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SI PERSTITION. L’ASTROLOGIE

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la vaine observance, dans les doux sons du mot : vaine pratique et vaine observation, a le tort de prendre dos signes pour dos causes. 1e geste inefficace du sorcier, si par hasard il est couronné de succès, passe pour une roootto : par une pente naturelle à notre esprit logicien, on conclut : posi hoc [signum], ergo propter hoc [malefieium]. A plus forte raison pour ces mille vaines observations, dont parle déjà saint Augustin, un frisson, un éternuement. la rencontre d’un chien ou d’une pierre, etc. ». On ne peut tout de même pas nier un fait d’expérience commune. A peu pris tout le monde en a fait l’expérience : il y a des temps, dos endroits, des paroles entendues, dos rencontres, dos actes maladroits ou désordonnés qui portent malheur… Pourtant oo n’est qu’un fruit de la vanité humaine… La première fois que c’est arrivé, c'était par hasard. Mais, dans la suite les gens se sont laissé prendre à y faire attention, « ils sont devenus trop curieux et ont glissé sur la pente d’une erreur funeste », au point de transformer ees observations, plusieurs fois vérifiées, en observanoes. Q. xcvi. a. 3. ad 2um. Il est parfaitement légitime de présager des événements futurs à la vue de leur cause : l’esclave qui voit son maître en colère pense que le fouet n’est pas loin. Les infirmités s’annoncent chez nous par des symptômes qui sont à la fois dos signes et des causes des maladies prochaines : les médecins ont bien raison d’y être attentifs ». Ibid., a. 3. ad l um. Autour de nous, ces signes, insaisissables dans leurs causes, seront fort bien aperçus dans des effets parallèles, par exemple dans les réactions instinctives des animaux, q. xcv, a. 7, ou dans le retentissement de nos malaises sur nos rêves. Ibid., a. 6. Mais il est malheureusement d’autres genres d’observations et de pratiques que tout le monde considère comme des signes de bonheur ou de malheur, sans avoir la moindre idée de les observer comme des causes ». II"- !  ! ", q. xevi, a. 3.

C’est donc bien uniquement dans le jeu normal, spontané ou provoqué, des causes et des effets, qu’on peut chercher de bonnes recettes ou recueillir des présages. Mais, pour l’examen des cas d’espèces, il faudrait entrer en une foule de réserves, réservés dictées par l’expérience et par les remarques de la science de l'époque, suivant qu’on observe les astres, les songes et les malaises de l’homme, l’instinct animal et les interférences de toutes ces causes. II » - II*, q. xcv, a. 5, 6. 7 ; q. xevi, a. 2 et 3. On pourra lire, par exemple, les judicieuses conclusions de saint Thomas sur « la clef des songes », qui justifient ce jugement du Dr Lhermitte : » Aussi loin que nous pouvons remonter dans l’histoire de la médecine, nous trouvons des observations qui correspondent aux plus récentes, et témoignent que le rêve peut évoquer l’image d’une maladie non encore présente. » Lhermitte, Le sommeil, 1931, p. 121. Sur le même sujet, cf. I » -II*, q. cxiii, a. 3, ad 2um ; De veritate, q.xii, a. 9 ; q. xxviii, a. 3, ad 6 am. Sur la télépathie, où le cardinal Lépicier voyait l’intervention nécessaire des mauvais anges, Le monde invisible, 1931, p. 471, voir en sens contraire Dr Osty. Lu connaissance supra-normalc. 1923. Quoi qu’il en soit, le principe qui règle, pour saint Thomas, le bon usage des signes est tout à fait philosophique :

qu’on s’appuie sur une chose de la nature, mais uniquement dans les limites do la zone d’influence de ootto cause ». Q. xevi, a. 6. Or, l’instinct dos animaux, par exemple, est tout entier relatif aux choses nécessaires a leur vie, comme le vent, la pluie. ibid., a. 7 ; et les astres no peuvent donner aux corps physiques, aux animaux, aux songes et à la chance de l’homme qu’une heureuse ou mauvaise disposition générale. Ibid., a. 5 ; q, xevi, a. 2. ad 2um. En effet, il y a doux ordres do faits qui no peuvent être pris us avec certitude, parce qu’ils n’ont do cause suffisante, dans au cune dos forces naturelles do oo bas monde : eo sont les faits accidentels et les actes libres… g II » -II », q. xcv. a. 5. Encore est il qu’on peut prévoir avec probabilité et sans vaine observance bien des réactions humaines. - parce que la plupart des hommes sont à la remorque do leurs impressions et par suite se conduisent, la plupart du temps, selon le penchant que leur donnent les conditions atmosphériques » ou d’autres influences extérieures. « C’est pour cola que bien des prédictions des astrologues se vérifient, surtout lorsqu’il s’agit d'événements généraux, qui dépendent de la multitude ». Ibid., ad 2° m. Voilà comment la philosophie scolaslique, faisant d’ailleurs la part très large aux précisions futures de la science, admet une libre enquête sur le jeu des causes et des effets pour en tirer des recettes et des présages, sans les accuser de vaine observance.

5. Influences et signes célestes.

Il faut leur faire une place à part parmi les forces mystérieuses auxquelles les hommes ont recours pour connaître l’avenir et diriger leur conduite. Sans doute l'étude scientifique du cours des astres, l’astronomie, et même l'étude expérimentale do louis influences sur ce bas monde rentrent-elles dans ce vaste système d’actions et de réactions des forces naturelles que l’on vient de considérer ; mais l’astrologie est, historiquement, un art spécial et hermétique. Comme elle n’a pas trouvé place dans ce dictionnaire, nous n’en prendrons que ce qui concerne la superstition, en tant que les astres, considérés comme des causes, sont censés influer sur notre destinée et fournir, considérés comme des signes célestes, des présages à la vaine observance. L’astrologie, à la vérité, fut longtemps beaucoup plus qu’une superstition : les primitifs firent déjà une science, rêvée plutôt que pensée, et puis, ultérieurement, une religion astrale, avec ses symboles lunaires, ses mythes et son culte. Les Chinois du xiie siècle avant J.-C. en avaient fait une science officielle, celle de « la Voie du ciel ». Mais ce sont les Chaldéens qui en firent une religion fataliste et qui la propagèrent en Egypte, en Asie-Mineure, en Grèce et jusqu'à Rome, surtout au ne siècle après J.-C. Ils avaient, les premiers, « fait la carte du ciel », Is., xlvii, 13, et conçu l’idée d’une nécessité inflexible venant des astres qui régissaient l’univers ; et la logique de l’hellénisme avait, grâce à la philosophie stoïcienne, coordonné ces doctrines orientales en un système d’une puissante hardiesse, laTuyv ; divinisée, devenant la maîtresse irrésistible des mortels et des immortels.

Mais les masses ne s'élevèrent pas à cette hauteur de renoncement : pour elles, l’astrologie devint une simple superstition, sous deux formes différentes. La première, la consultation des astrologues, était encore un peu religieuse, les devins considérant les planètes comme des divinités de secours, qui voyaient leurs actions et entendaient leurs prières. Les païens du iii c siècle étaient-ils sur le point de se marier ou de faire quelque acquisition importante, ambitionnaientils quelque charge, ils couraient demander au mathemalicus ses pronostics. Saint Thomas a bien vu la double origine de ces observances : « Il faut y voir, semble-t-il, des restes de l’idolâtrie, qui consultait les augures ; quant à l’observation des jours fastes et néfastes, elle a quelques points d’attache avec la divination astrologique, puisque ce sont les astres qui font les jours différents ; mais ici tout se fail sans art. » II « -II*, q. xevi, a. 3. On voit comment ees pratiques pouvaient trouver accès dans la vie dos nouveaux convertis.

a) Les Pères grecs allèrent au plus pratique, défendant, avec Origène, la liberté chrétienne, bien établie

dans la prédication ecclésiastique, contre ceux qui prétendent que les mouvements.les astres sont causes