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    1. TRADITION##


TRADITION. PÈRES LATINS

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La première manifestation du magistère ordinaire est la transmission orale du résumé de la foi chrétienne, de la « règle de la foi », constituée par le symbole. Serm., lix, n. 1 ; ccxjii, n. 1 ; ccxv, n. 1, t. xxxviii, col. 400, 1060, 1072. Cf. De symbolo, n. 1, t. xl, col. 627. Le symbole a été rédigé pour permettre de retenir de mémoire et en peu de mots tout ce qu’il importe au chrétien de croire pour faire son salut ; aussi doit-il, non être écrit, mais appris de mémoire. Serm., ccxii, n. 2 ; ccxiv, n. 1, t. xxxviii, col. 1060, 1066 ; cf. De symbolo, n. 1, t. xl, col. 627. Voir ici t. i, col. 2340-2341.

Le magistère de l’Église se manifeste encore par la croyance universelle telle qu’Augustin l’a définie dans les quatre règles précédentes. Il est à remarquer cependant que l’argument des Pères n’est absolument convaincant que s’il y a unanimité morale des docteurs, soit que la foi s’affirme par tous sans exception, soit que l’un d’eux ou quelques-uns jouissent d’une autorité telle qu’ils représentent tous les autres. Mais quelquefois les assertions quelque peu ambiguës d’un auteur ont besoin d’explication : c’est le cas de saint Jean Ghrysostome dans l’homélie ad neophylos. Voir S. Augustin, Cont. Julianum, t. I, n. 21 sq., t. xliv, col. 654 sq. Voir ici t. viii, col. 676-677. Enfin, en certaines matières, il est possible qu’un Père, pris individuellement, puisse faire erreur ; son erreur s’explique par le manque d’étude approfondie de la question, elle est corrigée par la doctrine et l’enseignement des autres. Ce fut le cas de Cyprien dans la question du baptême des hérétiques. De bapt., t. II, n. 12, t. xliii, col. 133.

De quelque façon qu’elle se présente, l’autorité vivante de l’Église catholique demeure la norme de l’Écriture à interpréter et de la tradition à recevoir. De doctr. christ., t. III, n. 2, t. xxxiv, col. 65. C’est cette autorité qui nous garantit la véracité des Écritures : Ego vero Evangelio non crederem, nisi me catholicæ commoverel auetoritas. Contra epist. Manichsei, n. 6, t. xlii, col. 176 ; cf. De doctr. christ., t. II, n. 12, t. xxxiv, col. 40 ; Cont. Fauslum manichseum, t. XXII, c. Lxxixetl. XXVIII, c. ii, ibid., col. 452, 485, et il n’est permis à personne de transgresser les limites de cette foi catholique. De Gen. ad litt. lib. imperf., n. 1, t. xxxiv, col. 221.

Quant au magistère que nous appelons aujourd’hui extraordinaire, Augustin le reconnaît en affirmant que les conciles tranchent, par leur autorité souveraine, toutes les controverses. Epist., liv, n. 1, t. xxxiii, col. 200 ; cf. De bapt., t. II, n. 5, t. xliii, col. 129.

L’autorité du Siège romain dépasse toutes ces autorités. C’est à ce siège qu’il appartient de terminer les controverses : Duo concilia missa sunt ad Sedem apostolicam. .. causa finita est. Serm., cxxxi, n. 10, t. xxxviii, col. 734 ; cf. Cont. duas epist. Pelag., t. II, n. 5, t. xliv, col. 574. Voir ci-dessus : deuxième principe.

Enfin, dans le développement de la tradition chrétienne par le magistère de l’Église, Augustin a posé le principe d’un progrès dogmatique et théologique : « Beaucoup de points appartenant à la foi catholique sont remués par l’agitation passionnée des hérétiques. Pour pouvoir les défendre, il faut les considérer avec plus de soin, les comprendre avec plus de lucidité, les prêcher avec plus d’instance. Ainsi la question posée par l’adversaire nous oblige à une étude plus approfondie. » De civ. Dei, t. XVI, c. ii, n. 1, t. xli, col. 1765. On pourra rapprocher d’autres textes : De vera religione, c. viii, n. 15 ; xxv, n. 47, t. xxxiv, col. 129, 142 ; Enarr. in ps. vii, n. 15 ; ix, n. 20 ; liv, n. 22 ; lxvii, n. 39, t. xxxvi, col. 106, 125-126, 643, 836-837. Voir appendice x dans J.-A. Môhler, L’unité dans l’Église, tr. fr., Paris, 1938, p. 272-273.

Ce n’est là toutefois qu’une idée encore bien vague ;

il sera réservé à saint Vincent de Lérins de perfectionner cet aperçu.

3° Après saint Augustin : Vincent de Lérins. — Vincent de Lérins, dans son Commonitorium, P. L., t. l, col. 637-638, déclare tout d’abord qu’ « il a maintes fois demandé à de saints et doctes personnages, une règle sûre et générale pour distinguer la vérité de la foi catholique de la fausseté des mensonges hérétiques ; on lui a toujours fait à peu près cette réponse : …se munir d’une double protection, d’abord l’autorité de la divine loi, ensuite la tradition de l’Église catholique ». C. ii, col. 639. Cette réponse donnée, Vincent aborde le critère de la vraie tradition et détermine les conditions du progrès dogmatique dans la tradition elle-même.

1. Critère de la vraie tradition.

Dans l’Église catholique elle-même, il faut veiller soigneusement à s’en tenir à ce qui a été cru partout, toujours et par tous, quod ubique, quod semper, quod ab omnibus creditum est.

C’est cela qui est proprement et véritablement catholique, comme le montrent la force et l’étymologie du mot lui-même, qui enveloppe l’universalité des choses. Et il en sera ainsi, si nous suivons l’universalité, l’antiquité, le consentement général. Nous suivrons l’universalité, si nous confessons comme uniquement vraie la foi que confesse l’Église entière répandue dans l’univers ; l’antiquité, si nous ne nous écartons en aucun point des sentiments manifestement partagés par nos saints aïeux et par nos pères ; le consentement enfin si, dans cette antiquité même, nous adoptons les définitions et les doctrines de tous les évêques et des docteurs. (Traduction de Labriolle, Paris, 1906.) Col. 639.

L’application de cette règle est d’une évidence incontestable quand il s’agit d’une tradition ferme et constante ; elle est moins claire dans un grand nombre de cas, dont le moine de Lérins prévoit quelques-uns seulement. L’hérésie, en effet, peut se présenter en invoquant des précédents et en cherchant des points d’appui dans le passé. Si donc l’universalité dans la tradition n’apparaît pas et qu’il y ait division, on remontera vers l’antiquité ; et si, dans l’antiquité même, apparaissent déjà des divisions, ou même si une erreur se rencontre, alors on aura grand soin « de préférer à la témérité ou à l’ignorance d’un petit nombre les décrets (s’il en existe) d’un concile universel tenu anciennement au nom de l’ensemble des fidèles ». N. 3, col. 641.

A défaut des conciles, on devra consulter, interroger en les confrontant, les opinions des ancêtres, de ceux d’entre eux, notamment, qui, vivant en des temps et en des lieux différents, sont demeurés fermes dans la communion et dans la foi de la seule Église catholique et y sont devenus des maîtres autorisés ; et tout ce qu’ils auront soutenu, écrit, enseigné, non pas individuellement, ou à deux, mais tous ensemble, d’un seul et même accord, ouvertement, fréquemment, constamment, un catholique se rendra compte qu’il doit lui-même y adhérer sans hésitation. N. 3, col. 641.

L’auteur illustre ses enseignements par des exemples. Si quelque personnage éminent enseigne dans l’Église des nouveautés condamnables, n. 10-16 — et Vincent cite les cas de Nestorius, Origène, Tertullien et, derrière eux, les augustiniens fervents, 17-18 — l’Église n’hésite pas à condamner ces blasphèmes et à rejeter les blasphémateurs. Selon la parole de saint Paul, il faut qu’il y ait de telles hérésies, pour que des vertus inébranlables puissent se manifester. N. 20-21. Un saint, un martyr peut même émettre une opinion personnelle contraire à l’enseignement commun : le souci de notre salut nous oblige à ne pas l’écouter. N. 28, col. 675. Les vrais catholiques s’attacheront à la vérité garantie par l’Église ; ils « garderont le dépôt » ; s’ils doivent répéter différemment ce qu’ils ont ap.