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YVES DE CHARTRES


des réordinations y est touchée. Tout en déclarant que celui qui abandonne l’Église ne perd ni le baptême, ni le droit de le conférer, Yves se montre sévère pour les ordinations données par les dissidents : Redeuntes ab hæreticis sunt reordinandi, déclare le c. lxxxi, qui reproduit un texte en ce sens d’Urbain II, cf. art. Réordinations, t. xiii, col. 2418 sq. ; cf. c. cxxx. Les ordinations simoniaques font l’objet de tout un titre, c. cxvi-cxxvii, mais il est assez difficile d’en tirer une doctrine précise. — L. IV. De primalu Romanæ Ecclesise et de jure metropolitanorum alque episcoporum ; il fusionne les données des parties V et VI du Décret, mais présentées dans un ordre plus logique. La primauté romaine y est établie avec plus de soin. Encore que l’auteur débute par la Donation de Constantin, il n’en affirme pas moins l’origine divine du pouvoir pontifical : Non ab apostolis sed ab ipso Domino Romana Ecclesia primatum accepit. Cette primauté n’a pas été instituée par un concile, mais par le Christ lui-même. Aussi le premier siège n’est-il soumis au jugement de personne, les causes majeures lui sont réservées et ses décisions sont irrévocables. Aucun concile n’est légitime s’il n’est rassemblé et célébré par l’autorité du Siège apostolique. Toute cette doctrine s’exprime dans les termes mêmes du Pseudo-Isidore. C’est encore à cette collection que sont empruntés tous les développements qui suivent sur les primats et les archevêques, et sur les causes où sont impliqués les clercs. — L. V. De clerlcis accusatis. Il reprend avec force détails empruntés à la même source la question des procès ecclésiastiques.

— L. VI. De nuptiis. Il correspond sensiblement aux parties VIII et IX du Décret, en insistant davantage sur ce qui constitue proprement le mariage ; les questions d’empêchements sont renvoyées au livre suivant. — L. VII. De separatione conjugii. Il groupe sous ce titre quelque peu trompeur un certain nombre d’empêchements de mariage, tout spécialement ceux de crime, de parenté naturelle et spirituelle et d’affinité. — L. VIII. De homicidio spontaneo et non spontaneo. Il ajoute à cette matière déjà abondante les questions relatives à la divination, aux sortilèges, aux vaines observances. Le point spécial du serment et du mensonge est étudié avec beaucoup de soins. Quelques appendices recueillent des documents qui sans doute avaient échappé à une première recherche. Les plus intéressants sont relatifs aux droits reconnus par les papes aux empereurs sur l’élection pontificale. C. cxxxv et cxxxvi. Il est fort douteux que leur insertion soit le fait de l’auteur. Quelques canons en provenance d’Innocent II (1130-1143) sont des additions ultérieures. En dépit de ses très réels défauts, la Panormia n’en présentait pas moins sous un petit volume « une encyclopédie sommaire du droit canonique » (P. Fournier et G. Le Bras, Histoire des collections canoniques…, t. ii, p. 99). Elle se distingue du Décret par plus de méthode, mais aussi par une rédaction plus précis" des sommaires qui précèdent et résument chaque canon et semblent davantage l’œuvre originale et personnelle d’Yves.

Sermons et opuscules théologiques.

Sur la foi

des mss., on a attribué à Yves de Chartres et publié sous son nom un certain nombre de dissertations dont plusieurs pourraient être considérées comme des sermons. Texte dans P. L., t. ci.xii, col. 505-610. les quatre premières, qui sont présentées comme des instructions adressées par l’évêque à son clergé en synode diocésain, donnent l’explication du baptême, de l’ordination, du sens des ornements sacerdotaux, île la dédicace des églises. Elles sont précieuses pour l’histoire de la liturgie et de la prédication. Cf. J. de (Ihellinck, L’essor de la littérature latine au xrr’siècle, 1940. t. i, p. 155, 206 sq.

La seconde en particulier, intitulée, dans l’édition d’Hittorp, De excellentia sacrorum ordinum et de vitti ordinandorum (P. L., clxii, col. 513-519), souvent reproduite dans les mss., a joui d’une grande fortune littéraire auprès des théologiens du xiie siècle ; cf..1. de Ghellinck, Le traité de Pierre Lombard sur les sept ordres ecclésiastiques, ses sources, ses copistes, dans Revue d’hist. eccl., t. x, 1909, p. 290 et 720 sq. ; t. xi. 1910, p. 29 sq. Les suivantes touchent à des points dogmatiques : n. v, De convenienlia veleris et novi sacrificii, qui étudie les rapports entre les figures de l’Ancien Testament et les réalisations du Nouveau et qui montre également dans la messe le résumé des principaux mystères ; n. vi, QuarcDeus natus et passus (à rapprocher du Cur Dcus homo de saint Anselme) ; tout en faisant encore état de la théorie des droits du démon, les développements tendent à montrer que l’incarnation manifeste au mieux les deux grands attributs de Dieu, la puissance et la bonté : ce que la sagesse divine pouvait faire avec force, en arrachant au séducteur du genre humain ceux qu’il avait séduits, elle voulut l’accomplir avec suavité, en s’unissant à l’infirmité de notre chair, qu’elle commença par guérir, par le simple fait qu’elle l’assuma (P. L., clxii, col. 562 C D). Les autres textes ont davantage l’allure de sermons, ils sont répartis entre les diverses fêtes de l’année liturgique, de l’Avent à la Pentecôte. Le n. xxi est pour la fête de la Chaire de saint Pierre à Antioche (Hodie beatus Pelrus Antiochenæ Ecclesiæ episcopus ordinatur ; hodie plebi quam ipsemet Deo acquisivil pastor præficilur). Les deux avant-derniers expliquent très sommairement l’oraison dominicale et le symbole des apôtres. Un dernier sermon : De adullerino habitu virorum vcl mulierum est d’un moraliste vigoureux qui signale les dangers d’une parure excessive chez les hommes et les femmes ; une partie des développements est empruntée à saint Cyprien. L’ensemble de cette œuvre oratoire témoigne au moins du zèle d’Yves à instruire son peuple, sinon de ses qualités de prédicateur.

Quelques florilèges mss. du xiie siècle, notamment le ms. 425 de la Bibliothèque de Troyes et le ms. lit de la Bibliothèque d’Avranches, attribuent aussi à Yves diverses sentences, éditées par F. Bliemetzrieder, qui a comparé ces fragments avec des passages analogues en d’autres œuvres d’Yves. Le ms. du Vatican Rcginensis lut. 241 contient de semblables fragments, publiés par A. Wilmart, Une rédaction française des sentences dites d’Anselme de Laon, dans Rech. de ttiéol. anc. et médiév., xi, 1939, p. 119-144. Certaines de ces sentences concernent le mariage.

Signalons aussi un commentaire inédit d’Yves de Chartres sur les Psaumes, conservé dans plusieurs mss., d’après B. Smalley, dans English tiistorical Review, 1935, p. 680 sq. et dans Rech. de théol. anc. et médiév., ix, 1937, p. 365-400.

3° La Correspondance de l’évoque de Chartres est précieuse pour la connaissance de l’homme, de ses idées, de ses relations, des événements auxquels il a été mêlé, des cas de conscience qu’il a été amené à résoudre. C’est une source des plus utiles pour l’histoire soit ecclésiastique, soit profane de la fin du xie siècle et des commencements du xii* (P. L., clxii, col. 11-290).

Tel qu’il a été constitué par François Juret à la lin du xvie siècle, le recueil comporta 288 pièces, parmi lesquelles quelques-unes seulement sont d’autres personnages : Urbain II, Daimbcrt, archevêque de Sens, inspiré par Yves, Epi* !., ccxxxvi..Jossrran, archevêque de Lyon.

Ce recueil est a compléter pea d’autan lettrée, >i couvertes depuis lors. Il ne constitue d’ailleurs pas un icgistre exhaustif de la correspondant d’Yves, niais