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TRANSSUBSTANTIATION


documents pontificaux et conciliaires. — Au xiie siècle le mot devient courant. Transsubslantiare figure dans la lettre d’Innocent III à Jean de Belesmes (1202). Col. 1292 ; Denz.-Bannw., n. 416. Transsubstantialis pane et vino se lit dans le décret Firmiter du IVe concile du Latran (1215). Voir ici 1. 1, col. 684 ; Denz.-Bannw., n. 430. Panis vere transsubsianliatur in corpus et vinum in sanguinem est un article de la profession de foi de Michel Paléologue au IIe concile de Lyon. Voir ici t. ix, col. 1386 ; Denz.-Bannw., n. 465. Benoît XII (1341) reproche aux Arméniens de ne pas admettre qu’après les paroles consécratoires sit facta transsubstantiatio panis et vini in verum corpus Christi et sanguinem. Voir t. ii, col. 698 ; Denz.-Bannw., n. 544. Les trois premières propositions (I re série) de Wicleff, condamnées au concile de Constance, nient équivalemment la transsubstantiation. Voir Eucharistie, t. v, col. 1321 ; Denz.-Bannw., n. 581-583. Cf. la 16e interrogation posée aux wicleffltes et aux hussites. Ibid., n. 666. Le décret Pro Armenis contient l’exposé catholique du dogme. Voir Eucharistie, col. 13241325 ; Denz.-Bannw., n. 698. La transsubstantiation est encore affirmée à la fin du décret Pro jacobitis, Eucharistie, col. 1326 ; Denz.-Bannw., n. 715. La foi en la transsubstantiation prend désormais place dans les professions imposées aux Orientaux. Cf. Denz.-Bannw. , n. 1469.

3. Les erreurs protestantes et la définition tridentine.

— Les erreurs protestantes sur la transsubstantiation sont exposées à Eucharistie, col. 1347-1350, et le dogme défini au concile de Trente dans la xiiie session, c. iv et can. 2 (Denz.-Bannw., n. 877, 884), col. 1346, 1350. La profession de foi tridentine réunit en un seul paragraphe la croyance au sacrifice de la messe, à la présence réelle et à la transsubstantiation. Denz.-Bannw. , n. 997.

4. Erreurs récentes et interventions nouvelles du magistère. — En 1794, dans la bulle Auctorem fidei, Pie VI déclare non conforme à l’exposé de la vérité catholique sur la transsubstantiation la doctrine du synode janséniste de Pistoie, prop. 29. Denz.-Bannw., n. 1529. Voir ici Eucharistie, col. 1361, et Pistoie, t.xii, col. 2210.

Plus proche de nous, en 1875, le Saint-Office a repoussé l’explication proposée par Bayma : la nature (non la substance) du pain demeure soutenue par le Christ d’une manière surnaturelle. Denz.-Bannw., n. 1843-1846 ; cf. Eucharistie, col. 1365. En 1887, le Saint-Office réprouve pareillement l’explication proposée par Rosmini, prop. 30-31. Denz.-Bannw., n. 1920-1921 ; cf. Eucharistie, col. 1366 ; Rosmini, t. xiii, col. 2943-2944. Enfin sur la position d’Edouard Le Roy, on se reportera à Eucharistie, col. 13631364.

IV. Controverses théologiques.

Elles ont été sommairement indiquées à Eucharistie, en vue d’un exposé ultérieur plus complet, col. 1364-1365. Pour comprendre ces controverses, il faut ramener le problème de la présence réelle à ses données essentielles. Cette présence ne doit s’expliquer ni par la consubstantiation, ni par l’impanation ; ces deux hypothèses ayant été réprouvées par l’Église. Une création du corps du Christ sous les espèces consacrées est inconcevable : si le corps eucharistie est le corps véritable du Christ, il ne saurait être créé, puisqu’il existe déjà, et, s’il était créé, il ne serait plus le vrai corps du Christ. On ne saurait non plus imaginer un déplacement local du corps du Christ venant du ciel sur l’autel et cela pour de multiples raisons dont la principale est précisément l’objection de Zwingle contre laprésence réelle : le corps du Christ ne peut être localement situé à deux endroits simultanément, a fortiori, en de multiples endroits en raison de la multiplicité des espèces consa crées. La conversion substantielle du pain au corps du Christ et la permanence des accidents du pain permettent seules de résoudre’es difficultés. Voir Eucharistie, col. 1311-1313. En sorte que les éléments de la transsubstantiation qui réalise la présence réelle se réduisent à ceci : changement d’une substance en une autre substance, changement qui laisse subsister les apparences primitives. Or, ce changement implique la succession de deux choses dont l’une, terminus ad quem, prend la place de l’autre, terminus a quo ; il implique également un lien nécessaire entre les deux. Quelle que soit l’opinion que l’on adopte, il faut, si l’on veut tenter du mystère une explication poussée aussi loin que possible, rendre raison de la disparition de la substance du pain en vue de l’apparition de la substance du corps du Jésus-Christ. C’est ce à quoi se sont appliquées les diverses écoles théologiques.

1° Première controverse : la disparition du « terminus a quo ». — C’est la vieille controverse entre thomistes et scotistes, à laquelle on a fait allusion à plusieurs reprises. Voir Eucharistie, col. 1310 et 1362.

Tandis que saint Thomas affirme que « la substance du pain est, non pas anéantie, mais convertie au corps de Jésus-Christ », Sum. theol., III », q. lxxv, a. 3, Scot est resté hésitant entre l’annihilation de la substance du pain et sa conversion et il semble bien qu’il se soit prononcé pour la conversion. In IV um Sent., dist. X, q. i ; dist. XI, q. iii, n. 23, 24 ; q. iv. Voir sur la pensée de Scot, Piccirelli, Disquisitio… de catholico intellectu dogmatis iranssubstantiationis, Naples, 1912, p. 54, et ici t. iv, col. 1916-1918. Les disciples de Scot et surtout les nominalistes envisagent plutôt l’annihilation du pain. Occam, In I’am Sent., dist. XI, q. vi, dub. 7 ; G. Biel, ibid., q. i, G H. De nombreux disciples de saint Thomas n’hésitent pas à parler de la disparition, desitio, du pain ; cf. Lessius, De perf. div., t. XII, c. xvi, n. 109 ou même simplement d’annihilation ; cf. Chr. Pesch, Prsel. dogm., De eucharistia, n. 686, 1. Voir aussi L. Lercher, Inst. theol. dogm., Inspruck, 1930, t. iv, n. 346 ; cf. Puig de la Bellacasa, De transsubstantiatione sec. S. Thomam, Barcelone, 1926, n. 8 ; Cachia, O. P., De natura transsubst. juxta S. Thomam et Scotum, Rome, 1929, p. 12-18, 42-46.

Saint Thomas lui-même enseigne que la substance du pain et la substance du vin ne demeurent pas après la consécration, III », q. lxxv, a. 2 ; il est donc légitime de parler de disparition et même, en un certain sens, de destruction de la substance du pain et du vin. Ce n’est pas pour autant accepter leur annihilation, et personne ne l’accepte purement et simplement. Car l’annihilation implique que rien n’est substitué à la substance disparue. Si le pain et le vin sont détruits et disparaissent, c’est pour faire place au corps du Christ ; et c’est ce rapport intime de la disparition d’une substance en vue de l’apparition d’une autre substance qui doit justifier l’idée dogmatique de conversion.

2° Deuxième controverse : l’apparition du « terminus ad quem ». — La presque totalité des maîtres de la scolastique du xiiie siècle, en rejetant d’une manière expresse toute annihilation de la substance du pain, ne voient à la présence eucharistique d’autre explication que la conversion de toute la substance du pain en la substance du corps préexistant du Christ, conversion qui n’ajoute rien au Christ et ne lui apporte qu’une modification tout extrinsèque, la présence sous les espèces sacramentelles. Voir les textes d’Alexandre de Halès, de saint Bonaventure, de saint Albert le Grand, Liber de sacr. euch., dist. VI, tr. II, c. i, n. 10 ; tr. III, c. i, n. 5, de saint Thomas, de Richard de Médiavilla, à Eucharistie, col. 1306-1308. Reprise par Gilles de Rome, De corpore Christi, theorema i, et par Capreolus, In IV" 1 * Sent., dist. XI, q. ii, cette théorie reçoit une