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WITZEL (GEORGES)

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II. Écrits et idées.

Il est à peu près impossible de dresser une liste de ses écrits. Ràss, Die Konvertilen seit der Reformation, t. i, p. 146 sq., en compte 93, et sa liste est pourtant incomplète. Nous ne pouvons que donner ici un aperçu de l’activité littéraire de Witzel, en groupant ses principaux écrits et en essayant de caractériser ses idées aux différentes étapes de sa vie.

Encore rallié au luthéranisme, il publie Querela Evangelii, 1524, et Oratio in veterem Adam, 1525, réimprimés dans la Retectio lulherismi, 1538, où se manifestent pour la première fois ses regrets sur la faillite morale partielle de l’évangélisme : la Réforme est loin d’avoir tenu ses promesses. S’il est bien des « évangélistes » dont la vie et la doctrine font honneur au mouvement, il en est trop encore dont les actes ne sont pas d’accord avec les déclarations : carnem in multis principatum tenere eximie Evangelistis apud vulgus, indicant fructus ejus.

Quand il a rompu avec les chefs du mouvement, il multiplie les attaques contre les doctrines spécifiquement luthériennes et surtout contre la théorie de la justification et les conséquences amorales que celle-ci entraîne. Cela l’engage en des querelles littéraires trop personnelles pour être rapportées ici. Plus importantes sont les œuvres doctrinales, où il essaie d’établir le bien-fondé de la foi catholique : De libero arbilrio, imprimé seulement en 1548 ; Pro defensione bonorum operum adversus novos Evangelistas, auctore Agricola Phago, 1532 ; Ein unùberwindlicher, grùndlicher Bericht was die Rechlfertigung in Paulosei, 1533 ; Verklàrung des 9. Artikels unsers heiligen Glaubens, 1533 ; Von Buse, Beichte und Bann, 1534 ; Von Beten, Fasten und Almosen, 1535 ; Von der heiligen Eucharistie, 1534 ; Von den Toten und ihrem Begràbniss, 1536. La Retectio lutherismi, 1532, imprimée en 1538, et V Evangelion M. Luthers, 1533, sont encore dans la note très polémique ; comme aussi la Conquestio de calamiloso rerum christianarum statu, 1538.

Mais à la même époque de sa vie il fait paraître une sorte de manifeste où s’expriment au mieux ses idées essentielles : il voudrait surtout montrer qu’en dépouillant l’esprit sectaire les animateurs du mouvement réformiste pourraient obtenir l’audience de l’Église et réaliser les améliorations qu’ils réclament à juste titre dans les pratiques et les doctrines mêmes de l’Église. Le livre, intitulé Methodus concordiæ ecclesiasticse, écrit en 1532, imprimé seulement en 1537, est l’expression du réformisme catholique, qui séduisit en ce moment bon nombre d’esprits soit en Allemagne, soit en France. Voici comment l’analyse G. Kaverau : « Il est dédié à tous les détenteurs du pouvoir : pape, empereur, évêques, princes. Il demande avant tout, pour éviter une décision sanglante par les armes, la réunion d’un concile, dans lequel les deux parties s’expliqueraient librement. Le terrain d’entente serait constitué par l’enseignement des apôtres, tel qu’il ressort de la sainte Écriture et des anciens Pères ; on renoncerait aux dogmes scolastiques. En toutes les questions nécessaires au salut des âmes, l’Écriture suffit, mais il faut à côté d’elle reconnaître le droit pour l’Église de donner des décisions valables. Les conjonctures exigent impérieusement une traduction allemande de la Bible ; ce ne doit pas être d’ailleurs l’œuvre d’un particulier, mais le résultat du travail d’une commission de savants ; elle serait munie du visa ecclésiastique. Il faut absolument relever le niveau de la prédication : que les luthériens renoncent aux Postules de Luther, les catholiques aux prédications farcies de légendes mensongères ; que l’on publie des sermons-types, sans excitations, des histoires de saints sans mensonges II faut aussi un catéchisme non point luthérien, mais apostolique ; à la fin de

l’instruction catéchistique une confirmation, où les enfants renouvelleront solennellement et tous ensemble les promesses faites au baptême par leurs parrains et marraines. La messe semblablement a besoin de réformes : plus d’honoraires de messe 1 moins de messes, mais qui soient célébrées sérieusement et pieusement 1 Le canon de la messe est admissible, si on l’interprète bien, mais que l’on renonce à l’absurde habitude de le murmurer à toute allure, sans dévotion et sans fruit. Le concile doit rétablir la communion sous les deux espèces, mais les évangélistes doivent eux aussi reconnaître qu’ils n’ont pas bien agi en déchirant pour cette question l’unité de l’Église. Il est tout indiqué que la communauté prenne part à la messe en communiant. Que dans la confession, on laisse de côté les questions indiscrètes et la torture des consciences ; l’aveu a surtout pour but de permettre au pasteur de savoir ce que sont ses brebis, de savoir ce qu’elles croient et comment elles vivent. Mais il faut aussi reconnaître que le scandaleux abus du confessionnal pour le commerce des indulgences est responsable des origines du luthéranisme. L’excommunication peut demeurer comme exclusion des scandaleux de la sainte table. L’imposition de certaines satisfactions en confession a, dans la pratique, de bons résultats. En ce qui concerne le mariage, les catholiques doivent céder quelque chose sur la question des empêchements, les luthériens sur celle du divorce. Que le concile concède, comme un moindre mal, aux ecclésiastiques le mariage avec une personne vierge ; cela vaut mieux que les concubinages clandestins qui sont tolérés aujourd’hui par les évêques. Il est de notoriété certaine que le célibat amène scelestissima cleri stupra. L’extrême-onction est consacrée par son âge, il faut seulement la traiter avec plus de respect. Le sacrement de l’ordre demande à être purifié d’abus invraisemblables ; c’est par là seulement que l’on pourra regagner les luthériens à cette institution si bienfaisante. Les règlements relatifs au jeûne sont salutaires, mais il faut en écarter les superstitions qui s’y rattachent, encourager ceux qui dépassent librement sur ce point les prescriptions de l’Église. De l’invocation des saints il ne faudrait pas faire un article de foi, mais on ne doit pas non plus la décrier comme une impiété. Il faut condamner la superstition barbare des prières magiques et écarter les prières auxquelles sont attachées, croit-on, des grâces spéciales. Le latin peut demeurer comme langue liturgique, mais à condition que les textes soient fréquemment expliqués au peuple. Le cantique populaire en allemand peut être très salutaire. Les visites canoniques sont indispensables pour l’amélioration des ecclésiastiques. Le nombre des couvents doit être considérablement réduit ; ceux qu’on laissera subsister ont besoin de réformes profondes. L’écrit se ferme sur un appel au cardinal Albert, archevêque de Mayence, en faveur de la convocation d’un concile. » On pourrait rapprocher de l’écrit précédent Drei Gesprechbùchlein von den Religionsachen, 1539, dialogue où Witzel, qui se dénomme Orthodoxus, cherche à tenir la balance égale entre le « papiste » Ausonius et le « prédicant évangéliste » Coré. De la même date, de la même inspiration, un petit traité : Ein gemein christlich Lere in Artikeln, paru sans nom d’auteur.et que l’on a aussi attribué à Pflug. C’est un manifeste adressé à Jean-Frédéric de Saxe, au moment où celui-ci allait introduire la Réforme en ses États. Au lieu des innovations de Wittenberg, on y préconise un réformisme catholique.

Les écrits ultérieurs reprendront sous des formes variées les divers articles de ce programme. Le Typus Ecclesiæ prioris, 1540, paru avec des compléments en 1559, prêche le retour aux idées et aux pratiques