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YVAN (ANTOINE) — YVES DE CHARTRES


tait point, écrit Cloyseault, de linge que son collet et son mouchoir, sa chemise était une haire de fer blanc, sa ceinture, une grosse chaîne de fer entrelacée de pointes. Son lit était la terre et des ais, et son chevet une poutre ou une pierre et quelquefois un livre. Il ne mangeait que du pain, des herbes et quelques mauvais fruits dont il se privait les mercredis, vendredis et samedis, se contentant de pain et d’eau ; outre cela, il faisait quatre carêmes l’année pendant lesquels il ne mangeait que de deux jours en deux jours. » Vies de quelques Pères, t. ii, p. 127.

Le vrai serviteur de Dieu. Éloge du R. P. Antoine Yvan, prêtre provençal, fondateur des religieuses de la Miséricorde, par le R. P. Léon, ex-provincial des Carmes réformés de Touraine et prédicateur ordinaire de Leurs Majestés, Paris, Pasdeloup, 1654 ; L’imitateur de Jésus-Christ ou la vie du vénérable P. Yvan, prêtre, instituteur de l’ordre des religieuses de N.-D. de Miséricorde… par maître Gilles Gondon, prêtre et docteur en théologie… Paris, Jean Boullard, 1662, in-4° de 600 p. ; La vie de ta V. Mère Marie-Madeleine de la Très Sainte Trinité, fondatrice de l’ordre de N.-D. de Miséricorde… par le P. Alexandre Piny…, Annecy, Jacques Clerc, 1679 ; La vie de la sœur Marie-Madeleine de la Trinité, fondatrice des religieuses de N.-D. de Miséricorde. .. par le R. P. Grozes, Lyon, 1695 ; L’histoire de la fondation du monastère de la Miséricorde de la ville d’Arles, par le R. P. Alexandre d’Arles, Alx, Jean Altbert, 1705 ; Cloyseault, Le P. Antoine Yvan, dans Vies de quelques Pères…, t. ii, Paris, 1882, p. 121 ; Ingold, Bibliographie et iconographie de l’ordre des religieuses augustines de Notre-Dame de Miséricorde, Paris, 1888 ; Buathier a fait paraître de 1889 à 1892, environ les deux tiers de la vie, dans le Bulletin mensuel de la Garde d’honneur du Sacré-Cœur de Jésus ; Batterel, Le P. Antoine Yvan, dans Mémoires domestiques, Paris, 1903, t. ii, p. 110 ; H. Bremond, La Provence mystique au XVII’siècle, Antoine Yvan et Madeleine Martin ; il cite plusieurs documents inédits, en particulier un manuscrit de l’Arsenal, Paris, 1908, in-8°.

A. Molien.


YVES DE CHARTRES (Saint). — I. Vie. — Yves, originaire du Beauvaisis, où Il naquit probablement vers 1040, avait été, à l’abbaye du Bec, l’élève de Lanfranc et le condisciple de saint Anselme, tous deux futurs archevêques de Cantorbéry, hommes de doctrine et de gouvernement, dont l’enseignement et l’amitié marquèrent de leur empreinte intellectuelle et morale le futur évêque de Chartres. Prévôt des chanoines réguliers de Saint-Quentin à Beauvais (cf. une lettre de Grégoire VII, en 1083 : Jaffé-Watt., 5261), il fut désigné par Urbain II, en 1090, aux suffrages du clergé de Chartres comme évêque de cette ville, où il mourut en 1116.

Son épiscopat est bien connu, grâce au recueil de ses lettres, P. L., t. clxii, col. 11-290, qui, telles qu’elles nous sont parvenues, se rapportent presque toutes à cette période de sa vie. Elles sont à compléter par d’autres sources épistolaires contemporaines : les lettres d’Urbain II, P. L., t. cli, de Pascal II, P. L., t. r.Lxiii, de Lambert d’Arras, P. L., t. clxti, d’Hugues de Die, P. L., t. clvii et de Geoffroy de Vendôme, P. L., t. clvii, dont nous connaissons dix-neuf lettres à l’adresse d’Yves. La personne et l’activité d’Yves apparaissent, à travers cette correspondance, avec un relief dont il n’appartient pas au présent article de dessiner tous les traits. Nous voudrions n’en retenir que les grandes lignes, en adoptant la chronologie donnée par A. Fliche, Le règne de Philippe / « , roi de France (1060-1108). Paris, 1912, et par A. Luchairc, Louis VI le Gros. Annales de sa vie et de son règne (1081-1137), Paris, 1890. La numérotation des lettres Correspond à celle de l’édition de Mignc, P. L., t. clxii.

Yves était à peine élu qu’il fut pris à partie par l’archevêque de Sens, Richer, qui, demeuré partisan de Geoflroy, le prédécesseur d’Yves, déposé par j t’rbaln II, refusait de reconnaître et de sacrer son

IiIC.T. DF. THF.OL. C.ATHOL.

nouveau sufïragant, sous prétexte que celui-ci avait reçu l’investiture de Philippe I er. Epist., vin. Ce refus détermina Yves à recourir à l’arbitrage du pape : il se rendit à Rome avec une députation du clergé de Chartres et reçut la consécration épiscopale d’Urbain II lui-même, qui écrivit, à cette occasion, une lettre datée de Capoue, le 25 novembre 1090, au clergé et au peuple de Chartres pour les féliciter de leur choix, P. L., t. cli, col. 325. Cet insigne témoignage, qui fortifiait singulièrement la position d’Yves, ne désarma pas l’archevêque de Sens : le nouvel évêque, une fois revenu d’Italie, fut sommé par Richer de comparaître devant un concile à Étampes. Epist., xii. Mais Yves en appela au pape et l’affaire n’eut pas d’autre suite.

Il ne devait pas toutefois jouir d’une longue liberté dans son diocèse : en 1092, Philippe I er ayant répudié sa femme, Berthe de Frise, pour vivre avec Bertrade de Montfort, femme de Foulque, comte d’Anjou, Yves blâma ce double adultère et s’abstint de paraître à Paris à la cérémonie nuptiale qu’osa célébrer un évêque complice, Ursion de Senlis, au mépris des lois de l’Église. Il écrivit au roi pour motiver son abstention, Epist., xv, et communiqua sa lettre à ses collègues de l’épiscopat. Sa courageuse protestation lui valut d’être emprisonné au château du Puiset, par Hugues, vicomte de Chartres, vassal du roi. Cette captivité, qui ne paraît avoir pris fin, après plusieurs mois, que sur l’intervention d’Urbain II, par l’entremise de Renaud, archevêque de Reims, n’ébranla d’ailleurs pas la fermeté de l’évêque de Chartres. En 1094, après la mort de Berthe, un concile d’évêques courtisans du domaine royal ayant été convoqué à Reims, à la demande du monarque, pour ratifier son union avec Bertrade, Yves, qui avait accompli, en novembre 1093, un deuxième voyage à Rome, refusa d’y participer. Epist., xxxv. En vain s’efîorça-t-il de vaincre les tergiversations obstinées du roi, qui espérait avoir gain de cause ou du moins faire ajourner la sentence ; d’abord excommunié en octobre 1094, lors d’un concile réuni à Autun par le légat Hugues de Die, archevêque de Lyon, Philippe, longtemps ménagé par Urbain II, fut excommunié par le pontife lui-même, en novembre 1095, au concile de Clermont, et l’anathème fut renouvelé par les évêques du concile, quelque peu mouvementé, de Poitiers, en 1100.

Yves prit part à ces divers conciles qui firent écho à sa fermeté, mais ne perdait pas de vue l’amendement des coupables. Dès l’année 1096, il rejoignit Urbain II à Montpellier, avant le retour de celui-ci à Rome, et négocia sans doute, la première absolution donnée au roi — dont le repentir ne fut qu’un simulacre sans lendemain — lors du concile de Nîmes, en juillet de la même année. Ses efforts furent plus heureux lors du concile de Reaugency, le 30 juillet 1104, où Philippe et Bertrade vinrent enfin à résipiscence, Epist., cxliv ; concile bientôt suivi de celui de Paris, le 1° décembre 1 104, où l’Église leur accorda solennellement son pardon. Cette réconciliation, dont Yves ne fut pas le moindre artisan, scella le rapprochement de la monarchie capétienne et du Saint-Siège, auquel l’évêque de Chartres ne cessa de s’employer patiemment dans la suite.

Mais, en matière de politique religieuse, celui-ci professait une doctrine de compromis — dont nous ferons plus loin l’exposé — qui fut nettement désavouée, non sans amertume pour Yves. lïpist.. lxvii, par Urbain II, comme contraire aux décrets de (ire goirc VIL En 1097, il fut même en désaccord à ce sujet avec le légat Hugues de Lyon. Epist., i.x. qui s’opposait en effet au sacre par l’évêque de Chartres, premier suffr.igant de Sens, du successeur de Richer, Dalmbert ; celui cl, accusé d’nvoir reçu du roi l’tnVM

T. — XV.

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