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    1. TRINITÉ##


TRINITÉ. SAINT BONAVENTURE

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Fils et, n’étant pas selon la nature, ne peut être dite génération. Ibid., q. xlvi, memb. 7. D’où il suit encore que, de même que « l’amour procède par le moyen de l’idée », de même « le Saint-Esprit ne peut procéder du Père que par le moyen du Fils ». Ainsi s’établit logiquement la procession a Pâtre F Moque. Ibid., q. xlvi, memb. 5. Dans cette conception, il serait inexact de dire que le Saint-Esprit est l’amour commun du Père et du Fils ; cet amour mutuel est un principe dont le terme est la « condilection » du Saint-Esprit par le Père et le Fils ; et ainsi s’explique que la troisième personne procède des deux autres par une seule procession.

En résumé, pour Alexandre, c’est la bonté qui est au principe des processions divines, en raison de la diffusion qui lui est naturelle. Ibid., q. xvi, memb. 3 ; cf. memb. 8.

Puisque le Saint-Esprit procède par voie d’amour et non par nature selon l’intelligence, s’ensuit-il qu’il soit moins semblable au Père que le Fils ? Richard avait paru l’admettre. Cf. De Trinitate, t. VI, c. xi, xviii sq., P. L., t. exevi, col. 975, 982-985. Alexandre opine également en ce sens, tout en admettant la parfaite identité de nature et de perfection des personnes divines. Ibid., q. lxi, memb. 3, a. 2. Cf. Chr. Pesch, op. cit., ii. 586.

2. Saint Bonaventure († 1274). —

Saint Bonaventure continue Alexandre de Halès dont il avait été l’auditeur vers 1244. Le problème trinitaire a retenu son attention à plusieurs reprises : In IV libros Sentent., t. I, dist. VIII-XXXIV, éd. de Quaracchi, t. i ; Queestiones disputatæ : de mysterio Trinilatis, t. v, p. 44-115 ; Breviloquium, part. I », ibid., p. 199 sq. ; Itinerarium mentis ad Deum, c. vi. ibid., 293 sq. La Queestio disputata débute par la démonstration de ces deux propositions : Deum esse, esse verum indubitabile ; Deum esse trinum, esse verum credibile. Elle continue par l’exposé de sept attributs divins dont on montre quod possunt stare cum Trinitate. Enfin, saint Bonaventure a un sermon pour la fête de la Trinité, à l’octave de la Pentecôte. Ibid., t. ix. Dans l’exposé qui suit, on s’en tiendra surtout au commentaire.

a) Processions ; relations.

Saint Bonaventure suit le plan de Pierre Lombard ; il en accepte le point de vue initial qui est celui des Latins : considération de l’essence divine, d’abord, des personnes, ensuite ; il s’en tient à la définition de la personne donnée par Boèce. In I am Sent., dist. XXV, a. 1, q. il. Mais, disciple de Richard et d’Alexandre, il ne considère la nature que comme subsistante et la personne en Dieu n’a pas d’autre raison d’être que son origine. Ibid., dist. XIX, part. II, a. 1, q. ii. La nature est « possédée » ; le « possesseur » en est la personne : « Ainsi, parce qu’il n’y a qu’une seule et identique nature « possédée », nous devons dire qu’il n’y a qu’une seule essence ou substance ; mais parce qu’il y a plusieurs « possesseurs », il v a plusieurs personnes. » Ibid., dist. XXIII, a. 2. q." ii.

Pour l’école dyonisienne, à laquelle Bonaventure se rattache, Dieu est bien l’acte pur, mais un acte dont la plénitude de bonté ne demande qu’à s’épancher. La métaphysique de saint Bonaventure est dynamique ; elle explique sa conception de la Trinité. Tout en accueillant la théorie augustinienne de l’image de la Trinité dans l’âme humaine, le Docteur séraphique ne prend pas ce fait psychologique comme base de sa doctrine des processions ; il s’en sert uniquement comme d’un exemple et d’une confirmation. C’est le concept de « primauté » qui prend le pas sur celui de « bonté » et qui, en dernière analyse, explique la fécondité divine : « Pour démontrer la pluralité des personnes divines, il faut présupposer en Dieu quatre choses : premièrement, qu’il y a en lui suprême béatitude ; deuxièmement, souveraine perfection ; troisièmement, suprême simplicité ; quatrièmement, suprême primauté… En vertu de la simplicité, l’essence est incommunicable et ne peut exister en plusieurs. En vertu de la primauté, la personne est apte à en produire une autre et j’appelle ici primauté « l’innascibilité », en vertu de laquelle, comme l’enseigne une antique opinion, il y a dans le Père une plénitude de source pour toute émanation, fontalis plenitudo… En vertu de la perfection, cette personne est apte à produire. En vertu de la béatitude et de la charité, elle en a la volonté. » Ibid., dist. II, q. ii. Puis, reprenant une thèse de Richard, Bonaventure déclare qu’ « il n’existe que deux manières de produire… ou par mode de nature, ou par mode de volonté… Donc une personne divine produit suivant ces deux modes et uniquement suivant ces modes ». Ibid., q. iv. Cf. Breviloquium, t. I, c. iii. Nature féconde, volonté féconde, tels sont les principes formels des deux processions ; mais nature possédée par la personne et volonté personnelle. Ibid., dist. XIX, part. I, a. 1, q. ii, ad 3°" » ; dist. XIII. a. 1, q. iii. Par là, le producteur fécond et les termes produits par la fécondité s’opposent et se distinguent par voie d’origine et constituent des personnes, principia quæ. Les différences des deux sortes de fécondité proviennent des différences entre les principes quo, c’est-à-dire entre les puissances opératives, nature et volonté. Et, puisque la génération est une émanation par manière de parfaite assimilation, elle provient d’un seul ; puisque la spiration est une émanation par manière de connexion, elle provient de deux. Cf. In I am Sent, dist. XIIIs a. 1, q. iii.

b) La personne du Père.

Entre « personnes » et « relations », il y a identité réelle et simple distinction de raison. Voir Relations divines, t. xiii, col. 2151. Tout en maintenant l’identité réelle des personnes, des relations, des propriétés personnelles, voir Notions, t. xi, col. 803-804, saint Bonaventure admet, comme avant lui Alexandre de Halès, que les relations ne sont pas constitutives, mais simplement caractéristiques des personnes distinctes en raison de leurs propriétés d’origine. Dist. XXVI, a. 1, q. ni. C’est peut-être ce qui l’a fait accuser, mais à tort, d’avoir, touchant l’élément constitutif des personnes divines, renouvelé la thèse de Grossetête. Cf. A. Stohr, Die Trinitâtslehre des hl. Bonaventura, Munster-en-W., 1923, p. 114124 ; Schmaus, op. cit., p. 448-452. La personne, selon la conception issue de Richard de Saint-Victor, est l’hypostase caractérisée par une propriété impliquant une dignité d’être. Les propriétés personnelles apportent aux hypostases divines cette dignité qui constitue la personne ; mais, si l’on fait abstraction de ces propriétés caractéristiques, on doit encore concevoir les hypostases divines comme déjà constituées dans leur individualité en raison de leur origine : Qui non ab alio et a quo alius — qui ab alio et a quo alius — qui ab alio et a quo non alius. Voir Richard de Saint-Victor, t. xiii, col. 2687-2688.

En adoptant ce point de vue, saint Bonaventure montre la personne du Père constituée hypostase par cela seul qu’elle est principe ne procédant d’aucune autre hypostase. Hypostase, elle peut être le principe d’un acte générateur et c’est en vertu de cet acte générateur qu’elle est Père : Ideo Pater quia gênerai, avait déjà dit Pierre Lombard, dist. XXVI, initié. Saint Thomas, admettant que les propriétés constituent les personnes, dira au contraire : Générât, quia Pater. Sum. theol., I », q. xl, a. 4, ad 1 UB. Saint Bonaventure est donc ici en désaccord avec le Docteur angélique. Rien d’étonnant. Saint Thomas, intégralement fidèle à la conception latine qui voit en Dieu d’abord l’unité de substance, en laquelle seule l’opposition des relations peut apporter la distinction des