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SPIRITISMK. LES ANTÉCÉDENTS

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sciiionum auctore, prend un anneau suspendu à un fil très fin. Il note les lettres sur lesquelles s’arrête l’anneau. Dans l’expérience présente, l’anneau vint effleurer les lettres représentant (-) E O. « Théodore empereur ! » s'écria Patricius.

On ne peut parler Ici qu’improprement de tables tournantes. Et il ne faudrait pas entendre au sens littéral les mots movimus et movendi du texte, appliqués à mensulam. Mais cela ressemble tout à fait à l’oui-jà, qui était en vogue il y a quelques années. Sur le bord d’une soucoupe renversée, on fixe un indice, morceau de papier ou de bois terminé en pointe. Sur une table a été disposée une feuille de papier divisée en cases ; chaque case porte écrit une lettre ou un chiffre. On pose la soucoupe sur Le papier et la main sur la soucoupe. La soucoupe entre en mouvement. Les lettres devant lesquelles s’arrête successivement l’index forment des mots, des phrases. Ce sont les messages de l’au-delà. Nil novi sub sole. L’avantage des deux procédés est de permettre à l’expérimentateur peu scrupuleux de guider l’indice ou l’anneau. Pour le spirite moderne, les numina invoqués sont les esprits des morts. Pour les anciens, les numina qui se manifestent par les chèvres ou les tables sont des puissances vagues parmi lesquelles se rangent les mânes, forces invisibles qui subsistent des défunts.

Il est difficile de voir, comme quelques-uns l’ont voulu, au t. II, vers 764, de Y Enéide, mensœque deorum, une mention des tables divinatoires. Il s’agit d’objets de haut prix, proie des pillards, donc plutôt de tables à offrandes.

Au Moyen Age, autant que nous l’apprennent les documents connus, les maléfices et les autres opérations magiques se font surtout par le recours aux esprits mauvais. Mais il ne faudrait cependant pas exclure l'évocation des morts.

Le commerce avec les morts se prolongea longtemps même parmi les populations christianisées. Saint Ambroise à Milan se voit obligé d’interdire la pratique d’apporter sur les tombes des corbeilles pleines de fruits, sortes de parentalia qui, chez les païens, avaient pour objet d’apaiser les âmes des parents, animas placare parentum, dit Ovide. Et saint Augustin croit devoir se défendre d’avoir évoqué les morts. Il reconnaît s'être adonné aux pratiques de l’astrologie, mais anima mea nunquam responsa quæsivit umbrarum : omnia sacrilega sacramentel detestor. Conf., VI, ii, 2 ; IV, ii, 3.

Dans les antécédents du spiritisme en France il convient de donner une place notable à la francmaçonnerie. Il y a d’abord ce fait que les premiers médiums qui opérèrent autour d’Allan Kardec, le fondateur du spiritisme en France, étaient des magnétiseurs. Aux magnétiseurs, le spiritisme a emprunté la doctrine fondamentale, essentielle, du fluide vital. Mais le magnétisme français dérive de Mesmer. Or, Mesmer avait été reçu a Paris, en 1781, en qualité de franc -maçon étranger parles loges françaises, dont les membres étaient nombreux dans l’entourage de Marievntoinette. La reine le savait et leur accordait son appui en cachette. Depuis 177°. mie loge de femmes

avail été autorisée à Paris sous le nom de loue La Candeur. ha duchesse de Polignac en faisait partie. Le 20 février 1781, la princesse de l.a in bal le était chargée, comme grande maîtresse, de la direction de la Mère Loge Écossaise. Jadis soignée par Mesmer, elle le soutenait comme sœur < plus encore que comme malade. C’est ainsi que Mesmer devient, en 1784, l’oracle de la Loge de l’Harmonie. Il envoie ses meilleurs disciples

Créer des églises secondaires dans les principales illes du royaume. Il entre en relation avec la loge établie a Lyon par Willermoz. D r Vincbon, Mesmer, Paris, 1931.

Avec Willermoz, l’action de la franc-maçonnerie va se manifester plus directe et sous une forme nouvelle. Sans jouer un rôle inspirateur de premier plan dans la maçonnerie, ce personnage fut mêlé, plus que personne, à tous les mouvements de celle-ci pendant sa longue le qui ne se termina qu’en 1824, à quatre-vingt-quatorze ans. J.-B. Willermoz était né à Lyon le 10 Juillet 1730. Il appartenait à la meilleure bourgeoisie lyonnaise. Luimême fabricant d'étoffes de soies et d’argent », « commissionnaire en soieries », il montra une aptitude remarquable aux affaires. Il était, à sa mort, l’un des plus gros négociants et propriétaires fonciers de sa ville. En 1753. il fonde la loge de la Parfaite Amitié, du rite ordinaire, l.a loge ne comptait que neuf membres. Willermoz en était Vénérable inamovible. Elle adhéra à la Grande loge de France, lorsque celle-ci se sépara de celle de Londres. Willermoz fit confirmer ses pouvoirs. En 1761, nous le trouvons grand-maître de la Grande Loge des Maîtres réguliers, de six membres, qui prétendait exercer une sorte de police sur les loges de la région. L’année suivante, il se brouille avec la Grande loge de France, mais se mêle de plus en plus aux divers mouvements indépendants dont il s’efforce de prendre la direction. C’est ainsi qu’en 1766 ou 1767, il est chef, à Lyon, de la loge des Élus Cohens (c’est-à-dire prêtres). Les Élus Cohens forment une classe très secrète d’initiés supérieurs, Ignorée des maçons ordinaires, comme il devait arriver dans l’avenir et comme il était sans doute arrivé dans le passe, lu 1769, ils ne sont que cinq. Le fondateur de ce groupe est un personnage autour duquel s’est créée toute une légende.

Marlincz Paschalis, dit Martinès de Pasqually, étaitil juif portugais ? Son acte de baptême, qui a été retrouvé, établit qu’il était catholique. Il naquit vraisemblablement en 1715 aux environs de Grenoble. Son vrai nom était sans doute simplement Martin Pascalis. Il enseignait que les êtres, esprits purs, hommes, créatures matérielles, contenus à l’origine dans le sein de Dieu, en sont émanés par un acte de sa volonté. Mais en sortir, c’est déchoir. La vie est un exil. Tous aspirent à la réintégration. Elle s’accomplit par l’effort de leur volonté qui s’identifie avec la volonté de Dieu et reconquiert la vie divine. La réintégration sera universelle : la nature sera renouvelée et le principe mauvais purifié. Pour ce grand œuvre, les ôtres inférieurs ont besoin de l’aide des esprits qui peuplent l’espace. Il s’agit donc d'établir avec eux des communications. C’est ce qui se fait par tout un ensemble de pratiques théurgiques. (Rappelons-nous l'évocation des esprits.)

Les disciples de Martinez Paschalis prirent le nom de martinistes. Cf. ici, t. x, col. 219. Le plus célèbre d’entre eux est Saint.Martin, dit le Philosophe inconnu.

Paschalis créa le négociant de Lyon Héau-Croix, grade supérieur des Rose-Croix. Parmi ses correspondants, Willermoz compta Joseph de Maistre. On sait que celui-ci avait été affilié à la loge des 'trois mortiers, qui se rattachait <à la Grande loge d’Angleterre. Au moment où il rédigeait les Soirées de SaintPétersbourg (1809), Joseph de Maistre avait depuis longtemps quitté la franc-maçonnerie. Il en parle ainsi au n' 1 Entretien : i Je ne dis pas que tout illuminé soit franc-maçon ; je dis seulement que tous ceux que j’ai connus, en France surtout, l'étaient… Les connaissances surnaturelles sont le grand but de leurs travaux et de leurs espérances ; ils ne doutent pas qu’il ne soit possible à l’homme de se mettre en communication avec le monde spirituel, d’avoir un commerce avec les esprits et de découvrir ainsi les plus rares mystères. »

Voilà bien le spiritisme avant la lettre. Dans une lettre de Martinez Paschalis à Willermoz, il est parlé de communications reçues des anges. De Maistre vient de faire mention de commerce avec les esprits : les