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TRADITION. PÈRES LATINS


trouve aussi des chaînes dans la littérature syriaque et arménienne, chez les prabes et les coptes. On se contentera ici de cette simple indication en renvoyant à l’art. Chaînes du Dict. de la Bible, t. ii, col. 482-487, et du Supplément, t. i, col. 1084 sq.

IV. DOCTRINE DES PÈRES LATINS.

1° Avant

saint Augustin. — 1. Saint Hilaire. — S’il n’élabore aucune théorie sur la tradition, il se montre cependant, dans le -De Trinilate, un théologien traditionnel. Son but est, comme il le dit ailleurs, de concilier tous les catholiques, en les engageant à retenir « la foi que nous avons reçue par les prophètes, que Dieu le Père nous a enseignée par le Christ Notre-Seigneur et le Saint-Esprit, que nous avons reçue dans les évangiles et par les apôtres et qui, par la tradition des Pères, selon la succession apostolique, s’est conservée jusqu’au concile de Nicée, réuni contre l’hérésie des temps actuels ». Fragm. histor., vii, n. 3, P. L., t. x, col. 697 AB. Et le concile a demandé qu’on ne diminuât en rien la tradition des Pères. Id., ibid., B.

D’ailleurs, Hilaire affirme nettement que l’intelligence vraie de la sainte Écriture ne peut exister que chez ceux qui acceptent l’enseignement de l’Église : qui extra Ecclesiam posili sunt, nullam divini sermonis capere posse intelligentiam. In Matth., xiii, 1, P. L., t. ix, col. 993. C’est dans l’Église qu’a été établie la parole de vie. Id., ibid. Cf. In ps., xiv, 4 ; cxlvi, 12, col. 301, 874. Voir aussi De Trinitate, t. VII, n. 4, P. L., t. x, col. 203. L’argument des Pères, cependant, n’existe pour ainsi dire pas chez Hilaire ; il cite parfois Cyprien et Tertullien, s’inspire d’Origène et incidemment laisse percer des réminiscences d’Athanase. Quant à l’autorité des conciles, le De synodis laisserait supposer que saint Hilaire n’a pas encore une conviction très ferme de l’autorité du concile œcuménique ; cf. n. 86, P. L., t. x, col. 538 B-539 A. Et il conclut néanmoins en se ralliant à l’homoousios, seul conforme à l’enseignement de l’Évangile et des apôtres. N. 91, col. 545 A.

2. Saint Ambroise ignore à peu près l’argument de tradition, tel que les Pères antérieurs l’avaient présenté. Il n’en parle expressément qu’à propos de la célébration de la Pâque, sur laquelle et Scriptura divina nos instruit, et traditio majorum. Cette traditio majorum a été sanctionnée à Nicée. Epist., xxiii, n. 1, t. xvi (édit. de 1860), col. 1070 A. Toutefois, il n’est pas impossible de dégager des enseignements de l’évêque de Milan certains aspects de l’argument. Tout d’abord, c’est l’enseignement apostolique, qui est à la base de l’enseignement actuel de l’Église. Ce sont les apôtres qui ont, par leur prédication, apporté la lumière dans l’interprétation de la divine Écriture. Epist., xxvi, n. 10, col. 1088 C. Le symbole des apôtres résume leur enseignement et l’Église romaine le conserve et le garde avec soin. Epist., xlii, n. 5, col. 1174 A. Pierre en est le fondement, parce qu’il doit garder non seulement sa foi personnelle, mais le bien commun de la foi de tous. De incarn., n. 33, cꝟ. 34, col. 862.

La foi doit être cherchée dans l’Église catholique, et si quelque Église rejette cette foi et ne possède plus le fondement de la prédication apostolique, elle doit être abandonnée. In Lucam, t. VI, n. 68, P. L., t. xv, col. 1772 BC. Dans chaque Église particulière, la mission d’enseigner appartient à l’évêque et Ambroise s’excuse auprès de ses diocésains d’être obligé de passer des tribunaux et de l’administration civile au sacerdoce sans y avoir été préparé : docere vos cœpi, quod ipse non didici. De officiis, n. 4, P. L., t. xvi, col. 27 C.

Ambroise manifeste à l’égard du concile de Nicée la plus profonde adhésion, non seulement quant aux décrets disciplinaires, mais encore quant à la foi : ni la mort, ni le glaive ne pourraient l’en séparer. Epist.,

xxi, n. 14, col. 1048 A. Cf. De fide, prol. n. 5 ; t. III, n. 124, col. 582 À et 638 D. C’est donc surtout l’idée du magistère enseignant, règle de notre croyance, qui a retenu l’esprit d’Ambroise. Préoccupation d’homme pratique et d’administrateur avisé.

3. Saint Jérôme s’est occupé à peu près exclusivement du texte de l’Écriture et de son interprétation. Aussi, sur la tradition doctrinale, il n’y a presque rien à glaner dans ses œuvres. Il reconnaît que l’Écriture est souvent difficile à comprendre, Epist., cv, n. 5, P. L., t. xxii (édit. de 1877), col. 836 ; cf. lviii, n. 9, col. 585 ; xlix, col. 512. Il faut donc un maître pour comprendre l’Écriture. Epist., lui, n. 6, col. 544. Sans doute, il sera bon de lire les traités des hommes doctes, de ceux dont la foi est connue, Epist., liv, n. 41, col. 555, mais, tout en demeurant dans les limites tracées, c’est à la foi romaine qu’il faut s’attacher. Telle est la profession de foi qu’il fait à Théophile d’Alexandrie : Scito nobis nihil esse aniiquius quam Christi jura servare, nec Patrum transferre (al. transire) terminos, semperque meminisse Romanam fidem, apostolico ore laudalam, cujus se esse parlicipem Alexandrina Ecclesia gloriatur. Epist., lxiii, n. 2, col. 607.

Quant aux traditions disciplinaires, Jérôme les affirme nettement. C’est au nom de la tradition qu’il justifie l’imposition des mains et l’invocation au Saint-Esprit sur les nouveaux baptisés et, à ce propos, il énonce d’autres pratiques provenant de la tradition. Dial. contra Lucif., n. 8, P.L., t. xxiii, col. 172 AB. Et, dans la lettre à Lucinius : Ego illud breviter te admonendum puto, traditiones ecclesiasticas, prsesertim quæ ftdei non officiant, ita observandas, ut a majoribus traditæ sunt, nec aliorum consuetudinem aliorum contrario more subverti. Epist., lxxx, n. 6, t. xxii, col. 672.

Saint Augustin.

L’évêque d’Hippone n’a pas

traité directement la question de la tradition, mais, de ses œuvres et surtout de ses controverses antipélagiennes, on peut tirer toute une théologie de la tradition catholique. Il en établit le principe, en expose la valeur doctrinale, trace les règles qui permettent de distinguer la vraie tradition et enfin esquisse un enseignement déjà fort net touchant le magistère infaillible, organe de la tradition.

1. Le principe de la tradition.

C’est surtout à propos du péché originel que saint Augustin pose contre les pélagiens le principe même de la tradition. Traditum tenet universitas Ecclesise, cum parvuli infantes baplizantur, qui certe nondum possunt credere ad justitiam et ore confiteri ad salutem… et tamen nullus christianorum dixerit eos inaniter. De baptismo, t. IV, n. 30, P. L., t. xliii, col. 174. D’où le principe général : Quod universa tenet Ecclesia, nec conciliis inslitutum, sed semper retentum est, nonnisi auctoritate apostolica traditum rectissime creditur. Id., n. 31, col. 174. Cf. Epist., liv, n. 1, t. xxxiii, col. 200 ; De peccalorum mer. et remiss., n. 34, t. xliv, col. 128. Et encore le célèbre texte contre Julien d’Eclane : Quod invenerunt in Ecclesia tenuerunt ; quod didicerunt, docuerunt ; quod a patribus acceperunt, hoc filiis tradiderunt. Cont. Julianum, t. II, n. 34, col. 698.

C’est aussi dans la question du baptême conféré par les hérétiques, qu’Augustin formule, d’accord en cela avec Cyprien, mais pour aboutir à des conclusions opposées, le principe même de la tradition : Quod autem nos admonet (Cyprianus) ut ad fontem recurramus, id est ad apostolicam traditionem, et inde canalem in nostra tempora dirigamus, optimum est et sine dubitatione faciendum. Tradiium est ergo nobis, sicut ipse commémorât, ab apostolis, quod sit verus Deus et Christus unus et una spes et fides una et una Ecclesia et baptisma unum. De bapt., t. V, n. 37, t. xliii, col. 194. Cf. Epist., liv, n. 1, t. xxxiii, col. 200.

2. Valeur doctrinale du principe de la tradition. —