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SYRIENNE (ÉGLISE). DOGMATIQUE


in ipso Verbum inhabitavit. Unde non homo factus Deus creditur, sed Deus factus homo : Neque homo est sapiens, qui ex operibus suis justificatus sit, neque de cœlo sibi corpus attulit neque apparenter aut phantastice visus est in mundo : sed una ex personis sanctse Trinitatis, quum Deus natura sit, de sublimibus cælis suis descendit, et homo pro gratia sua facta est et nata fuit ex Virgine et incarnata, sicuti apostolorum (ides docet. Itaque duae sunt in Domino nostro natune deitas et humanitas ; unio quoque deitatis sus cura humanitate admirabilis est et ineflabilis absque commixtione, sine confusione, sine mutatione, sine conversione, sed salvis distinctionibus utriusque naturoe in uno Filio et in uno Christo.

Jusque-là la doctrine de Barhebrœus est orthodoxe ; mais ne pouvant mettre une distinction entre les mots nature et personne, il ajoute : Una hypostasis, una uolunlas, una virtus, una operalio, quemadmodum S. Alhanasius et S. Cyrillus dixere : C’est toujours la grande difficulté des jacobites qui ne peuvent abandonner la fameuse formule una Verbi natura incarnata. Cf. Assémani, Bibl. orient., t. ii, p. 276-277 ; revue AlMachriq, t. i, 1898, p. 607.

L’union hypostatique est admise par les jacobites ; mais ils ajoutent que c’est une union physique xocxà epûatv. Barhebrœus dit que c’est par là qu’ils se distinguent des chalcédoniens. Cf. Le candélabre…, base IV, c. v, ms. cité, fol. 361-362, et ici art. Sévère d’Antioche, t. xiv, col. 1996 sq. En un mot, ils admettent au fond la doctrine catholique, mais ils sont des révoltés, des schismatiques puisqu’ils ne se sont pas soumis au concile de Chalcédoine.

Avec le temps on retrouve des infiltrations eutychiennes dans l'Église jacobite de Syrie, voir Monophysisme, t. x, col. 2236.

Pour ce qui est de la volonté et des opérations du Christ, les auteurs jacobites, admettant dans le Christ une âme raisonnable et un corps parfait comme les nôtres, auraient dû admettre une volonté humaine et des opérations humaines distinctes de la sagesse divine et des actes divins.

Philoxène de Mabboug dans son traité De Trinilate et de incarnatione, éd. et trad. Vaschalde, p. 125, donne un long exposé d’où l’on peut prouver que le Christ a eu des actions humaines telles que les décrit et les professe la théologie catholique. Opposant les expressions anthropomorphiques employées par l’Ancien Testament en parlant de Dieu, aux termes de l'Évangile où il est question du Verbe incarné, il écrit :

Verba superius allata figurativa sunt, nam ibi non scriptum est Deum revelatum esse in carne, sed in igné vel in lumine vel in nube vel in forma humana. Unaquæque harum revclationum fuit similitudo naturalis non autem natura vera ; quia per lias rovelationes hoc tempore curavit doctrinam ad extra tradere, non autem voluit in se naturam humanam denuo creare et renovare. Hoc enim novissime elïectum est per inhumanationem ex Virgine… Etenim, ut evidens est, ille quie Virgine natus est, prius in ea factus est et deinde ex ea natus, et, sicut scriptum est, etiam suxit lac, et circumcisus est, et pannis involutus est, et positus est in præsepio, et crevit in statura secundum carnem, et esurivit, et sitivit, et laboravit, et fatigatus est, et somniavit, et dormivit, et maîstus fuit, et contristatus est, et timuit, et turbatus est, et apprehensus est a crucifixoribus, et pavit, et despectus est, et spuerunt in faciem ejus, et caput ejus arundine percusserunt, et passus est verbera, et, quemadmodum dixit Apostolus, factus est pro nobis maledictum, id est rêvera crucifixus est, passus et mortuus. Et quia pœnas contra nos lege decretus pro nobis dédit, potuit etiam nos onines a maledicto legis liberare. Hcec omnia qute scripta sunt, vera sunt, et sicut leguntur intelligenda, p. 125-126.

Il ne restait plus à cet écrivain après toutes ces affirmations qu'à tirer la conclusion catholique : le Christ a eu des actes humains et par conséquent, il avait une volonté humaine et des opérations humaines puisqu’il avait un corps parfait et une âme humaine

parfaite. On peut exiger d’eux ce développement progressif du dogme alors que les premiers écrivains de leur Église n’eurent pas à discuter le problème de la volonté et des opérations humaines du Christ distinctes de la volonté divine du Verbe qui est la volonté unique des trois personnes de la sainte Trinité. La plupart des écrivains jacobites ont essayé de maintenir intactes les affirmations de leurs devanciers. C’est pourquoi ils déclarent que le Christ a une nature, une volonté, une opération ; voiries affirmations de Barhebrœus citées plus haut. Bar Salibi commentant le texte de la tentation du Christ dit que, comme le démon a vaincu Adam et par lui sa postérité, ainsi le Christ a vaincu le démon et il a justifié la descendance d’Adam et l’a rendue victorieuse et il ajoute : Rursum Christus non quatenus Deus dimicavit cum diabolo sed quatenus homo. Si enim divina virtute pugnavisset cum eo, divinitati ejus imputaretur Victoria et non humanitati ejus et non lantum dœmones non ausi essent cum eo certamen committere eo quod est Deus sed nec omnes creaturse (simul). Cf. éd. et trad. Sedlaèek, p. 126.

3. Le dogme de la rédemption.

1. Nécessité de la rédemption. — Supposant la chute de l’homme, les écrivains jacobites ont affirmé que la venue du Fils de Dieu était nécessaire pour réconcilier l’homme avec Dieu, pour opérer sa rédemption. Rien ne pouvait plus relever le genre humain de sa misère sinon le Christ. Voir une déclaration très nette de Sévère : Refutatio tomi Juliani, dans A. Sanda Severi, Antijulianistica, 1. 1, Beyrouth, 1931, p. 100 ; voir aussi la lettre de Philoxène, éd. Guidi, La lellera di Filosseno ai monaci di Tell-Addâ, Rome, 1886, p. viii sq. Jean de Dara dans son ouvrage sur le sacerdoce affirme : « Les hommes devant mourir et les prêtres de la Loi ne pouvant les racheter, ni les sacrifices d’animaux les délivrer, il était nécessaire que le Seigneur, personnellement, vînt se faire oblation pour tous, rendre parfaits ceux qui vont à son Père par son intermédiaire, mettre fin à la mortalité qui est la racine du péché et procurer à tous le salut. » Citation donnée par la Chronique de Michel le Syrien, t. i, p. 23-24. Denys Bar Salibi dans son commentaire sur les évangiles, éd. Sedlaèek, p. 10 sq., dit que Dieu a créé l’homme par pur amour et c’est également par pur amour que le Verbe s’est incarné pour sauver l’homme après son péché. L’homme ne saurait être sauvé par un autre homme ou par un prophète ou un ange ; mais le Créateur peut seul le sauver. Il donne un exemple pour appuyer son affirmation. Le vase en verre brisé ne peut être réparé ni par un architecte, ni par un menuisier, mais uniquement par celui qui l’a fabriqué : le verrier : lia et nos, non erat possibile ut alius instauraret, nisi Deus qui nos creavit. Autrement les hommes auraient adoré par erreur cet envoyé de Dieu : fùt-il ange ou prophète, ils l’auraient pris pour Dieu même.

2. Mode de la rédemption.

Ces mêmes écrivains expliquant le mode de la rédemption affirment équivalemment que ce fut par une satisfaction vicaire. Sévère, dans l’ouvrage cité plus haut, déclare que le Christ a pris sur lui tous nos crimes et qu’il a la force de porter nos langueurs parce qu’il était Dieu. P. 104. Ne pouvait-il pas nous sauver par sa toute puissance et avait-il besoin de s’incarner et de mourir ? BarSalibi répond que Dieu est juste, il ne conduit pas l’homme par la violence alors qu’il aurait pu le faire, il ménage le libre arbitre de l’homme. Ideo non per potentiam redemit sed per verbum justitiæ. Le Christ a opéré notre rédemption par sa victoire sur le démon non en tant que Dieu, mais en tant qu’homme. La lutte qui devait s’engager entre le Rédempteur et le Malin serait disproportionnée si la divinité devait intervenir. Le démon avait triomphé de l’humanité, il fallait que l’humanité du Christ triomphât du mau-