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TIMOTHÉE ET TIÏE. THÉOLOGIE. LA TRADITION


viennent au premier rang. Pour eux, en effet, la volonté divine est passée de l’ordre de l’intention à celui de l’exécution ; ils possèdent le salut initial, gage du salut final : on peut dire que si tous les hommes sont appelés, les chrétiens sont déjà les élus, èxXexTol. Rom., viii, 23 ; xvi, 13 ; Col., iii, 12 ; II Tim., ii, 10 ; Tit., i, 1. Dihelius (cité par Bardy, La sainte Bible, t.xii, p. 223), prétend découvrir dans cette phrase la marque d’une époque où, le mouvement de conversion si vigoureusement lancé par la prédication des apôtres semblant se ralentir, on n’espérait plus guère conquérir l’univers et on regardait les croyants comme seuls sauvés. Mais l’expression u.àXiGTa "uctcov constate la situation privilégiée des chrétiens par rapport au salut sans impliquer aucune restriction de la volonté divine à l’égard des autres, et cette réflexion a pour but de stimuler le zèle des apôtres afin d’amener tous les hommes à partager le bonheur des fidèles. Cette économie universelle du salut s’affirme encore avec autant de charme que de force dans Tit., ii, 11-14, où il est dit qu’est apparue la grâce de Dieu « apportant le salut à tous les hommes », aomfipioç -rôcaiv àv6pâ>Ttotç.

III. La tradition dans l’Église : le dépôt. — On peut dire que les principaux enseignements des Pastorales au sujet de l’Église se groupent autour de l’idée de dépôt, rcapaôrjxT). Le mot n’est employé que trois fois : I Tim., vi, 20 ; II Tim., i, 12 et 14, mais la doctrine qu’il résume revient à chaque page. Il exprime, par une métaphore juridique, la foi que l’Église a reçue du Christ par l’intermédiaire des apôtres et qu’elle doit conserver fidèlement.

Élymologie et usage du mot.

Le mot T-ocpaGyjxir)

vient de TtG7)o.i *rapà, « placer auprès » ; avec le datif de personne, « présenter, offrir à quelqu’un, placer sous sa garde ». Au moyen : remettre quelque chose de soi ou pour soi : cf. Luc, xii, 48 ; xxiii, 46 ; Act., xiv, 23, etc. D’où TrapaOyjXT), « ce que l’on confie, dépôt ». Le grec attique emploie plus fréquemment le double composé 7Tapa-xaT<x-0T ( xï), où xarâ renforce le sens de « déposer auprès » de quelqu’un. Dans le Pentateuquc, les Septante ont deux fois TCapa07)XT), Lev., vi, 2 et 7 (Hébr., v, 21 et 23) et deux fois Trapax<xTa0r)XT), Ex., xxii, 7 et 10. Dans les livres plus récents, 7rapaxaTa0ï)XT) semble l’emporter : Tob., x, 13 ; II Mach., iii, 10 et 15. Dans les papyrus, la forme courte est presque aussi fréquente que l’autre.

L’étude des textes de l’Ancienne Loi relatifs à la fidélité avec laquelle se doit garder un dépôt, la considération de la loi gréco-romaine sur le même sujet montrent bien la fidélité absolue que la religion, les lois et, avec elles, la conscience des moralistes et cille du peuple exigent de celui qui a reçu le dépôt. Il est tenu de le garder avec soin, de le mettre autant qu’il dépend de lui à l’abri de tout risque, de le rendre dans son intégrité. Il le rendra au jour fixé ou, à défaut d’échéance convenue, quand il plaira au maître. Cette fidélité est un devoir d’honneur, non moins que de justice. Le déposant a compté sur son ami pour mettre ses biens en sûreté, et celui-ci a accepté cette marque de confiance : désormais, la bonne foi, la loyauté, l’amitié lui imposent de se montrer fidèle à son engagement. En général le déstntére ~’nu ut et de règle ; la loi prévoit cependant des cas où des soins trop onéreux permettront de demande r au maître quelque compensation. Nous allons voir comment saint Paul a utilisé, du point de vue moral et dogmatique, les divers éléments de la riche notion de dépôt

Le dépôt dont saint Paul.

Paul emploie trois

fois le terme 7rapa0r, xr |( étranger au reste du Nouveau

Testament et chaque fois avec la formule ty ( v xapaOr, xr, v

9uXATTeiv, qui apparaît comme une expression conaa empruntée au langage Juridique des contrats de

dépôt.

1. Les textes.

Le premier texte se lit I Tim., vi, 20 : « O Timothée garde le dépôt ; évite les vains discours profanes et les objections d’une science qui n’en mérite pas le nom. Il est des gens qui, pour en faire profession, ont perdu la foi. » Sans relation directe avec les versets qui précèdent immédiatement au sujet des riches, vi, 17-18, mais rejoignant par dessus cette péricope, la solennelle adjuration de garder intact l’enseignement divin (12-16), cette recommandation est le trait final destiné à s’enfoncer profondément dans l’esprit de Timothée.

Paul revient sur le même sujet au commencement de la lettre suivante. Après avoir dit que le Christ l’a établi apôtre pour prêcher l’Évangile, il poursuit, II Tim., i, 12 : « C’est aussi la raison de mes maux. Mais je ne regrette rien : je sais à qui je me suis confié, et je suis sûr qu’il saura garder mon dépôt jusqu’à ce (dernier) jour. 13. Conserve le souvenir exact, Û710tÛ7twcav, des saines paroles que tu as entendues de moi dans la foi et la charité du Christ Jésus. 14. Garde le bon dépôt à l’aide du Saint-Esprit qui habite en nous. » Le sens du ꝟ. 14 est clair : le dépôt à garder est celui de la saine doctrine que Paul a transmise à Timothée, ainsi qu’il vient d’être dit. La recommandation « garde le dépôt » a donc exactement la même portée que dans la lettre précédente. Par contre cette expression se présente auꝟ. 12 sous un aspect un peu différent. Au lieu d’un dépôt que Paul a confié à Timothée et que celui-ci doit conserver, il s’agit d’un dépôt de l’Apôtre que Dieu gardera jusqu’au grand jour de la venue de Jésus-Christ. Dans cette manière de parler, l’expression TOxpaOïixif) (jlou semble désigner un bien qui est la propriété de Paul et dont il aurait remis le soin au Seigneur, non un trésor appartenant à autrui et dont Paul aurait la garde. De fait, un peu plus loin, il déclare ne plus attendre désormais que la couronne de justice que Dieu lui rendra « en ce jour-là ». II Tim., iv, 7-8. « Son dépôt » est donc celui de ses intérêts temporels et spirituels, sa personne, sa vie, le trésor de mérites qui lui vaudra de la part du juste juge la couronne, c’est-à-dire la récompense éternelle. Cette interprétation s’accorde bien avec l’exhortation qu’il vient de faire à Timothée de compter sur la puissance divine qui soutiendra son courage jusqu’à la fin. i, 7.

2. Contenu du dépôt.

D’après II Tim., i, 13-14, Timothée gardera le bon dépôt en conservant le souvenir exact des instructions de Paul. Le dépôt embrasse donc tout l’enseignement de l’Apôtre tel qu’il l’a transmis à ce disciple, héritier et continuateur de son apostolat. Il va de soi que ce dépôt comprend d’abord toutes les instructions renfermées dans les Pastorales. Bien qu’elles ne soient pour la plupart qu’un bref rappel de vérités déjà connues de tous les chrétiens, l’inventaire en est considérable et elles formeraient un catéchisme assez complet. Cependant, ce n’est pas à la doctrine exposée dans les Pastorales que se réfère directement Paul en parlant du dépôt, mais à renseignement qu’il a donné de vive voix. Cet enseignement a pour objet tout ce que le chrétien doit croire et tout ce qu’il doit faire pour être sauvé, la révélation tout entière du Christ. Il permettra à Timothée d’écarter toutes les nouveautés dangereuses, de démasquer les erreurs qui se présenteraient sous les di hors de la science et de la piété, de flétrir toute maxime ou toute pratique qui porterait atteinte à la pur. té des nirrurs. !. s vérités ainsi transmises a Timothée n’ont d’ailleurs rien de Ment et ne constituent pal une doctrine ésotérique réservée a quelques initiés. Biles ont été enseignées à Timothée publique* ment et en pi ésence de tous. II Tim., ii, 2, il doit à son tOUI les prêcher en plein jour et à tous et les Lmpo l I < tous.