Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 14.2.djvu/734

Cette page n’a pas encore été corrigée

2 9 6 9

S Y M ÉON M KTAPH R ASTE

2970

une édition complète des anciens textes pourrait permettre d'étendre l’enquête à presque tout le ménologe. On trouvera les Vorlage connus dans a. Ehrhard, t. i,

'J, à la fin de l'étude respectivement consacrée a chaque livre.

6. La méthode des mëtaphrascs.

Une connaissance circonstanciée de la méthode du Métaphraste ne sera possible ('ne lorsqu’auront été publiées dans leur texte original toutes les vies et leurs modèles. De celles-là sept seulement ne sont pas encore publiées : saint Thomas apôtre : saint Hilarion ; saint Platon martyr ; saint Jacques le Perse ; saint Etienne le Jeune ; saint Jean Calybite ; translation des reliques de saint Jean Chrysostome. H y aurait à soumettre à une révision critique la plupart des autres Vies publiées, pour vérifier si leur recension est une ou multiple et pour en lixer le texte. On peut néanmoins d’ores et déjà, avec les éléments dont nous disposons, constituer une certaine somme de conclusions sur la manière des métaphrases.

Syméon n’a pas touche à la substance des textes. Il est injuste de lui reprocher d’avoir aggravé le merveilleux de ses modèles. Il en a simplement respecté la crédulité, en accord là-dessus avec l’esprit de son temps. Les invectives que les polémistes ou les critiques lui ont adressées à ce sujet et dont on aura des échos dans le De Symeonum scriptis de L. Allatius sont donc hors de saison.

Les textes anciens sont soumis à un travail de stylisation qui porte sur la langue, la composition et en général, sur tous les aspects de la présentation littéraire.

Syméon tantôt allonge, tantôt résume. On trouvera des exemples intéressants du procédé dans le « discours » du 15 août, si vraiment il dépend de Jean le Géomètre ; cf. M. Jugie, Sur la vie et les procédés littéraires de S. Métaphraste, dans Échos d’Orient, t. xxxii, 1923. p. 5 sq. Il réunit des pièces auparavant distinctes, par exemple, le 15 novembre, le martyre de Gurias est amalgamé avec le récit de son miracle. O. von Gebbardt et E. von Dobschûtz. Die Akten der Edessener Bekenner, dans Texte und Untersuchungen, Leipzig, 1911. Lue introduction caractéristique est généralement plaquée au récit, par exemple pour la Vie de saint Samson, P. G., t. cxv, col. 277 C sq. Les textes sont relevés de proverbes et de citations, tant bibliques que classiques ; les discours, étoffés, cf. Vie de Théodore le Conscrit dans H. Delehaye, Les légendes des saints militaires, Paris, 1909, p. 25. Ailleurs, ce sont des adaptations liturgiques ou juridiques aux nouveaux usages. La préoccupation de Syméon est d’ordre si strictement littéraire qu’il ne se soucie même pas toujours de supprimer les données autobiographiques de ses modèles, comme on a vu pour sainte Théoctiste.

On a tenté récemment de réunir un florilège stylistique du Métaphraste ; cf. H. Zilliacus, Das laleinische Lehnworl in der gricchischen Hagiographie, dans Byz. Zeitschr.. t. xxxvii, 1937, p. 302 sq. ; Zur stilislichen L’marbeitungstechnik des S. Melaphrasles, ibid., t. xxxvill, 1938, p. 333 sq. Il suffit à donner le ton de l’ensemble. Sur toute la ligne, on constate une hellénisatiorj concertée des formes, populaires mais vivantes, du passé : abandon ou hellénisation des mots techniques empruntés au latin en matière de lexique ; tours Stéréotypés dans les introductions et conclusions ; intrusion de proverbes et jeux de mots, de citations, d’images ou d’antithèses ; suppression fréquente de détails concrets : noms de personnes, de supplices, retour a des formes tombées en désuétude ; duel, optatif, présent historique, préférence accordée au style périodique, souci de multiplier les figures de style, etc. Ces constatations définissent suffisamment le sens de l'œuvre hagiographique de Métaphraste : d’une part,

elle marque un appauvrissement de la littérature hagiographique dans le domaine du sentiment religieux ; de l’autre, elle nous fournit le barème du goût dans la Byzancc du xe siècle : culte de la forme pour elle-même et minimisation du fond. Un tel travail rentrerait bien dans le cycle des compilations conçues par Constantin Porphyrogénète à qui on a proposé, non sans raison, de faire remonter l’impulsion d’où serait sortie le ménologe ; cf. A. Ehrhard, loc. cit., p. 493, n. 5 et p. 709. Notons encore que le caractère plus ou moins officiel du ménologe a pu brider l’originalité du compilateur mais sans contredire le penchant de l'époque.

7. Influence.

Celle-ci nous est garantie par le nombre des copies du recueil qui nous sont parvenues : Ehrhard a inventorié 093 manuscrits et 132 fragments, se répartissant inégalement selon les livres (suivant un decrescendo à peu près régulier de septembre à août) dont la majorité est antérieure au xiiie siècle. Elle l’est aussi par les nombreux admirateurs et imitateurs — les néométaphrastes : Constantin Acropolite, Nicéphore Grégoras etc. — qu’elle a suscités.

La concurrence qu’elle exerça, aussitôt parue, sur les anciens ménologes rejeta ceux-ci dans l’ombre. On cessa de les copier et la littérature hagiographique a pâti sur ce point du nouveau venu. H. Delehaye n’a donc point tout à fait tort en nommant Métaphraste (unestissimus homo. Bibliolheca hag. gr., l re édit., Bruxelles, 1895, p. viii. C’est plutôt là cependant un simple contrecoup. Directement, les dégâts sont minimes : la substitution de refontes aux anciens textes n’atteint qu’un nombre minime de ceux-ci puisque les métaphrases ne dépassent pas le chiffre de 123. « C’est un mince pourcentage de notre présent avoir en textes hagiographiques proprement dits. Et puisqu’on a même établi que les textes anciens ne nous manquent que pour fort peu de textes métaphrastiques (mieux, n’ont pu encore être jusqu'à présent repérés) la proportion du dégât directement opéré par le ménologe de Métaphraste se réduit à un minimum. » A. Ehrhard, loc. cit., p. 707.

Nous n’avons pas à suivre la dépendance accusée par un grand nombre des ménologes de la suite à l'égard du nôtre. Notons seulement que cette influence s’exprimera de différentes façons : par écourtement en ce qui concerne les premiers mois, par allongement pour les autres, enfin par contamination pour une troisième série (rencontre de textes métaphrastiques avec des éléments hétérogènes d’autres recueils hagiographiques ou homilétiques). On se reportera pour cela à la suite de l’ouvrage d’Ehrhard. Celui-ci s’est demandé autrefois si le ménologe royal publié par B. LatiSev, Menologii byzantini sœculi x l quæ supersunt fragmenta, Saint-Pétersbourg, 1911-1912, n'était pas l’oeuvre de Métaphraste lui-même, en retenant tout au moins qu’il est d’un de ses disciples. Byz. Zeitschr., t. xxi, 1912, p. 239-246. sans doute ses travaux actuels préciseront-ils ces positions.

Conclusion. — La reconstitution du ménologe de Métaphraste éclaircit considérablement le champ de l’hagiographie en classant une quantité imposante de manuscrits. Elle permet une subdivision claire de la tradition hagiographique. Comme contenu, elle est essentiellement un témoin littéraire et relève au premier chef de l’histoire de la littérature. Il se pose encore un certain nombre de questions au sujet du ménologe. Nous avons signalé celle de la composition différente des mois de printemps et d'été par rapport à ceux d’automne et d’hiver. On peut aussi se demander si le ménologe n’a pas connu deux éditions. Pour quelques fêtes, on trouve tantôt une recension et tantôt une autre ; par exemple pour sainte Théoctiste, saint Sébastien, saint Georges, etc. ; voir Bibliotheca hagio-