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THOMAS D’AQUIN : RÈGLES HERMÉNEUTIQUES


utile pour notre instruction. » In Joa., c. xviii, lect. 4, p. 464 ; cf. Ad Rom., c.xii, lect. 3, p. 179.

Le bon sens.

Le cas précédent montre qu’une

intelligence trop étroite de la lettre aboutit à l’erreur. Une saine psychologie est indispensable à l’exégètc, et saint Thomas lui doit peut-être le meilleur de ses interprétations. Lorsque Jésus, par exemple, se retourne vers les deux disciples qui le suivent, Joa., i, 38, le sens littéral donne à entendre que ceux-ci marchant en arrière, ne pouvaient voirie visage du Maître, c’est pourquoi celui-ci doit se tourner vers eux pour les encourager à l’aborder. P. 67. La contre-épreuve est décisive ; il n’y a rien de déraisonnable dans l’Écriture : Hsec exposilio in hoc videtur deflecre, quod asserit quazdam per Scripluram sacra intelligi, quorum contraria salis evidenlibus rationibus probantur. De pot., q. iv, a. 1, ad 5um.

Les genres littéraires.

Saint Thomas a eu nettement

conscience de la forme ou du « genre » littéraire des écrits bibliques et de la nécessité d’en tenir compte dans le commentaire. Saint Bonaventure parlait de causa formalis sive modus agendi, certitudinalis, In Joa., éd. Quaracchi, t. vi, p. 237, et Albert le Grand de modus agendi nunliativus est…, In Joa., éd. Borgnet, t. xxiv, p. 9 ; cf. pseudo-Thomas, Expositio in Danielem, éd. Vives, t. xxxi, p. 196. Saint Thomas dans son Principium de bachelier sententiaire le désigne plus clairement par modus loquendi (cf. supra, col. 7Il sq.), mais ailleurs il emploie la formule courante : le modus agendi que l’on identifie à la cause formelle. Dans le prologue du Psautier, il énumère les diverses formes du langage humano-divin : narration, admonition, commandement, exhortation, prière, louange, discussion : Modus seu forma in sacra Scriptura multiplex invenitur : narrativus… et hoc in historialibus libris invenitur. Admonitorius et exhortatorius et pr/e< ; i : ptivus… Hic modus invenitur in Lege, prophetis et libris Salomonis. Disputativus et laudativus, et hoc invenitur in libro isto ; quia qnidquid in aliis libris prædiclis modis dicitur, hic ponitur per modurn laudis et orationis. Éd. Vives, t. xviii, p. 228 ; cf. p. 610.

Le récit de la chute est une narration historique. I », q. en, a. 1. Le genre littéraire des prophètes se caractérise par des images : Procedit [Jeremias] per simililudines cl figuras, qui proprius modus prophetarum est. Éd. Vives, t. xix, p. 66. Est [liber Lamentalionis] involulus varielate similitudinum, sicut et cœteri prophetarum libri, ibid., p. 199 ; la doctrine de saint Paul est exposée per modum cpistolarum. Marietti, t. i, p. 3. Le livre de Job rapporte une histoire vraie et n’est pas une parabole. In Job, éd. Vives, t. xviii, p. 3. Les livrer lapie&tlonx, au contraire, sont écrits en paraboles ou proverbes. In Joa., c. xvi, lect. 7, ꝟ. 25, p. 435, qui sont du sens littéral métaphorique. I", q. i, : i 10, ad 3° m. À propos de l’enseignement du Christ, saint Thomas a cette excellente remarque :

Proverbium autem dicitur proprie quand" loco ail crins ponitur aliud, cum scilicet uuum verbum ex SimilitUdrne alterius datur intelligi : qund etiam parabola dlcltut.Loquebatur autem ex provcrblls Domlnua primo quJdera pn malos, ut mysteri : > rc^ni oœlestls ois occultant… secundo ver-) propter bonos, ut ex proverblli exercerentur ad Lnquirendum ; unde postquam Dominas turbis proverbia seu parabolas proposait, discipuli seorsum Chriitum interroga-Ignorantia autem quaj provenlebal es proverblli a Cbristo propositls, utllis quidem eral et damnosa. Scd utllis bonis et jusiis ad exercitium in Del laudem rniarentlbus : n.im dura ea non intelligunt credunt, Klorilic o, t Dominura et eius saplentlam s>ipr.i se existentesn.* Damautem malis, quia non Intelligentes, blasphémant. In Joa., c., lect. 2, y. fj, p. 281.

Ces genres littéraires préalablement discernés ml

ne clef pour l’exégèse. Une fol reconnu pat exemple, aint Matthieu a écrit son évangile pour les i’iif

et qu’il s’est donc conformé aux coutumes de ce peuple, on comprend que son ouvrage soit intitulé d’après le premier sujet traité, une généalogie, et que la première phrase ne comporte pas de verbe, puisque tel est l’usage des écrits prophétiques. In Matth., Marietti, p. 6. Dans le prologue du Psautier, saint Thomas précise l’herméneutique des « figures » prophétiques :

Prophétise autem aliquando dicuntur de rébus qua ; tune temporis erant, sed non principaliter dicuntur de eis, sed in quantum figura sunt futurorum ; et ideo Spiritus sanctus ordinavit quod qando talia dicuntur, inserantur quædam quæ excedunt conditionem illius rci gestse, ut animus elevetur ad figuratum. Sicut in Daniele multa dicuntur de Antiocho in figuram Antichristi : unde ibi quædarn legnntur quæ non sunt in eo compléta, implebuntur autem in Antichristo. Éd. Vives, t. xviii, p. 230.

L’intention de l’écrivain inspiré.

Dire que l’exégèse

vise à l’intelligence correcte du texte biblique, recte accipitur, Quodl., vii, a. 15, c’est dire avant tout que son principal souci sera de retrouver le sens que l’auteur avait eu en vue ; cette règle formulée par Augustin, Super Gen. ad litt., P. L., t. xxxiv, col. 262, est soigneusement observée par saint Thomas qui s’en inspire toujours pour décider entre plusieurs interprétations possibles : Et hoc magis facil ad intentionem Aposloli, In I Tim., c. ii, lec. 1, p. 193 ; Licet hase leclura (ce commentaire) sustineri possit, non tamen est secundum intentionem Aposloli. Ad Gai, c. iv, lect. 4, p. 572. Commentant Rom., iii, 4, où est cité le Ps. L, 6 : « Afin que tu triomphes lorsque tu seras jugé > saint Thomas se réfère à d’autres exégèses de ce texte rapportées par la Glose, mais qui ne peuvent coïncider avec « l’intention de l’Apôtre », parce qu’elles ne tiennent pas compte de la citation ; c’est ce que démontre le ꝟ. 5 où la pensée de Paul est nette, et ce contexte permet de traduire ut vincas comme final et non comme consécutif, Marietti, p. 46-47. L’interprétation de Rom., iii, 9 par la Glose n’est pas davantage acceptable pour la même raison : Hsec responsio non videtur esse omnino secundum intentionem Apostoli quia infra ostendet quod… Ibid., p. 48 II y a donc une coïncidence exacte entre le sens littéral et cette intention de l’auteur : Ilvec expositio est lilteralis et secundum intentionem Apostoli, Ad Rom, c. iv, lect. 1, ?. 4, 5, p. 58 ; si bien que l’exégète en vertu de ce critère est non seulement autorisé à choisir entre les interprétations traditionnelles, mais encore à en proposer hardiment une nouvelle : Ex utraque hurum exposilionum ( Augustini et Ambrosii) potest conflari lertia. quæ magis videtur ad intentionem Apostoli pertinerc Ibid., c. v, lect. 4, v. 13, p. 76.

Le contexte.

Comme quelques-unes des précédentes

citations le déclaraient expressément, c’est le contexte qui permet de déterminer avec sécurité le sens littéral et l’Intention de l’auteur. C’est ce qu’avait déjà enseigné saint Augustin, Super Gènes, ad lit !.. P. L., t. xxxiv, col. 262, et après lui Richard de Saint-Victor : Dcbemus semper in hufvamodi ex ctnumstantta lilteræ scnstim auctoris perpendrrr ri assignare. DecL nonn. diffic, P. L., t. c.xc.vi, col. 2<>. r > ; cꝟ. 614. Saint Thomas formule à son tour cette règle : l.e sens littéral ic détermine par l’aveu « lu contexte, ealva circumstantia Httcræ.Dc pot., q, iv. a. 1 : cf. a. 2, fin), et l’applique. Lorsque Paul dit aux Galales : » Vous observe/, les jours, les mois, les temps et les années i, Gal., iv, 10, on peut penser à une curiosité astrologique qui relève de l’idolâtrie, mais, répond le commentateur, comme en tout ce qui précède et ce qui suit, il est question du retour des Calât c a l’observance de | ; i Loi. il est pin conforme au sujet même de l’épître de voir ici une allusion aux observance* légales, p. 572.’i" I.r sti/le rt 1rs lu’hmismrs. La sainte l’eriture a

des manières de l’exprimer qui lui ion1 propn