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de Laurent. Des la fin de 500, une sourde agitation se faisait sentir dans Home. Elle prenait prétexte de ee que le pape avait fixé pour l’année suivante la célébration de Pâques au 25 mars, selon le vieux comput romain, alors que les grées — et le comput mis à la mode par Victorius — pensaient célébrer la fête le 22 avril. Cf. art. Pâques, t. xi. col. 1960 sq. Sur cette accusation s’en greffaient d’autres : Symmaque aurait dilapidé les biens d'Église ; ses mœurs n’auraient pas été audessus de tout reproche. De tous ces griefs le roi des Goths fut saisi. A peine Symmaque avait-il eélébré la fête de Pâques, qu’il fut mandé à Havenne. Il partit pour la capitale du roi goth, mais fut arrêté à Rimini, d’où, sans vouloir continuer son chemin, il retourna à Rome. Entre temps Théodorie avait désigné, à la demande des laurentiens, un visitalor, c’est-à-dire un administrateur provisoire du Siège apostolique, en la personne de Pierre d’Altinum. Celui-ci devrait célébrer la fête de Pâques à la date réglementaire, 22 avril, et s’occuper ensuite des griefs faits à Symmaque. Incapable de rentrer au Latran, le pape se réfugia à SaintPierre, alors complètement séparé de la ville.

Les fêtes pascales terminées, Pierre d’Altinum, qui, dès ce moment, avait pris parti pour les laurentiens, pressa la réunion d’un grand concile italien qui tirerait au clair les accusations portées contre Symmaque. Le pape s'était déclaré prêt à répondre devant l’assemblée, mais à la condition expresse que Pierre serait d’abord éloigné et qu’on lui rendrait à lui-même la jouissance de son temporel. Cf. Mansi, t. viii, col. 248-249. La première session du concile n’aboutit pourtant à rien, parce que, les conditions posées par Symmaque n’ayant pas été remplies, le pape se refusa à paraître à l’assemblée. Au dire du fragment laurentien, il s’y trouva, d’ailleurs, un certain nombre de membres pour déclarer que le pape, quels que fussent ses accusateurs, ne pouvait être jugé par personne. « Mais, continue-t-il, les évêques les plus distingués, tant en considération de la religion que pour obéir au roi, étaient d’avis qu’une telle affaire, autour de quoi s'était fait tant de bruit, ne pouvait aboutir à un simple non-lieu. Les discussions furent vives au sein de l’assemblée, mais elles ne pouvaient apporter aucune lumière.

Saisi de tout cela, Théodorie exigea une nouvelle session, à laquelle Symmaque promit de paraître ; ce devait être vers le 1 er septembre. Mais, assailli en cours de route par l'émeute, le pape déclara que désormais il ne mettrait plus les pieds dans l’assemblée ; il en appela au roi, à qui le concile en avait, lui aussi, référé. Mansi, ibid., col. 249 DE. Théodorie, de son côté, tenait avant tout à laisser aux gens d'Église la décision que lui, prince arien, ne voulait pas prendre. Une nouvelle session s' étant tenue, sans résultat, il ordonna aux évêques d’en finir en une nouvelle séance qui se tint le 23 octobre 501. C’est le Sgnodus palmaris des documents. Procès-verbal dans Mansi, ibid., col. 247-253. C’est alors que fut rendue la fameuse décision selon laquelle était abandonnée l’accusation contre Symmaque et l’idée même d’une enquête : à cause de l’autorité de Pierre, le concile ne pouvait procéder contre un pape ; il ne restait qu'à l’abandonner au jugement de Dieu. Decernimus, ul Symmachus ab hujusmodi propositionibus impelitus, quantum ad homines respicit (quia tolum causis obsistenlibus superius designatis constat arbilrio divino fuisse dimissum) sit immunis et liber. En conséquence, r(.-ux qui ne voudraient pas entrer en communion avec Symmaque étaient déclares schismatiques. Pierre d’Altinum et Laurent, lequel était depuis quelque temps rentré à Rome, étaient condamnés. Symmaque, ainsi remis en possession, prit aussitôt ses précautions pour empêcher que l’on pût tirer quelque précédent de cette procédure

extraordinaire. Une dernière session du synode romain fut tenue le 6 novembre. Texte dans Mansi, ibid., col. 263-269 ; cf. Vogel, dans Neues Archiv, t. xxiii, p. 55 (Jaffé le reporte à l’année suivante). On y exhuma une ordonnance rendue en 483, par le préfet du prétoire Basile, sur ordre du roi Odoacre, qui défendait de procéder à l'élection d’un pape sans un accord préalable avec le représentant du souverain et qui, d’autre part, interdisait aux papes l’aliénation des biens de l'Église. Ces actes furent déclarés sans valeur, comme ayant été faits par un laïque et sans intervention du pape. Symmaque d’ailleurs n’hésita pas à prendre lui-même à son compte les dispositions de l’ordonnance de Basile relatives à l’aliénation des propriétés ecclésiastiques.

La victoire remportée par Symmaque sur le parti laurentien ne fut pas décisive. Soutenu par un certain nombre de personnages consulaires et un assez fort contingent du clergé, Laurent parvint non seulement à se maintenir dans Rome, mais à réduire son adversaire à une situation fort précaire. Pendant près de quatre ans, il fut impossible à Symmaque, bloqué à Saint-Pierre, de mettre le pied en ville. Entre les deux partis adverses les scènes de violence se multipliaient, alternant avec des scènes de lubricité. Mais, comme dit le fragment laurentien, « ee n’est pas ici le lieu de raconter les troubles en question ». Ils durèrent jusqu’au moment où Théodorie, en 506, docile aux suggestions du diacre alexandrin Dioscore, envoya au patrice Festus, le plus ferme soutien de Laurent, l’ordre de faire rendre à Symmaque les diverses églises (titres) que Laurent occupait et « de faire qu’il n’y eût plus à Rome qu’un seul évêque ». Le patrice dut s’exécuter ; Laurent se retira sur les terres de Festus, y vécut dans la profession d’ascète et ne tarda pas à y mourir.

Débarrassé de son compétiteur, Symmaque put se consacrer avec plus de liberté au gouvernement de l'Église. En 513, il recevait à Rome la visite de saint Césaire d’Arles et tranchait une nouvelle fois en sa faveur le différend entre Vienne et Arles. Jaffé, Regesta, n. 764-766. L’année suivante il accordait au même personnage des pouvoirs qui faisaient de lui un vicaire du Saint-Siège pour la Gaule et l’Espagne. Ibid., n. 769. Cf. art. Césaire, t. ii, col. 2169. A son habitude le Liber pontificalis s'étend avec complaisance sur les travaux de ce pape à Saint-Pierre de Rome et en d’autres basiliques, soit à l’extérieur de la ville, soit à l’intérieur. Il lui rapporte également une ordonnance liturgique prescrivant de chanter tous les dimanches et aux fêtes des martyrs le Gloria in excelsis, jusqu’alors réservé à la fête de Noël, ceci devant s’entendre de la messe épiscopale seulement. Par ailleurs, célébrant la charité du pontife, il parle des secours en argent et en nature envoyés aux évêques exilés en Afrique et en Sardaigne lors de la persécution de Thrasamond, à partir de 508, cf. Jaffé, n. 762 ; de même signale-t-il l’empressement de Symmaque à racheter les prisonniers, victimes des guerres récentes, en Liguric, à Milan et dans les provinces du Nord de l’Italie. Il aurait pu ajouter qu'à l’endroit de l’empereur Anastase, protecteur déclaré du monophysisme, Symmaque reprit la ferme attitude de Gélase, dont il retrouva quelques formules, et se garda des compromissions qui avaient si mal réussi à son prédécesseur Anastase IL Cf. Jaffé, n. 759, 761. Il mourut le 19 juillet 514, laissant une grande réputation de sainteté.

IL La littérature symmachienne. — Les luttes à main armée qui marquèrent le pontificat de Symmaque se doublèrent de polémiques littéraires dont quelques témoins se sont conservés et qui ne sont pas sans intérêt pour l’histoire du droit canonique et des prérogatives pontificales.