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    1. SYRO-MALABARE (ÉGLISE)##


SYRO-MALABARE (ÉGLISE). JUSQU’AU SYNODE DE DIAMPER

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cèses exotiques, dont la dotation fut généralement assurée grâce aux revenus de l’Ordre du Christ : c’est l’origine du Padroudo (Patronat), dont l’influence sur les missions a été parfois avantageuse, souvent aussi discutable.

Les premiers missionnaires du Proche-Orient, les fameux « pérégrinants du Christ », dominicains et franciscains, français, italiens, allemands, étaient entrés en contact avec les dissidents, progressivement, en partant des communautés indigènes catholiques constituées au cours des croisades. Les missionnaires qui arrivèrent directement du Portugal au.Malabar, plus tard en Ethiopie, arrivaient de but en blanc au milieu de communautés, dont ils ne savaient rien, ni la langue, ni la liturgie, ni l’histoire, communautés qui n'étaient pas flanquées, à droite et à gauche, d’autres communautés chrétiennes, hérétiques ou schismatiques les unes par rapport aux autres. Les communautés, nestorienne du Malabar et monophysite d’Ethiopie, étaient dans leurs milieux respectifs les seules qui représentassent le christianisme. Il était normal que les premiers temps fussent de bon voisinage : on était trop heureux de se retrouver entre chrétiens au milieu de majorités païennes ou musulmanes ! Mais assez vite les missionnaires portugais s’aperçurent des divergences doctrinales, se scandalisèrent des différences rituelles. Ils voulaient le règne de Dieu et, convertissant les païens à la vraie foi, ils ne pouvaient tolérer que des chrétiens, à côté d’eux, errassent dans leurs croyances ou pratiquassent une liturgie douteuse. D’autre part, au moment où Vasco de Gama organisait définitivement les premiers établissements portugais des Indes, l'Église syro-malabare avait une hiérarchie convenablement pourvue : un métropolite, Mar Yahballâhâ, et trois évêques suffragants, Mar Denha, Mar Jacques et l'évêque envoyé deux ans avant eux de Mésopotamie, Mar Jean, qui vivait encore. Ces quatre prélats, étant d’origine mésopotamienne, étaient très attachés au catholicosat de Séleucie-Ctésiphon ; par contre, ils ne semblent pas avoir été des partisans très fanatiques de l’hérésie nestorienne. Les chrétiens qu’ils avaient à gouverner formaient, d’après la lettre déjà citée, un ensemble de 30 000 familles, dispersées dans une vingtaine de villes et de nombreux villages, dont le plus grand nombre se trouvaient dans la chaîne des Ghats occidentaux, ce que les documents italiens appellent habituellement la Serra, à huit jours de distance de Cananore, sans parler de la communauté plus distante de Mylapore. J.-S. Assémani, op. cit., p. 594.

Les chrétiens « syriens », pour échapper aux vexations des musulmans, s'étaient présentés à Vasco de Gama, dès 1503, en demandant de passer sous sa protection. Ils ne pensaient pas que cette démarche pût avoir quelque influence sur la vie de leur Église. Mais, les expéditions portugaises ayant pour but d’interrompre le trafic entre les Indes et l’Egypte, où le commerce vénitien s’approvisionnait en épices, l'élimination des navigateurs arabes, les progrès des armées turques, la réduction et le contrôle très strict de la navigation dans le golfe Persique eurent pour effet de couper la hiérarchie indienne de sa base. Rien d'étonnant, par suite, à ce qu’aucune nouvelle arrivée d'évêques ne soit mentionnée pendant la première moitié du xvi c siècle. Et pourtant, des cinq prélats connus, Mar Jean, encore vivant en 1503, semble être mort peu après ; de Mar Yahballâhâ et de Mar Denha, dont on ne sait rien de positif, il semble bien qu’ils ne durèrent guère. Mar Thomas s’occupa des chrétiens de l’extrême sud de l’Inde et, après avoir été soupçonné d’hérésie, mourut après 1536, dans le sein de l’Eglise catholique. Quant à Mar Jacques, s'étanl conformé en partie au moins à la liturgie romaine, ayant

réussi, non sans luttes, à maintenir sa position contre des missionnaires trop entreprenants, comme Alvaro Penteado, il finit par se retirer au couvent des franciscains de Cochin, peut-être dans une retraite forcée, et c’est là que saint François-Xavier le trouva encore vivant en 1549. G. Schurhammer, Thrce letters o[ Mar lacob bishop oj Malabar 1503-1550, dans Gregorianum, t. xiv, 1933, p. 62-80, repris dans The Malabar Church and Rome during the earhj Portuguese period and before, Trichinopolꝟ. 1934, p. 1-24. Le saint missionnaire pérora auprès de Jean III la cause du vieil évêque « qui a bien servi Dieu et votre Altesse en ces contrées pendant quarante-cinq ans, vieillard vertueux et saint ». Mar Jacques avait bien mérité cet éloge par sa politique conciliante, certainement avantageuse pour les Portugais, et surtout en aidant les franciscains à fonder à Cranganore, en 1541, un collège qui réunit bientôt les enfants des meilleures familles syromalabares et comptait plus de cent élèves au moment où saint François-Xavier le visita, Monumenla Xaveriana, t. i, dans Monum. hist. S. J., fasc. 74, p. 480 sq., 511.

Peu soucieux, à ce qu’il semble, des droits de la hiérarchie mésopotamienne, Alphonse d’Albuquerque, dès 1503, avait confié à un dominicain nommé Rodrigue les intérêts spirituels des nestoriens de Quilon (Coulam) ; en 1515, on signale que douze mille d’entre eux avaient renoncé à leurs erreurs ; en 1516, d’autres conversions eurent lieu à Mylapore. A.-R. de Rragança Pereira, Historia religiosa de Goa, dans O Oriente portugnês, fasc. 2-3, 1932, p. 34 sq., et tirage à part, t. i, fasc. 1, Rastora, s. a. Le P. Schurhammer a réuni dans l’article cité, p. 81-84, plusieurs textes qui montrent avec quel sans-gêne le clergé portugais voulait imposer ses usages aux syriens. Saint François-Xavier montra plus de doigté : bien que son ministère ait été tout d’abord orienté vers de pauvres chrétiens de la Côte des pêcheurs, qui n’avaient de chrétien que le nom, il ne resta pas étranger au groupe si important des « syriens », dont il eut occasion de visiter les centres principaux, Quilon, Cochin, Cranganore, Travancore. On serait tenté de penser qu’il a choisi en pensant à eux — prêchant non à eux, mais dans leur région — l’invocation à la vierge « sainte Marie, mère de JésusChrist, Fils de Dieu », sur laquelle il insiste en écrivant à ses confrères de Rome, comme s’il avait redouté d’offenser les oreilles d’anciens nestoriens, récemment convertis de leurs erreurs. Monum. Xaveriana, t. i, p. 273 sq., 283.

Aucun écho de controverses religieuses entre les Portugais et les chrétiens indigènes pour le premier demi-siècle de l’occupation. Il est vrai que, les nouveaux venus ignorant le malayalam et traitant généralement leurs affaires par l’intermédiaire de musulmans, il ne se présentait pas d’occasion où l’on dût discuter religion. C’est seulement lorsque FrançoisXavier eut composé un catéchisme en malayalam, et surtout lorsqu'à sa demande un inquisiteur fut installé à Goa, que l’exactitude des formules dogmatiques dont se servaient les chrétiens de Saint-Thomas vint à être examinée d’un peu plus près.

Toutefois, c’est plutôt sur le terrain de la juridiction que les oppositions devaient d’abord se produire. Les marins portugais avaient, comme on l’a dit, l’intention d’assurer à leur pays le monopole du commerce entre les Indes et l’Europe ; les ecclésiastiques partis avec eux des rives du l'âge n'étaient pas moins férus d’idées absolutistes. Calixte III, par sa bulle Inter c ; vlent du 13 mars 1455, Bullariiun patronatus Portugallise, t. i, Lisbonne, 1868 p. 36 sq., avait concédé au grand-prieur de la Milice du Christ juridiction sur toute l’Afrique, à partir du cap Roiador, et sur les régions méridionales de l’Asie. Privilège, qui, pour