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1103 TIMOTHÉE ET TITE. THEOLOGIE, LA HIERARCHIE

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épiscopes, èsciaxé-nrouç, avec la charge de paître l’Église de Dieu qu’il s’est acquise par son sang », 7101[j.aCveiv tt)v èxxXTjCÎav toû 6eoû. Entre autres devoirs, Paul leur recommande la vigilance à préserver les fidèles des fausses doctrines. Avec le pain de la parole divine, les pasteurs nourriront aussi leur troupeau du pain eucharistique, car les chrétiens avaient coutume de se réunir le premier jour de la semaine pour la fraction du pain, comme l’attestent les versets précédents, xx, 7. Les fonctions des presbytres sont donc assimilables tout au moins à celles du clergé de nos jours dans les paroisses. Nous verrons plus loin s’il y a lieu de leur reconnaître un pouvoir supérieur. Dans le même esprit, Paul recommande à ses deux fondés de pouvoirs de choisir pour presbytres des hommes instruits. I Tim., v, 17-22 ; Tit., i, 5-10. Deux autres textes nous apprennent que les presbytres président, irpoECTTcàTeç, et qu’ils enseignent. I Tim., v, 17 ; Tit., i, 9.

c) Épiscopes : sens et origine du mot. — Étymologiquement, è7ÛaxoT : oç signifie « surveillant, inspecteur ». Pour l’emploi de ce mot dans la littérature profane, voir ici t. v, col. 1658-1659. Il résulte des textes que le titre d’ÈTcîoxoTCoç, surtout dans les inscriptions, se donne soit à des employés civils, soit à des magistrats chargés de divers travaux dans les temples. Même variété dans le grec des Septante, où il répond à l’hébreu paqid. Il se dit de Dieu, rîjç xapSîccç ÈTctaxo-nroç. Sap., i, 6 ; cf. Job, xxviii, 29. Il désigne parfois des chefs militaires ou civils, Num., xxxi, 12 ; Jud., ix, 28 ; Neh., xi, 9 ; I Mach., i, 53, et plus souvent des magistrats sacrés, prêtres ou lévites. IVReg., xi, 10 ; II Par., xxxiv, 12, 17 ; Neh., xi, 14, 22, £77Îoy.o7roç Aeuitwv. Au terme Imoy.oTzoç est apparenté celui de è7riaxo7rYj qui, très rare dans le grec profane, est au contraire fréquent dans l’Ancien Testament, ordinairement au sens de visite ou inspection divine pour bénir ou châtier, et deux fois, Ps., cviii, 8 ; Num., iv, 16, au sens d’office stable de surveillance. Dans le Nouveau Testament, il signifie deux fois la visite bienveillante de Dieu, Luc, xix, 44 ; I Petr., ii, 12, et deux fois un office permanent, celui qui avait été confié à Judas, Act., i, 20, cf. Ps., cviii, 8, et celui que remplit l’épiscope des Pastorales. I Tim., iii, 1.’Emcxoiroûv « inspecter, examiner », ne se rencontre que deux fois, dans le Nouveau Testament, une fois au sens de cavere, Hebr., xii, 15, et une autre fois pour marquer l’office des presbytres. I Petr., v, 2. Le verbe ÈTCioxsTtTojjLœi exprime dans l’Ancien Testament la surveillance divine s’exerçant par le châtiment ou la récompense ; dans le Nouveau Testament, tantôt la « visite » bienveillante de Dieu ou des hommes, tantôt une charge d’inspection : la surveillance des tables, Act., vii, 3 ; une tournée apostolique. Act., xv, 36. — En somme, vu la fréquence dans l’Ancien Testament de èttÎcxotvoç et de èTCioxoTTY), on inclinerait à penser que l’emploi ecclésiastique de èmcxoTCoç a son origine dans la Bible, bien que les inscriptions en fassent aussi usage.

d) Épiscopes : leurs fonctions. — Le titre de è-rc’.axoTCoç, avons-nous dit, paraît être d’origine biblique. En tout cas, du fait que les èn ; [ffxo7Toi des temples païens sont souvent chargés de la gestion des finances, on n’est nullement en droit de conclure que les épiscopes chrétiens étaient simplement à l’origine des économes chargés de l’administration des biens de la communauté. S’ils ont à veiller aux intérêts temporels de l’Église, s’ils doivent être « hospitaliers, désintéressés de l’argent », I Tim., iii, 2-3, si Épaphrodite est chargé de porter à saint Paul les aumônes des Philippiens, ce rôle administratif demeura cependant au second plan. Leurs fonctions sont avant tout spirituelles. C’est à la qualité d’sriîcrxoTroi que le discours aux anciens d’Éphèse, Act., xx, 28, rattache direc tement le devoir de « paître l’Église de Dieu ». Il en est de même dans les Pastorales. On choisira pour épiscope un homme capable d’enseigner, SiSaxTixiç, I Tim., iii, 2, dont les vertus personnelles et familiales permettent d’espérer qu’il saura gouverner l’Église de Dieu en donnant à tous le bon exemple. L’épiscope est « l’économe de Dieu », c’est-à-dire son ministre et le dispensateur de ses mystères. Tit., i, 7-10 ; cf. I Cor., iv, 1 ; I Petr., iv, 10 ; « gardien de la vraie doctrine qui lui a été enseignée, il doit être capable d’exhorter les fidèles dans la saine doctrine et de convaincre les contradicteurs ».

c) Qualités requises des presbytres et des épiscopes. — Les qualités morales que doivent réunir les dignitaires préposés au gouvernement des Églises sont exposées en détail par l’Apôtre, d’abord dans I Tim., où il est parlé seulement de l’épiscope, iii, 1-7, puis dans Tit., i, 5-9, où le nom d’épiscope (7-9) succède à celui de presbytre (5-6) comme s’il s’agissait toujours des mêmes personnages. Nous constatons la plus grande ressemblance entre les deux tableaux. L’énumération commence par le même titre général : Set tgv èmaxoTCov àveTtîX7)[XTCTOv eïvai, I Tim., iii, 2, ou àvÉYxX7)TOv, Tit., i, 7 ; qui reprend I, 6, et se poursuit de part et d’autre par un nombre égal de vertus ou de conditions. La Vulgate a dans lapremière liste le terme pudicum, qui n’est pas dans le grec. En comparant entre elles les qualités ainsi énumérées, on reconnaît que, malgré quelques différences d’expressions, elles sont au fond identiques. La seule différence sensible consiste dans la prohibition faite à Timothée d’ordonner pour épiscope un néophyte, iii, 6, de crainte qu’un tel honneur ne le porte à l’orgueil.

Ainsi Paul demande des aspirants presbytres ou épiscopes une conduite irréprochable, qui leur concilie le respect des païens aussi bien que des chrétiens ; la prudence et la sagesse nécessaires pour gouverner l’Église, garanties par le bon ordre qu’ils auront fait régner dans leur propre famille ; l’esprit de douceur, la charité, l’hospitalité, vertus chrétiennes par excellence et si aptes à gagner les cœurs ; le désintéressement des biens de la terre et le zèle des âmes, la tempérance et la pureté ; la piété envers Dieu ; une foi éclairée et savante, capable d’instruire les fidèles et de réfuter les adversaires II est bien remarquable que la première de toutes les conditions exigées de l’épiscope, I Tim., iii, 2, comme du presbytre, Tit., i, 6, soit de n’avoir été marié qu’une fois, ulaç "fova.ix.be fivSpa.

Plusieurs critiques hétérodoxes estiment que le niveau des vertus « épiscopales » présenté dans ces pages est peu élevé et dépasse à peine l’honnêteté moyenne Ils expliquent ce défaut d’idéal en disant que l’auteur des Pastorales aurait utilisé des lieux communs de morale populaire répandus par les philosophes stoïciens dans leurs n diatribes », par les rhéteurs dans leurs oraisons funèbres, par les auteurs d’épithalames et d’épitaphes. Cf. K. Weidinger, Die Haustafeln, ein Stûck urchristlicher Parânese, Leipzig, 1928. Mais cette théorie méconnaît d’abord, d’une manière générale, l’idéal chrétien qui, en donnant aux vertus les mêmes noms que les païens, les élève, par la volonté et l’exemple du Christ, à une hauteur que le paganisme soupçonnait à peine. En outre, Weidinger se méprend singulièrement sur la pensée de Paul en disant que « mari d’une seule femme » signifie « non polygame ». Cette opinion est celle de beaucoup d’auteurs juifs et protestants. Selon le Docteur Rabbinowiez, Législation civile du Thalmud, t. iv, Paris, 1879, p. xi.vii-xlviii, Paul appliquerait aux évêques et aux diacres la loi juive traditionnelle qui défendait au grand prêtre de Jérusalem la polygamie : « Il en résulte que saint Paul permettait la polygamie aux chrétiens qui n’étaient ni évêques, ni diacres. » D’autres con-