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T H É I S M E — THÉMISTIUS


rejette a priori toute intervention de la Cause suprême dans sou œuvre. Au rebours, le théisme admet cette intervention. Sans doute reconnaît-il que, par son seul labeur, la raison humaine peut arriver à la connaissance de Dieu, de son existence, de ses attributs, de son action et tout particulièrement de sa providence. Mais, ceci posé, il laisse ouverte la question de la possibilité des rapports entre Dieu et son œuvre. Cette œuvre, la Cause suprême ne la dirige pas seulement par les lois générales de la nature ; elle domine d’assez haut tout le système des causalités qui dérivent d’elle pour qu’il lui soit loisible d’y intervenir, même au détriment du déterminisme des lois naturelles ; en d’autres termes, le théisme admet la possibilité du miracle. Tout spécialement il reconnaît la possibilité de ce miracle d’ordre psychologique qu’est la révélation : Dieu par des procédés divers, d’ordre extérieur ou d’ordre intérieur, fait s’épanouir dans une conscience humaine des pensées, spéculatives mais surtout pratiques, auxquelles n’aurait pas abouti d’emblée le psychisme humain. En d’autres termes le théisme est avant tout interventionniste. C’est le théisme qui constitue le substratum sur lequel s’édifie ultérieurement la théologie du révélé. C’est l’exposé général du théisme qui est fait ici à l’article Dieu, aux articles Attributs divins, t. i, col. 2223-2235 ; Création, Miracle, Révélation.

É. Amann.
    1. THÉMISTIUS##


THÉMISTIUS, diacre d’Alexandrie et chef de la secte des agnoètes (vie siècle). — On est mal renseigné sur les circonstances de sa vie. Selon Libératus, il était déjà en fonction sous le patriarche antichalcédonien Timothée III (518-535) et c’est à celui-ci qu’il aurait soumis d’abord ses idées sur « l’ignorance » où l’humanité du Christ aurait été de certaines choses. Breviarium, c. xix, P. L., t. lxviii, col. 1034. Repoussé par le patriarche, il aurait fait schisme. Selon le pseudo-Léonce, De sectis, act. V, c. iv-vi, P. G.. t. lxxxvi a, col. 1232, cette altercation doctrinale se serait produite non point avec Timothée, mais avec son successeur Théodose (voir ci-dessous, col. 325), alors que celui-ci était déjà en résidence à Constantinople, donc après 536 ; c’est dans la capitale que le schisme aurait éclaté, les partisans de Thémistius s’étant alors séparés de la communion de Théodose. Les deux données ne sont pas absolument incompatibles ; la première discussion a pu avoir lieu à Alexandrie, au temps de Timothée, amenant une certaine fermentation ; Thémistius a pu néanmoins èlre du nombre des clercs de tout grade qui, de bonne grâce ou contraints, accompagnèrent Théodose à Constantinople, où se serait produit l’éclat définitif entre le patriarche et son diacre. Ces discussions eurent leur écho à Alexandrie, où un certain nombre de personnes se rallièrent aux idées de Thémistius. Il restait encore de ces thémistiens ou agnoètes au temps du patriarche melchite, saint Euloge (581-608), qui discuta leurs arguments et fut de ce chef félicité par le pape saint Grégoire. Voir Episl., X, xxxix, P. L., t. lxxvii, col. 1096. Cette lettre est de 600, on n’y trouve plus la inoindre allusion à Thémistius qui devait être mort depuis assez longtemps.

Les idées du diacre et leur genèse nous sont mieux connues. À rencontre de la théologie, plus ou moins teintée d’eutychianisme, que soutenait Julien d’Halicarnasse, Thémistius était rallié au monophysisine modéré (presque verbal) de Sévère d’Antioche ; avec ce dernier il admettait que l’humanité du Christ, étant consubstanlielle à la noire, avait été affectée des mêmes indigences que nous, avait été capable de souffrances réelles, avait été sujette à la corruption et à la mort. Mais il poussait jusqu’au bout les conséquences que lirait Sévère de ce principe incontestable.

Les déficiences de l’humanité, ce ne sont pas seulement celles tle la chair, mais celles de l’esprit : la connaissance humaine est vite au bout de ses limites. Il n’en a pas été autrement dans le Christ ; bien que son savoir ait de beaucoup dépassé le nôtre, il avait, comme le nôtre, ses lacunes, ses ignorances : plusieurs passages de l’Évangile le montraient bien : Jésus demandait où l’on avait mis le corps de Lazare, Joa., xi, 34, c’est donc qu’il ne savait pas où se trouvait le cadavre ; chose plus grave, il avait solennellement déclaré que, « pour ce qui était du jour et de l’heure du jugement dernier, nul ne le savait, ni les anges, ni le Fils lui-même, mais le Père seul ». Marc, xiii, 32. A la vérité, Thémistius n’était pas le premier à relever ces textes relatifs à « l’ignorance » du Sauveur ; les ariens les avaient mis en avant et, en leur temps, I <, Pères avaient répondu à leurs difficultés ; plusieurs, et non des moindres, avaient reconnu cette « ignorance » en la mettant au compte de l’humanité du Christ. Pour qui admettait la doctrine des deux natures il n’y avait point ici de difficulté insurmontable. Mais Thémistius, il ne faut pas l’oublier, était monophysite : s’il n’y a plus, après l’incarnation, qu’une seule nature, la nature divine en laquelle s’absorbe la nature humaine, s’il n’y a plus — et Thémistius le reconnaissait — qu’une seule « opération », attribuer l’ignorance au Verbe incarné, c’est faire entrer l’ignorance dans la divinité même. Néanmoins il ne faut pas perdre de vue que le monophysisme sévérien est plus verbal que réel. C’est en paroles surtout que l’on y maintient la iztoc cpùeriÇToij 0eoo Aôyou aecrapxto|j.évT, ; dans la réalité, Sévère et Thémistius admettaient, tout comme les chalcédoniens, que l’humanité du Christ était créée comme la nôtre et possédait toutes les caractéristiques que nous possédons nous-mêmes ; s’ils ne voulaient pas dire qu’elle était une cpôtnç distincte de la cp<jat.ç divine, c’est que, faisant de cpuaiç le synonyme absolu d’ijTc60Taatç, ils craignaient de tomber dans le « nestorianisme », comme le faisaient, disaient-ils, les chalcédoniens. Pour inconséquente que fût leur doctrine, les sévériens admettaient des déficiences possibles dans l’humanité du Christ. Toute la question était de savoir jusqu’où allaient ces déficiences ; Sévère et Théodose s’arrêtaient aux déficiences de la chair, Thémistius admettait les limitations de la connaissance. C’étaient surtout des arguments de fait qu’il faisait valoir et il n’en avait guère de nouveaux à produire. Le diacre paraît avoir été un écrivain fécond ; mais de cette production il ne nous reste plus que des titres et quelques fragments. Dans le dossier de la controverse monothélite rassemblé avant le concile du La tran de 649 et qui fut également employé pour le VIe concile œcuménique, il est question, à plusieurs reprises, d’un tomos adressé par Thémistius à l’impératrice Théodora, en réponse à un mémoire qu’avait composé, à l’intention de la souveraine, le patriarche Théodose. Mausi, Concil., t. x, col. 1118 ; t. xi, col. 440 D où l’écrit est appelé dcvupp-rçTixôç xaxà toù t6jj.ou BeoSoatau ; c’est le même écrit qui est déjà signalé par Maxime le Confesseur, Dialog., P. G.. t. xci, col. 172. Maxime connaît aussi un autre traité (TipaY(i.aTcta), qu’il faut identifier avec le « Traité contre Collulhus », cité dans le dossier du Latran, Mansi, t. x, col. 1118 ; ce Colluthus, un personnage de l’entourage de 4’héodose, avait écrit, au nom de son patriarche contre Thémistius. lhid., col. 1121. Le même dossier signale aussi une » Épître dictée par lui (Thémistius) pour les Salamites » ; une « Lettre adressée au prêtre Marcel et au diacre Etienne » ; un « Discours abrégé dédié au moine Charisius » ; une « Réponse à ce que lui avait écrit Constant, évêque de Laodicée » : une dissertation LTpôç toùç XsyovTocç, ôrt Sià tô [il<xv eïvai 6eoTrpe7T7] -ajv èvépysiav toù Xpicrroû