Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 15.1.djvu/240

Cette page n’a pas encore été corrigée
465
466
THÉOLOGIE. LA THÉOLOGIE POSITIVE


rien qui lui soit objectivement étranger. S’il y a, dans l’Église et tout au cours de son histoire, des « révélations », celles-ci n’ajoutent objectivement rien a la connaissance du mystère de Dieu ; elles sont ou bien une lumière donnée soit à la hiérarchie, soit aux Pères, soit à l’Église dans son ensemble, pour une intelligence nouvelle et plus profonde de l’enseignement révélé, ou bien des « révélations privées » concernant la vie de l’Église, l’orientation de la piété, les fondations ou la conduite des âmes. Cf. J. de Ghellinck, Pour l’histoire du mot « revelare, », dans Recherches de science relig., 1916, p. 149-157 ; J. van I.ee, Les idées d’Anselme de Havclberg sur le développement du dogme, dans Analecta Præmonstralensia, t. xiv, 1938, p. 5-35 ; J. Ternus, Vom Gemeinschaftsglauben der Kirche, dans Scholaslik, t. x, 1935, p. 1-30 ; M.-J. Congar, La crédibilité des révélations privées, dans Vie spir., octobre 1937, Suppl., p. 29-48.

C’est pourquoi, dans la continuité de la « tradition », entendue au sens d’enseignement révélé transmis par l’Église, il y a lieu de faire une distinction entre la Iraditio consiitutiva, qui est renseignement-révélation des prophètes, du Christ et des apôtres, la trad.tio continuativa, enfin ajouterons-nous dans toute la mesure que réclame le fait du développement doctrinal, la iraditio explicativa, qui est la proposition, la conservation, l’explication et le développement par l’Église du népôt primitif. La traditio consiitutiva étant formée par l’apport révélateur des prophètes, du Christ et des apôtres, sans préjudice des sine scripto tradiliones, est laite principalement de l’Écriture sainte de laquelle les Pères anciens faisaient dériver toute la substance doctrinale de la Paradosis ecclésiastique. Quant à la trad.tio continuativa et à Y explicativa, elles consistent dans la proposition fidèle et l’explication progressive du dépôt, telles qu’elles se sont produites dans l’Église animée et dirigée par l’Esprit du Christ, depuis la Pentecôte jusqu’à nous. C’est ce témoignage social, selon toute sa réalité concrète et son développement successif, qui est l’objet ou la matière de la théologie positive. B.-M. Schwalm, Les deux théologies : la scolaftique et la positive, dans Revue des sciences philos, et théol., t. ii, 1908, p. 674-703 ; cf. M. Blondcl, Histoire et dogme, dans La Quinzaine, 16 janvier, 1 er février et 15 février 1904.

L’objet de la positive, c’est donc la tradition, c’est-à-dire l’enseignement transmis depuis le Christ et les apôtres jusqu’à nous par l’Église et qui s’est développé, quant à ses expressions et quant à l’intelligence que l’humanité croyante en a prise, petit à petit, jusqu’à nous, et qui est vivant dans l’enseignement de l’Église actuelle : id quod traditum est, id quod traditur. La théologie positive, c’est la sacra doclrina en tant qu’elle prend conscience de son contenu acquis. Llle trouve son objet dans les expressions, d’abord de l’Église actuelle, puis de l’Église totale en la continuité vivante de son développement (traditio continuativa et explicativa), enfin dans les sources qui, expression de la traditio constitutiva, sont la règle intérieure de la Paradosis ecclésiastique. Ainsi l’objet quod de la positive, c’est le témoignage total sur le mystère de Dieu, tel que, porté par les prophètes, le Christ et les apôtres, il existe, est conservé, interprété, développé <t proposé dnns et par l’Église du Christ et des apôtres, dans et par l’Église une et apostolique.

3° L’objet formel t 7110° ou la lumière de la théologie positive. Connaissance d’un enseignement révélé, la positive est théologie ; connaissance scientifique de nement, non dans le pur aurtltus fldel, mais dans unr recherche et une Interprétation des documents de lu tradition ecclésiastique, la théologie posl tive est une œuvre rationnelle. Seulement, la raison quie » t Ici associée à la fol n’est plus proprement la

raison spéculative : c’est la raison qui fait face aux documents bibliques et historiques où s’exprime la tradition ecclésiastique. La lumière de la positive est donc théologique, c’est-à-dire la lumière de la Révélation en tant que, au delà de la simple adhésion de la foi, elle rayonne dans la raison humaine, en utilise l’activité en vue de procurer un état humain, rationnel et proprement scientifique de l’auditus ftdei. Cette notion, de soi fort simple, peut s’expliciter en ces trois propositions :

1. La positive est une théologie, non une histoire. — L’histoire des doctrines bibliques et celle des doctrines chrétiennes ont matériellement le même objet que la théologie positive, mais elles regardent et atteignent cet objet sous une lumière et selon des critères différents. Nous pouvons avoir, du donné chrétien, une connaissance formellement naturelle et historique : histoire du peuple d’Israël, histoire des doctrines bibliques, histoire des doctrines chrétiennes. Ce n’est pas une telle connaissance, formellement rationnelle et historique, du donné, qui peut fournir à la théologie ses principes. Car, dans ce cas, il y aurait, entre le révélé et la théologie qui doit en être une interprétation rationnelle, une rupture de continuité : au point de vue noétique ou épistémologique, on changerait de genre ; cf. A. Gardeil, Le donné révélé et la théologie, p. 197 sq., 210-211. La théologie doit, pour rester la science de Dieu révélé, s’aboucher à son donné et connaître ses principes dans une lumière formellement théologique, avec des critères théologiques. C’est pourquoi la théologie positive est formellement différente de l’histoire des doctrines chrétiennes. Cf. A. Lemonnyer, Théologie positive et théologie historique, dans Revue du clergé français, mars 1903, p. 5-18 ; Comment s’organise la théologie catholique ? ibid., octobre 1903, p. 225-242 ; M. Jacquin, Question de mots : histoire des dogmes, histoire des doctrines, théologie positive, dans Revue des sciences philos, et théol., t. 1, 1907, p. 99-104, et cf. Ibid., p. 344 sq. ; B.-M. Schwalm, art. cité ; A. Gardeil, Donné révélé, p. 207 sq., 288 sq. ; G. Rabeau, Introduction à l’étude de la théologie, p. 153 sq.

2. La théologie positive, étant théologie, s’élabore en dépendance du magistère de l’Église. — Il s’agit, en effet, pour elle, de trouver et d’interpréter des documents et de connaître un passé en tant que documents et passé témoignent du mystère de Dieu révélé. Aussi est-ce le magistère qui seul peut dire quels sont les documents ou les hommes qui témoignent du révélé, et la valeur respective de leur témoignage. Pour l’Écriture, c’est bien clair. Le canon en est l’œuvre de l’Église, en sorte que l’Écriture n’existe pour nous comme Écriture, c’est-à-dire comme écrit inspiré et expression de la Parole de Dieu, que dans l’Église et grâce à la déclaration qu’en fait l’Église. De même est-ce l’Église qui possède le sens de l’Écriture, l’Église totale, celle d’aujourd’hui aussi bien que celle du passé. Aussi l’Église demande-t-elle qu’on interprète l’Écriture selon le consensus Palrum, la tradition de l’Église. Denz., n. 786 et 2146, et voir ici l’art. Interprétation de l’Écriture, col. 2294 sq,

3. S’il s’agit des Pères et des théologiens, c’est de l’approbation de l’Église, approbation qui peut d’ailleurs revêtir bien des formes, qu’ils tiennent, pour le théologien, leur aleur de témoins du donné chrét ien : Ipsa doclrina catholtcorum doctorum ab Eeelesia auctorilatem habel. Unie mugis standum est auctorttait Ecciasiet quani audorltati ml Augusltnt, vel Hteronymt, vel

ciijtisctimqiir dorloris. S. Thomas, Suin. theol., II*-II", q. x. a.)’2. Ceci se marquera Immédiatement dans le travail du théologien positif pour lui donner Uni une oriental ion. des critères différents de ceux du pur historien. Pourquoi, dans l’Hirit lire, ne cherehera-t-il PUS son donne dans le / V » Livre d’1 sdftU 0Il dans