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TRADITION. PREMIERS PÈRES


trine sont donc, sous la plume de Barnabe, trois synonymes ; cf. xviii, 1. Et cela est confirmé par le caractère même de la seconde partie de la lettre, xviii-xx, résumé de la catéchèse morale de l’Église.

Mais la « gnose » est aussi le don divin qui justifie la révélation exprimée dans les oracles de la Bible, ce que Barnabe appelle « les justifications du Seigneur », Ta SixaicôjjiaTa toû Kuploo.i, 2 ; ii, 1 ; iv, 11 ; xxi, 1-5 ; cf. xvi, 9 ; « les préceptes du Seigneur », ai IvToXaî, iv, 11 ; vi, 1 ; ix, 5 ; x, 2 ; x, 11-12 ; xvi, 9 ; « les instructions du Seigneur », rà Soyf-aTa toû Kupîou, i, 6 ; ix, 7 ; x, 1 ; x, 9-10 ; « la voie de la justice », /) ô86ç Sixaioouvyjç, i, 4 ; v, 4 ; cf. i, 6 ; « la crainte de Dieu », 9660c toû 0eoû, iv, 11 ; cꝟ. 1, 7 ; 11, 2 ; xi, 11.

L’idée du dépôt doctrinal se complète chez Barnabe d’une intelligence des Écritures et des mystères, laquelle est un don de Dieu. Cette gnose n’est pas rattachée par l’auteur de l’épître à une hiérarchie visible. Elle est néanmoins une « science de la foi », cherchant à pénétrer le sens profond de la révélation par une raison illuminée de l’Esprit divin. Elle vise à l’accord parfait avec la doctrine du Christ, des apôtres et des Églises. Elle est un don divin accordé à l’homme dans l’initiation chrétienne, xvi, 8-10 ; cf. iv, 11. Loin de supprimer la foi qui nous vient des apôtres, v, 9, elle en est la perfection. 1, 5. La doctrine des deux voies est un dépôt reçu, xix, 1, dépôt qu’on doit conserver intact, xix, 11, sans en rien retrancher, sans y rien ajouter. Mais est-ce par la voie de l’enseignement oral que ce dépôt a été transmis ? Barnabe est muet sur ce point, comme sur l’existence d’un magistère vivant dans la hiérarchie.

4. Saint Ignace d’Antioche présente une notion du dépôt doctrinal plus fortement accentuée. Pour lui, la foi actuelle des Églises s’identifie avec la doctrine du Christ et des apôtres. Elle va « à l’évangile comme à la chair du Christ, aux apôtres comme au presbytérium de l’Église ». Phil., v, 1, dans Funk, op. cit. Les prophètes sont dignes de notre amour, parce qu’ils annoncent l’Évangile, espèrent en Jésus-Christ et l’attendent. .. et ils sont unis au Christ. Ibid., v, 2. Ignace écrit aux Éphésiens que le Christ est inséparable de notre vie ; les évêques constitués aux extrémités de la terre sont unis au Christ par la foi, èv’Iyjaoû Kpio-Toû Yvw(j.7) s’ictîv, Eph., iii, 2 ; iv, 1. Parce qu’ils vivent dans la vérité, les Éphésiens n’écoutent que Jésus qui leur parle réellement, ibid., vi, 2 ; ils furent toujours d’accord avec les apôtres, xi, 2. Aux Magnésiens, il recommande de s’affermir dans les doctrines du Seigneur et des apôtres en union avec leur évêque, la couronne du presbytérium et les saints diacres. Magn., xiii, 1. Pareillement, les Tralliens seront préservés de l’erreur s’ils se tiennent unis à Dieu, à Jésus-Christ, à leur évêque et aux préceptes des apôtres. Trait., vii, 1 ; cf. Philad., vii, 2 ; viii, 1. Par contre, s’écartent de la vérité et du Christ, tous ceux qui accueillent une doctrine étrangère, un enseignement différent. Cf. Eph., ix, 1 ; xvi, 2 ; Philad., 11, 1 ; Magn., vm, 1 ; Trall., vi, 1 ; Smyrn., 11. Un tel enseignement vient du « prince de ce monde ». Eph., xvii, 1.

Aucun doute sur la pensée qui dicte ces textes : l’enseignement actuel des Églises et de la hiérarchie ne fait qu’une réalité avec la prédication du Christ et des apôtres, parce qu’il la continue. Cf. M. Winkler, Der Tradilionsbegrifj des Urchristentums bis Tertullian, Munich, 1897, p. 37. Ignace emploie déjà à plusieurs reprises les mots xr)puyu.a et x7)pÛTTSiv pour désigner cette prédication. Philad., vii, 1, 2. C’est l’évêque, aidé du collège des presbytres, qui peut assurer l’unanimité des fidèles dans la foi : aussi est-ce une pressante recommandation de se grouper autour de l’évêque. Cf. Trall., vi, 2 ; vii, 1 ; Eph., xx ; Phil., m, 1-2. La succession apostolique est non moins nette ment affirmée. Les Éphésiens sont confidents de Paul, IlaûXoo aû(i.u.uaTai, initiés aux mêmes mystères dont l’Apôtre fait mention dans ses lettres. Eph., xii, 2.

5. Saint Polycarpe engage les Philippiens à « s’inspirer de la doctrine qui nous a été transmise, dès le début ». vii, 2. Non seulement la tradition est ainsi indiquée par Polycarpe, mais encore la transmission apostolique du dépôt ; car la foi des Philippiens a pour racine la prédication de Paul. Cf. iii, 2 ; xi, 3. Dans le Martyrium S. Polycarpi, le saint martyr déclare que les chrétiens ont reçu l’enseignement (8e8’.8ây[i.e0a) de rendre aux autorités constituées par Dieu l’hommage qui leur est dû. x, 2.

6. La //* démentis exhorte les Corinthiens à » demeurer justes et saints, dans ce que nous avons cru ». xv, 3. Ceux qui gardent ainsi « le sceau » (du baptême), vm, 6 ; cf. vii, 6, relèvent « de l’Église primitive, spirituelle, éternelle, fondée avant le soleil et la lune ». xiv, 1. Simple indication, suffisante toutefois à marquer la succession apostolique dans l’enseignement de la vraie doctrine.

7. L’épître à Diognète rappelle en passant que les chrétiens n’ont pas, comme dépôt transmis, une simple doctrine humaine : où yàp è7rîyeiov… etfpY)u.a tout’aÙTOÏç TcapESôOv]. vii, 1.

8. Le Pasteur d’Hermas est plus riche en indications. On trouve la même allusion que dans la II* Clemenlis à ceux qui « gardent les prescriptions divines qu’ils ont reçues avec une grande foi », à coup sûr au moment de leur baptême qui est « le sceau de la prédication des apôtres ». Vis., i, iii, 4 ; cf. Sim., VIII, vi, 3 ; IX, xvi, 4, 5. La loi des chrétiens est le Fils de Dieu prêché (xTQpu/ÔEtç) jusqu’aux extrémités de la terre, Sim., VIII, iii, 2. Hermas connaît aussi la hiérarchie enseignante : les pierres taillées et blanches de la tour, ce sont « les apôtres, les évêques, les docteurs et les diacres qui ont marché dans la sainteté de Dieu… et ont gouverné et enseigné », è7uo"X07rr)0’avTeç, xal StSâ^avteç. . Vis., III, v, 1 ; cf. Sim., IX, xv, 4 ; xxv, 2. Ainsi laisse-t-il entendre que les épiscopes-presbytres exercent une réelle autorité doctrinale dans la communauté, car Hermas lui-même doit passer par l’évêque (Clément) et les presbytres pour faire lire le message que lui a confié l’Ancienne (l’Église), Vis., II, iv, 2-3, et les presbytres doivent s’asseoir les premiers. Vis., III, 1, 8. Cf. Seeberg, Lehrbuch der Dogmengesch., t. 1, p. 241-242. L’idée de succession apostolique n’est pas absente non plus du Pasteur : la vision III, v, 1, énumère après les apôtres, les évêques, les docteurs, 818â<rxaXoi, les diacres, en spécifiant que les uns sont morts, que d’autres vivent encore, mais que toujours entre eux ils ont été en plein accord, ont vécu en paix et se sont mutuellement instruits, rcàvTOTe èautoïç ouvecpwvTjaav xal èv èauTOtç, etprjvrjv ëffxov xal àXXr)X<ov 7]xouov.

9. Le témoignage de Papias est d’une importance extrême. Il écrit l’Explication des sentences du Seigneur, en y insérant ce qu’il « avait appris des « an « ciens », en interrogeant ceux qui avaient vécu en leur compagnie, s’enquérant de ce qu’avaient dit André ou Pierre, Philippe ou Thomas, Jacques ou Jean, Matthieu ou tel autre disciple du Seigneur, ce que prêchaient Aristion ou le presbytre Jean, disciples du Seigneur ». Fragm., dans Eusèbe, Hist. eccl., t. III, c. xxxix, P. G., t. xx, col. 297. Il ajoute : « Ce qu’on tire des livres me paraissait ne pouvoir me profiter autant que ce qui vient d’une voix vivante qui demeure. » Il n’ignore cependant pas l’existence des évangiles (Marc et Matthieu), mais il leur préfère les renseignements oraux.

10. Saint Justin rappelle que les chrétiens ont reçu leur doctrine comme une « didachè » reçue elle-même du Christ et des apôtres. Ils > enseignent > ce qu’ils ont