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TITRE CANONIQUE
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de ladite église, une honnête subsistance, selon le principe posé par saint Paul, I Cor., ix, 7. D’autre part l’évêque, responsable du bien de son église, se trouvait invité à proportionner le nombre des ministres aux besoins de la communauté, afin de ne pas faire de ceux-ci des désœuvrés, dont l’entretien eût grevé le patrimoine ecclésiastique. Le concile de Chalcédoine (451), en son 6e canon, interdit toute ordination « absolue », c’est-à-dire, sans rattachement du clerc à une église déterminée. Il exige même que soit publié le nom propre de l’établissement (église urbaine ou rurale, monastère, etc.), auquel est destiné l’ordinand, qu’il s’agisse de la prêtrise, du diaconat ou de tout autre degré de la hiérarchie. Aussi, lorsque, à partir du v c siècle, les églises reçurent le nom de tituli, les candidats aux ordres furent promus « à tel titre » (ad talem titulum), ou simplement « au titre » (ad titulum), par opposition aux ordinations « absolues ». Celles-ci demeurèrent toujours à l’état d’exception durant les huit premiers siècles.

Du ix c au xie siècle s’organisa dans l’Église le système des prébendes ou bénéfices, en ce sens que la part des revenus affectés à l’entretien du clergé fut divisée en lots distincts et autonomes, sans possibilité de retour à la masse commune en cas de mort du titulaire. Le mot « titre » devint alors synonyme de bénéfice ou prébende, dont chaque diacre ou prêtre devait être muni au moment de son ordination par les soins de l’évêque. Cette règle ne fut pas toujours observée. Aussi le 5e canon du IIIe concile du Latran (1179), après avoir rappelé la loi de l’Église, statua, à titre de peine, que l’évêque contrevenant devrait pourvoir, sur ses propres revenus, à l’entretien du clerc ainsi ordonné (sauf si ce dernier possédait un patrimoine suffisant), jusqu’à ce qu’il lui eût procuré un bénéfice. Decr. Greg. IX, t. III, tit. v, c. 4. L’Église réaffirmait, sa volonté de ne pas laisser ses ministres dans une honteuse misère.

Les prescriptions du Latran ne visaient strictement que les ordinations presbytérales et diaconales. Mais plusieurs décrétales des papes vinrent bientôt étendre l’obligation du titre clérical à tous les ordres, conformément à l’antique discipline du can. 6 de Chalcédoine. Cf. Décret. Greg. IX, t. III, tit. v, c. 16. Elles se heurtèrent à la résistance des évoques, qui proclamaient s’en tenir au texte du Latran. Devant cette opposition, Innocent IV finit par déclarer, vers le milieu du xiiie siècle, que « l’Église romaine n’entend obliger les évêques à pourvoir d’un titre que les candidats aux ordres sacrés ». On sait que le sous-diaconat était considéré comme tel depuis l’an 1190.

Parallèlement à ces concessions, et sans doute par suite d’une fausse interprétation du 5e canon du Latran, une opinion se faisait jour qui tendait à équiparer le patrimoine, personnel d’un clerc à un titre d’ordination. Ce n’était certainement pas l’intention de l’assemblée conciliaire, qui relaxait simplement l’évêque de l’obligation d’entretenir de ses deniers le clerc ordonné sans titre, lorsque ce clerc possédait un patrimoine suffisant. Cf. Philipps-Crouzet, Du droit ecclésiastique dans ses principes, t. i, p. 440 sq. Pourtant, moins de vingt ans après le concile, on allait répétant — nous dit une lettre d’Etienne, évêque de Tournai — qu’ « en vertu d’une dispense contenue dans les saints canons », des laïcs ayant des biens suffisants pour assurer leur subsistance, demandaient à recevoir l’ordination. Dès 1208, Innocent III permettait à l’archevêque de Besançon d’admettre aux ordres majeurs des clercs mineurs ainsi pourvus. Décret. Greg. IX, t. III, tit. v, c. 23. Et bientôt, le patrimoine qui n’était considéré que comme un titre supplétoire, pro titulo, obtint le rang et la qualité d’un véritable titre. C’est chose faite en 1233 : le 6e canon du concile

de Béziers décide que « nul ne sera ordonné, s’il ne justifie d’un litre patrimonial d’au moins cent sous tournois, ou d’un bénéfice suffisant ». Hefele-Leclercq, Hist. des Conc, t. v, p. 1557. Ainsi, le patrimoine se trouva mis sur le même pied que le bénéfice, comme titre d’ordination. Il devint bientôt — pour le malheur de l’ÉgMse — un titre de vocation et peupla les rangs du clergé d’un trop grand nombre d’oisifs, bien pourvus, n’ayant aucun office à remplir et exposés aux pin s dangers.

Le concile de Trente s’ouvrit sur cet état de choses. Certains évêques, pour couper le mal dans sa racine, proposèrent la suppression du titre patrimonial. Cf. Pallavicini, Hist. conc. Trid., t. XVII, c. ix. Mais devant la situation de certaines églises dépourvues de bénéfices, on renonça à un retour brutal à l’austère discipline de Chalcédoine et on choisit une voie moyenne. Il fut décidé : 1. que, pour les ordres sacrés, le bénéfice est le titre de règle ; l’évêque ne pourra ordonner au titre du patrimoine que les sujets jugés nécessaires ou utiles à son Église, sess. xxi, c. ii, De Réf. ; 2. que tout clerc demeurera attaché à l’église pour l’utilité de laquelle il a été ordonné, et qu’il y exercera son ministère. Sess. xxiii, c. xvi, De Réf. Ainsi, le titre clérical n’était exigé que pour les ordres majeurs. À côté du titre patrimonial et avec les mêmes réserves, le concile admettait comme légitime le tilulus pensionis. Cette discipline concernant l’ordination des séculiers demeura en usage jusqu’à la promulgation du Code.

Quant aux réguliers, qui, depuis des siècles déjà, avaient pris l’habitude d’être, promus aux ordres, les lois canoniques ne prévoyaient rien de spécial relativement à leur mode de subsistance. Elles n’exigeaient pas davantage qu’ils fussent affectés à un office dans une église déterminée, attendu que leur admission dans l’ordre monastique garantissait leur stabilité. Cependant, comme au cours de la cérémonie de l’ordination, on en était venu à demander publiquement à quel titre était promu chacun des candidats aux ordres majeurs (cf. Pontificale Rom., au début de l’ordination des sous-diacres) on imagina, pour les réguliers, le titulus professionis religiosm, ou mieux, par une étrange association de mots, le titulus paupertatis. Le pape Pie V prit soin de souligner que ce titre ne pouvait s’appliquer qu’à des religieux profès. Constit. Romanus Ponlifex, 14 octobre 1568.

Quant aux peines prévues contre les prélats qui ordonnaient des sujets sans titre, le concile de Trente se bornait à sanctionner de son autorité celles qu’avaient établies les « anciens canons ». Cf. sess. xxi, c. ii, De Réf. La principale était l’obligation imposée à l’évêque d’entretenir de ses deniers les clercs ainsi promus et dépourvus de ressources. Décret. Greg. IX, t. III, tit. v, c. 4 et 16. De plus, le pape Grégoire IX avait frappé d’une suspense ipso jure, d’une durée de trois ans, le consécrateur et le présentateur qui avaient obtenu de l’ordinand la promesse ou le serment de ne rien exiger pour sa subsistance. L’ordonné était également frappé de suspense jusqu’à dispense du Saint-Siège. Ibid., . V, tit. iii, c. 45.

La constitution Apostolicæ Sedis (1869) avait maintenu cette suspense, mais seulement contre le consécrateur. En revanche, elle établissait une suspense d’une année à rencontre de l’évêque qui conférait les ordres sacrés, sans titre bénéficiai ou patrimonial, à un clerc vivant dans une congrégation à vœux simples, ou même à un religieux à vœux solennels mais non encore profès, suspenses n. 2 et 4.

La discipline actuelle.

Le Code a maintenu

pour VÉglise latine, la nécessité d’un titre canonique lors de la promotion des candidats aux ordres sacrés. Ce titre consiste en une garantie légitime, qui assure