doute ne se priva-t-il pas de mettre en cause les deux évêques Héros et Lazare, qui avaient incriminé Pelage comme reprenant en sous-main les propositions de Célestius condamnées au I" concile de Carthage de 411. De tout ceci, il est aisé de trouver les traces dans la lettre Jaffé n. 329, malheureusement non datée et qui fut adressée par Zosime au primat d’Afrique Aurèle et à tous ses évêques, sans doute au début de l’été 417. Célestius, y lisait-on, s’était présenté spontanément à l’examen du pape, lequel avait étudié sa cause dans une assemblée tenue à Saint-Clément. Après lecture des actes antérieurs, Célestius avait été introduit et avait lu son acte d’appel ; l’on s’était efforcé, par de multiples interrogations, de tirer au clair sa pensée. Une chose avait surtout frappé le pape : à l’audition de Célestius i Carthage, en 411, rien n’avait été liquidé : cum in prœscnti ibi Cœlestium hubucritis, niliil liquido judtculum est. C’est plus tard seulement et sur le vu de la lettre d’Héros et de Lazare que l’Afrique avait pris position avec une hâte surprenante. Or, Célestius prétendait bien n’avoir jamais rien eu de commun avec ces deux personnages. Les conciles africains s’étaient aveuglément rangés aux griefs de ceux-ci, qui n’inspiraient aucune confiance. Et le pape de faire le procès des deux évêques en question, qu’il avait dû, en fin de compte, déposer et excommunier : sacerdotali eos loco et omni communione submovinw*. II n’y aurait point de honte, pour les Africains, à réformer leur premier jugement, émis dani de telle* conditions. En définitive, on laissait aux accusateurs de Célestius deux mois pour déposer une nouvelle plainte. Ce délai passé et si rien n’intervenait, c’est que l’Eglise d’Afrique reconnaissait que les réponses de l’accusé ne laissaient place. À aucune