Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 14.2.djvu/757

Cette page n’a pas encore été corrigée
3015
3016
SYNOPTIQUES. SOLUTIONS DIVERSES


qu’un élément de la solution complète du problème synoptique. Elle peut expliquer en particulier l’existence dans le IIIe évangile de morceaux considérables groupés principalement dans une section spéciale de cet évangile (Luc, ix, 51-xviii, 19), qui n’ont de parallèles ni dans Matthieu, ni dans Marc. Un certain nombre de critiques estiment que ces morceaux étaient déjà réunis dans un document utilisé par Luc et que les deux autres Synoptiques n’auraient pas eu à leur disposition. Mais ces morceaux ne présentent pas un caractère d’homogénéité et, d’autre part, le cadre historique dans lequel ils sont disposés est assez vague. Il est donc plus probable que Luc a groupé dans cette section des traditions qu’il avait recueillies de divers côtés, traditions orales sans doute, mais aussi traditions déjà fixées dans des écrits fragmentaires, comme cela apparaît sûrement dans son récit de l’enfance de Jésus, qui suppose à sa base une source araméenne traduite en grec.

IV. Conclusions.

De l’exposé du fait synoptique et de la discussion sommaire des principales hypothèses proposées pour en rendre compte, de la variété même des solutions et de la complexité de certaines d’entre elles, il apparaît nettement que le problème ne peut être considéré comme résolu d’une façon complète et définitive : les éléments de solution ont été dégagés et bien mis en lumière, mais chaque système se heurte encore à certaines objections et, dans le détail, laisse subsister des difficultés qui constituent parfois de véritables énigmes. On peut cependant dégager quelques conclusions générales importantes et suffisamment assurées quant au caractère des évangiles synoptiques et quant à la nature et à la valeur des informations qu’ils nous fournissent sur la vie et la doctrine de Jésus.

1° Les Synoptiques doivent être considérés comme l'œuvre de véritables écrivains et non comme celle de compilateurs qui se seraient contentés de faire une mosaïque d'éléments empruntés à des sources diverses et plus ou moins adroitement juxtaposés : ces éléments ont été fondus par les auteurs dans un ensemble nettement homogène. Chaque évangéliste a ordonné les matériaux dont il disposait selon un plan déterminé, en les adaptant au but particulier qu’il visait et à la nature des destinataires de son œuvre. On ne peut donc prétendre faire l’analyse des Synoptiques, comme on fait l’analyse de certains livres de l’Ancien Testament de caractère nettement composite, où les éléments empruntés à des sources diverses sont juxtaposés plutôt que fondus. Il ne faudrait pas non plus trop presser l’analogie qu’on a tenté d'établir entre l'élaboration de la tradition évangélique dans les Synoptiques et la fixation de la tradition franciscaine dans les premiers écrits consacrés au saint d’Assise. Cf. L. de Grandmaison, Jésus-Christ, t. i, p. 44-47. Même l'évangile de Marc, celui dont l’unité interne est le moins apparente, est tout autre chose qu’une collection d'épisodes, rangés dans un ordre vaguement chronologique : c’est avant tout, comme les autres évangiles, une catéchèse, où une préoccupation didactique et apologétique domine l’ensemble de la composition et en assure l’unité.

2° Quant aux éléments traditionnels qui sont entrés dans la trame des évangiles, on ne saurait admettre, comme le soutient toute une école récente de critiques, qu’ils aient été l'œuvre anonyme d’une collectivité, de la communauté chrétienne primitive. Qu’il ait pu y avoir, sous l’influence de besoins apologétiques ou cultuels, une certaine amplification des données premières de la tradition, on ne saurait le nier absolument, du point de vue de la pure critique historique ; encore faut-il en apporter la preuve dans chaque cas particulier. Mais la part essentielle dans l’origine et le dévelop pement de la tradition évangélique doit avoir appartenu à ceux qui avaient été les témoins de l'Évangile, aux apôtres et aux premiers disciples, comme cela ressort nettement du prologue de Luc : « Puisque plusieurs ont entrepris de composer un récit des événements qui se sont accomplis parmi nous, d’après ce que nous ont transmis ceux qui, dès le début, ont été témoins oculaires et ministres de la parole… » Et parmi ces témoins oculaires, devenus ministres de la parole, celui qui était le chef des Douze, Pierre, dut avoir un rôle prépondérant dans la fixation du noyau de récits et d’enseignements qui devait faire le fonds de la prédication évangélique. Ce fonds primitif, conservé fidèlement par transmission orale d’abord, puis par sa fixation en écrits fragmentaires, constitue la matière commune des Synoptiques, complétée par d’autres traditions remontant aussi sans doute à quelqu’un des témoins oculaires de la vie du Christ. Par les Synoptiques nous sommes ainsi en contact avec les souvenirs que les disciples immédiats de Jésus avaient gardés des actes et des enseignements de leur Maître. Souvenirs incomplets, certes, et qui n’ont jamais prétendu faire connaître tout ce que Jésus avait fait et avait dit, qui par conséquent ne permettent pas d'écrire une véritable histoire du Sauveur, au sens où l’on entend aujourd’hui l’histoire, mais, comme le dit le P. Lagrange, « d’une telle valeur comme reflet de la vie et de la doctrine de Jésus, d’une telle sincérité, d’une telle beauté que toute tentative de faire revivre le Christ s’efface devant leur parole inspirée ». L' Évangile de Jésus-Clirist, p. vi.

On n’indiquera ni les ouvrages généraux sur l’Introduction au Nouveau Testament, ni les Commentaires des Synoptiques, soit séparés, soit réunis, mais seulement les études générales ou particulières sur le problème.

I. Synopses.

Catholiques.

J. Bruneau, Harmong

of the Gospels, New-York, 1898 (texte évangélique de The Douai) Version) ; J. Verdunoy, L'Évangile, Synopse, Paris, 1907 (version française du texte grec) ; A. Brassac, Nova Evangeliorum Synopsis, Paris, 1913 ; A. Camerlynck, Synopsis juxta vulgatam editionem, Bruges, 1908 (4e édition par H. Coppieters, 1932) ; M. J. Lagrange, Synopsis evangelica grxce, Barcelone et Paris, 1926 (édition en trad. française par C. Lavergne, Paris, 1927) ; P. Vannutelli, Gli Evangeli in sinossi, Turin-Bome, 1931 ; Sinossi degli Evangeli, Borne, 1938.

Non-catholiques.

 Tischendorf, Synopsis evangelica,

Leipzig, 1851 ; W.-G. Buhsbrooke, Synoplicon, Londres, 1880 ; A. Huck, Synopse der drei ersten Evangelien, Fribourg-en-B., 1892 (8e édition par H. Lietzmann, Tubingue) ; A. Wright, A Synopsis of the Gospels in Greek, Londres, 1896 ; B. Heineke, Synopse der drei ersten kanonischen Evangelien, Giessen, 1898 ; E. Morel et G. Chastand, Concordance des Évangiles synoptiques, Lausanne, 1902 ; W. Larfeld, Gricchische Synopse, Tubingue, 1911 ; E. de Witt, Burton et E.-J. Goodspead, A Ilarmony of the Synoptic Gospels in Greek, Chicago, 1920 ; J. Weiss et B. Schutz, Synoplische Tafeln zu den drei aeltcren Evangelien, Giessen, 1920.

IL Ouvrages généraux et études particulières sur

LES SYNOPTIQUES ET LEURS RELATIONS MUTUELLES.

Catholiiiues.

G. Bonaccorsi, I Ire primi Vangelie la

Critica lilteraria ossia la Questione sinottica, Monza, 1904 ; E. Jacquier, Les Évangiles synoptiques (t. n de l’Histoire des livres du Nouveau Testament, Paris, 1905) ; F.-E. Gigot, Studies oj the Synoptics, dans New-York Review, 1900-1907 ; E. Mangenot, Les Évangiles synoptiques, Paris, 1911 ; B. Boncamp, Zur Evangelicnlragc, Munster, 1909 ; L. Méchineau, / Vangeli di S. Murcoe di S. Lucae la Questione sinottica secondo li riposte délia Coiiunissione Blblica, Bomo, 1913 ; P. Dausch, Die sgnoptische Frage, dans Biblische Zeitfragen, Munster, 1911 ; le même, Die Zweiquellentheorie, dans Biblische Zeit/ragen, 1915 ; le même, Die drei aelteren Evangelien, Bonn, 1916 ; T. Soiron, Die Logia Jesu, Munster, 1910 ; II. Cladder, Unsere Evangelien, Fribourg, 1919 ; E. Levesque, Nos quatre Évangiles, Paris, 1923 ; J.-M.Vosté, De Synopticorum mulua relatione et dependeniia, Borne. 1928 ; L. de Grandmaison, Jisus-Christ, t. i, p. 91-118, Paris,