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SOTO (PIERRE DE — Soi FISMK


leur vie. On connaît la lettre de Pierre de Soto au pape, écrite sur son lit de mort, où il n’hésitait pas à dire à Pie IV : Si on n’y arrive pas (à cette définition du droit divin de la résidence) je ne doute pas que le Siège apostolique y doive beaucoup perdre et que Votre Sainteté n’encoure la condamnation finale au tribunal de Dieu. »

En somme, P. de Soto est le théologien espagnol de la bonne école de Salamanque, qui a su prendre la défense des droits de la vraie théologie parmi les nations infectées par le protestantisme, aussi bien contre les hérétiques que contre les théologiens catholiques plus ou moins dévoyés.

V. D. Cari o, O.P., El mæstro Fr. Pedro de Soto, O. P., confessorde CarlosV, y las controoersias politieos-leologicas en il siglo XVI, t. l. Actuariat ! politico-reiifiiosa de Soto, Salamanque, 1021 (liibliot. de teologos espaiioles) ; t. ii, Solo y las controversias teologicas effet siglo XVI (pour paraître sous peu) ; I’r. J.-A. card. Orsi, De Pétri a Solo ejusdem ordinis et Jwloci Ravesteyn de concordia gratta et liberi arbitrii cum Knardo Tappero epistoluri dispulatione. Home, 1734 ; Historiadores del convento de S. Esteban de Salamanca, 3 vol. publiés par I ». Cuorvo, O. P., Salamanque, 1914, 1915, 1916.

Venancio D. Carro. SOTWEL Nathanaël, voir Southwell.

SOUASTRE (Joseph Bonnièresde) (1658-1726), né en Artois, le 2 décembre 1658, entra chez les jésuites de Paris en 1676. Il s’adonna surtout au ministère et à la prédication. Il mourut à Lille, le 22 décembre 1726.

I.e P. Souastre a publié les I. titres concernant la religion écrites à un capitaine du régiment de Lindeboom, avec les réponses dudit capitaine, Lille, 1710, in-12. Ces Lettres ayant été imprimées d’une manière incomplète, Souastre publia les Lettres sur le culle et l’invocation de la très sainte Vierge et des saints écrites à M. d’Abbadie, capitaine au régiment de Lindeboom, avec les réponses de cet officier protestant et la réfutation de ces Réponses, Lille, 1710, in-12 ; le recueil comprend onze lettres (sept du jésuite et quatre du capitaine). Souastre s’applique à montrer que, seul, Jésus-Christ est vraiment médiateur. Sauveur et Rédempteur, tandis que les saints sont seulement médiateurs de prière et de suffrages, suppléants et amis. Mémoires de Trévoux, avril 1712, p. 627-644. Un ministre de Hollande répondit à ces Lettres, en attaquant tout particulièrement l’autorité de l'Église.

Les jansénistes ont accusé le. P. Souastre d’avoir imprimé à Lille le fameux Problème ecclésiastique qui aurait été composé par un de ses confrères. C’est ce qu’affirme Quesnel dans plusieurs lettres de 1699 et dans l'écrit intitulé Solution de divers problèmes très importants pour la paix de V Eglise, tirée du Problème ecclésiastique proposé depuis peu contre M. l’archevêque de Paris. Les Mémoires chronologiques et dogmatiques pour servir èi l’histoire ecclésiastique depuis ItiOO (t. iv, ]>. 111-112) soutiennent la même opinion, mais l’hypothèse, affirmée par la plupart des écrivains jansénistes, paraît sans fondement, car A. Vacant dans une brochure qui reproduit trois articles de la Revue des sciences ecclésiastiques (mai, juillet et août 1890) a prouvé que l'écrit publié contre le cardinal île N’oailles a pour auteur le P. Hilarion Monnier. Voir ici art. Quesnel, t. xiii, col. 1483-1 184.

On attribue aussi au P. Souastre le Système de M. Nicole louchant la grâce universelle, Cologne, 1699. in-12, et 1701, el l'écrit publié sous un titre légèrement différent : Testament spirituel prétendu du s. Nicole ou Système louchant la yrtiee universelle, Amsterdam, 1703, in-12.

PaqUot, Mémoire* pour servir à l’histoire littéraire des

dix sept provinces îles Pays-Bas, t. xiv, 1768, p. 34-51 ; De

Hacker, Iiibliothèque des écrivains de la Compagnie de Jésus, t. i, p. 109-110 ; SommervoRol, Biblioth. de la Comp. de Jésus, t. i, col. 1746-1718.

J. CARREYRE.

    1. SOUFISME##


SOUFISME, tendance ascétique et mystique née au sein de l’islam. — I. Définition. IL Origine et influences diverses (col. 2414). III. Doctrines (col. 2447). IV. Histoire (col. 2 149). V. Déviations et oppositions (col. 2453). VI. Les confréries (col. 2455). VIL Conclusions (col. 2456).

I. Définition. — Le mot soufisme, pris dans son sens le plus général, désigne dans l’Islam toute profession publique, individuelle o*t corporative, d’ascétisme et de mystique.

Ce terme dérive de l’arabe soûf, laine, parce que les premiers soûfts affectèrent de se vêtir d’un manteau de laine blanche à l’imitation des moines et des ascètes chrétiens. Il a pour synonyme le vocable faqtr, pauvre, non pas dans le sens purement matériel d’un individu qui vivrait dans la misère, mais avec la signification de quelqu’un qui se tient volontairement dans un état de besoin et de dépendance complète à l'égard de Dieu. Derviche est un terme persan qui signifie le mendiant et qui fait allusion surtout au détachement du monde. Dans l’Afrique du Nord, on emploie plus volontiers le mot marabout, de l’arabe el-morâbilùn, qui désigne le moine guerrier habitant un ribâl ou couvent fortifié.

L’acte de se vouer à la vie mystique, c’est-à-dire de revêtir le vêtement de laine, s’appelle lasaivoûf. Le terme de soûfi attribué à un individu, n’apparaît dans l’histoire qu’au ixe siècle avec deux ascètes de Koùfa, Djâbir ibn llaiyan et Abou Hæhini. Au témoignage des historiens arabes le pluriel soûffga désigne une école chi’ite de mystiques musulmans née à Koùfa et dont le dernier maître ' Abdak al-soûfî s'éteignit vers 210 (825). Il semble donc bien que le vocable soit originaire de la basse Mésopotamie, aux points de contact entre l’islam orthodoxe et le chi’isme persan.

IL Origine et influences diverses. — Le H. P. Lammens, le maître des études islamiques, a bien mis en lumière la difficulté du problème en ce qui concerne les origines de la mystique musulmane, L’Islam, p. 123 sq : « La Chari’a (la loi coranique) ne légifère pas pour le for interne. Discipline sociale, sorte de loi supérieure, elle borne son ambition à grouper tous les fidèles autour des rites et des observances de la communauté Islamique, sans se soucier d’entrer dans le détail de leur vie intérieure. La fidélité à la Chari’a n’en est pas moins censée opérer leur perfectionnement spirituel, lui douter serait mettre en question sa qua lité de législation révélée. On imaginera difficilement une antinomie plus formelle entre cette conception el celle qui donnera naissance au soufisme. « Sans doute le sentiment mystique ne saurait être « l’apanage exclusif d’une race » (Massignon). Le Coran veut n'être que la rédaction, à l’usage des Arabes, de la grande révélation qui a donné naissance aux religions monothéistes. Plusieurs de ses versets ne sont que des transcriptions et des réminiscences scripturaires. Beaucoup inculquent vivement la crainte de Dieu et de ses jugements, laquelle se trouve à la base de toute saine ascèse. D’autres passages coraniques soulignent la valeur de l’intention dans la vie morale et religieuse. Ces textes considères par le croyant comme inspires, par lui dûment récités et médités, pouvaient aboutir à des essais « d’intériorisation ". et ainsi élever graduellement à l’oraison mentale. Dans son ensemble pourtant, le Coran semble peu fait pour exciter la sensibilité intérieure et proprement spirituelle. Il ignore la déchéance de la nature humaine et. nulle part, il ne déclare la guerre au vieil homme pour revêtir l’homme nouveau. La nécessité de cette lutte, axiome de l’ascétisme chrétien, et non moins le dogme