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WYCLIF. LES AUTRES SACREMENTS


Sermons, éd. Loserth, t. il, p. 454, 460. Or, pour lui, cela était absurde. Que disait-il donc ? « Le genre « substance », dit-il dans son De blasphemia, de mars 1382, se trouve partout où se trouve un individu du genre. Or, dans l’eucharistie, il y a un individu du genre « substance », puisque, selon votre propre affirmation, le corps du Christ est présent corporellement. Donc, le corps du Christ demeure dans l’hostie et comme c’est une substance — parce qu’il est l’essence de toute substance matérielle — il est également la substance du pain. Il s’ensuit que la substance du pain matériel demeure dans le pain consacré. » Comprenne qui pourrai — Depuis le temps de la publication de son De potestate papse, en 1379, Wyclif ne cessa plus de soutenir qu’il ne peut y avoir d’accidents ou de groupe d’accidents sans sujet. Il avait pensé pourtant antérieurement qu’il pouvait y avoir « un corps mathématique », analogue à la quantité thomiste, qui servirait de sujet aux accidents. Même dans son De dominio civili (1376), il avait dit encore : « Le prêtre, par les paroles de la consécration, rend le corps du Christ présent sous les accidents. » Mais dans son De eucharistia, il déclare : « Bien que j’aie pris autrefois toutes les peines possibles pour expliquer la transsubstantiation, en accord avec le sentiment de l’Église primitive, je vois maintenant que l’Église actuelle contredit l’Église des temps antérieurs et qu’elle erre dans la doctrine. » De eucharistia, p. 52, 109. À l’entendre, le dogme de la transsubstantiation ne remonterait qu’au temps d’Innocent III. Il n’aurait donc pas deux cents ans d’existence. Il est toutefois embarrassé dans son langage et voudrait que l’on évitât de préciser la manière dont Jésus-Christ est présent, la seule chose importante à ses yeux étant qu’il soit présent et qu’on le reçoive dans la communion avec foi et amour. Mais, ses adversaires nominalistes ne lui laissant aucun répit, il finit par aboutir à cette « consubstantiation » que devait soutenir plus tard Luther. Le pain reste du pain, tout en contenant « toute l’humanité du Christ ». En quoi cela peut-il surprendre ? dit-il. Un pécheur qui se convertit en un saint reste un homme. La glace qui fond reste de l’eau. Un pape qui vient d’être élu reste ce qu’il était auparavant. De même le pain reste pain. « Le Christ est caché dans les éléments », insensibililer absconsus est. De eucharistia, p. 15, 29. Nous pouvons le « voir » là, « par la foi », et nous pouvons le recevoir comme le feu du soleil est reçu à travers une sphère de cristal. Le Christ est dans chaque partie de l’hostie, comme le visage est tout entier dans chaque partie du miroir brisé, ou « comme un homme peut allumer beaucoup de cierges à un seul cierge sans lui enlever sa clarté ». Sermons, t. ii, p. 458 ; t. iv, p. 351-352.

Il compare encore la présence du Christ dans l’eucharistie et l’action des paroles consécratoires à une feuille de papier sur laquelle on écrit un message. Le message est réellement présent, avec le papier et l’encre. De même, « à l’occasion » des paroles de la consécration — à l’occasion seulement, précise-t-il — le corps du Christ devient présent dans le pain et le vin. Et il ajoute : « La vérité et la foi de l’Église c’est que le Christ est à la fois Dieu et homme, de même le Sacrement (de l’autel) est à la fois le corps du Christ et du pain — pain et vin naturellement, Corps et Sang du Christ sacramentellement. » De aposlasia, p. 103, 106, 116, 119. C’est donc un renouvellement du mystère de l’incarnation : deux substances en une seule personne. On croirait, à lire ce passage, que Wyclif admet l’impanation comme plus tard Osiander, c’est-à-dire l’union hypostatique entre le Christ et le pain consacré. Mais il n’en est rien. Il dit expressément que le pain ne fait pas partie du Christ : « L’hostie consacrée, écrit-il, n’est ni le Christ ni une partie

du Christ, mais seulement le signe effectif du Christ. »

— « Je n’ose dire que c’est le signe du Christ identiquement selon sa substance et sa nature, mais figurativement ou spirituellement. » Il n’en est pas moins vrai que le corps du Christ est là « réellement et vraiment, selon son humanité tout entière ». Le sacrement est « le signe et le vêtement de son corps ». De eucharistia, p. 16, 121, 303. Il repousse donc également les « hérétiques » qui « pensent et disent que ce sacrement est le Corps de Dieu mais pas du pain » et les « hérétiques qui pensent et disent que ce sacrement ne peut en aucune manière être le Corps de Dieu », car, pour lui, « il est les deux à la fois », bien que » principalement » il soit « le Corps de Dieu en forme de pain », d’un pain dans lequel « tout le Christ » est présent. Il ne peut assez protester contre l’idée d’annihilation de la substance et il n’a pas assez de sarcasmes contre ces « accidents » qui seraient ainsi en suspens, dépourvus de tout support, « un pur fantôme », dit-il. L’idée d’annihilation lui apparaît comme une fourberie abominable du démon et, en toute vérité, « l’abomination de la désolation » dans le sanctuaire divin. Supposer que la substance peut cesser d’être c’est admettre que Dieu peut cesser d’exister, puisque Dieu est la base de toute créature. De apostasia, p. 120.

Il lui arrive cependant d’employer des expressions malheureuses, comme quand il écrit : « Le corps du Christ est dans le sacrement de l’autel, non par voie de multiplication, mais seulement virtuellement, comme un roi est dans toutes les parties de son royaume. » Ce fut sans doute à partir d’une phrase de ce genre que ses disciples aboutirent à une sorte de zwinglianisme, selon lequel l’eucharistie n’était plus qu’un « signe » de la présence divine, ou encore de calvinisme, suivant lequel la présence eucharistique est purement virtuelle.

Voici les propositions retenues au concile de Constance, comme représentatives de la doctrine de Wyclif sur l’eucharistie : Subslantia panis materialis et similiter substantia vint materialis rémanent in sacramento altaris. N. 1. — Accidentia panis non manent sine subjecto in eodem sacramento. N. 2. — Christus non est in eodem sacramento identice et realiter propria prsesentia corporali. N. 3. Sur cette dernière proposition, il convient de se rappeler ce qui vient d’être dit des impropriétés de langage de Wyclif, quand il dit que Jésus-Christ est présent dans toutes les hosties, comme un roi dans tout son royaume. Nous ne voyons pas où Wyclif a pu dire : Non est fundatum in Evangelio, quod Christus missam ordinaverit. N. 5. Il est possible que le sens ait été que la messe n’avait pas été instituée, telle quelle, par le Christ. On ne voit pas en effet que Wyclif ait nié le caractère sacrificiel de la messe, ni son institution par le Christ, si on la ramène essentiellement à la consécration et à la communion. Wyclif n’a jamais nié ni l’une ni l’autre.

Les autres sacrements.

Wyclif n’a pas porté

atteinte au dogme du septénaire sacramentel. Il n’a pas eu de doctrine comparable à celle de Luther, de Zwingli et de Calvin sur ce point. Il a cependant touché à certains sacrements, pour émettre des opinions que l’Église a rejetées et condamnées.

Le sacrement de pénitence. — C’est surtout dans le domaine de la pénitence que s’est exercée sa critique contre la législation en vigueur et contre la doctrine reçue. « Les clés de Pierre, disait-il, devraient être fourbies et nettoyées de la rouille de l’hérésie. » Là aussi, il rencontrait, disait-il, « les erreurs de l’Antéchrist ». De blasphemia, p. 160-161. Lui-même cependant passa, dans ce domaine comme dans celui de l’eucharistie, par des opinions diverses. S’élevant