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art douteux de magie sont-ils méprisés sous la république et même sous Auguste.

Mais, avec l’invasion des religions orientales, la considération pour le magicien grandit à mesure qu’on le redoute davantage, Arnobe, Ado. naliones, I. I. c. xliii, P. 1… t. v, col. 773. On saisit ici l’action victorieuse des cultes alexandrins et chaldéens, dont le rituel n’est pas autre chose à l’origine qu’un ensemble de pratiques magiques. Lactance, Divin, institut.. I. II. c. vi. xi. P. 1… t. vi, col. 282, 328, etc. (.'étaient les prêtres oflicicls qui. en ces cultes, imposaient leurs volontés aux dieux. De lu cet ensemble de pratiques impies, célébrées dans l’ombre, et dont l’horreur n’a d'égale que l’ineptie : breuvages qui troublent les sens, composition de poisons subtils, immolation d’enfants pour lire l’avenir dans leurs entrailles ou évoquer les revenants, toutes horreurs que signalent les historiens et satiriques du temps des premiers empereurs. En présence de ces abominations, j l'État romain s'émut. Mais les rigueurs intermittentes des édits impériaux ne furent pas plus efficaces pour détruire une superstition invétérée que la polémique chrétienne pour la guérir. Aussi bien l'Église ne niait pas la réalité du pouvoir exercé par les sorciers : tant qu’on admit que les esprits malins intervenaient constamment dans les affaires terrestres et qu’il existait des moyens secrets de les dominer ou de partager leur puissance, la sorcellerie fut indestructible. Elle faisait appel à trop de passions humaines pour n'être pas entendue.

Pour l'Église orientale, une affaire curieuse qui se passa dans les dernières années du V siècle, à Béryte en Syrie, montre quelle confiance les esprits les plus éclairés gardaient encore dans les pratiques de la magie la plus atroce. Zacharie le Scolastique, Vie de Sévère d’Anlioche, Patrol. orient., t. ii, p. 57 ; cf. Fr. Cumont, Rev. hist. et littér. relig., 1903, p. 435 ; 1906, p. 46 et suiv. Tour la législation ecclésiastique, conc. de Laodicée, can. 36 ; concile d’Ancyre, can. 4 et 23, etc. Il y eut un édit de Constance contre les Chaldéens », ob /acinorum magnitudinem ; cf. Cod. Theodos., IX. xvi. I.

Lu chrétienté occidentale.

En Occident, les

premiers docteurs qui furent en contact avec ces superstitions barbares se contentaient de les mettre, avec raison, dans la même classe que l’idolâtrie proprement dite. Purtes idulolutriæ sunt veneficia, prsecantationes, suballigaturæ. oanitates, auguria, sortes, observatio ominum, parenlalin inquam unde idolotutriæ malum exlulit caput erroris, Gaudence de Brescia, Serm.. iv. P. L., t. xx. col. fS70. Firmicus Maternus, cet astrologue converti, n’avait-il pas prévenu que « le diable prend toutes les formes pour perdre les hommes ? > P. L., t.xii, col. 1036-1040 ; cf. col. 1044. Saint Augustin n’avait-il pas enseigné que c'était forniquer avec les démons que de consulter les muthematici ? P. L., t. xxxvii, col. 76 ; cf. De civ. Dei, I. II, c. xxiv, t. xli, col. 72 : et pareillement saint Jérôme. In Jeremium, I. II, c. v, t. xxiv, col. 775. Sans doute y avait-il une grande distance entre la science, même frelatée, des anciens astrologues et la rusticité des faiseurs d’horoscopes du temps des premiers royaumes barbares. Pourtant Isidore de Séville n’hésitait pas a constater que les sorciers de son temps avaient hérité du prestige et du nom des malhematici : lloroseopi, hi sunt gui vulgo rnatliematici vocantur ; et sa liste des pratiques de sorcellerie se transmettra tout au long du Moyen Age. Llijni., t. VIII, c. ix, P. L., t. lxxxii, col. 311-312.

Pour mettre un peu de lumière dans ces assimilations désordonnées, Raban Maur, archevêque de Mayence, lance dans le second quart du ae siècle son livre, De mugicis urtibus, P. L., t. ex, col. 1095 Bq.

Il remarque sagement que, si la sorcellerie a bien été encouragée à l’origine par le diable, et « si elle a eu tant de succès dans les siècles passés, ex traditionc malorum angelorum », il faut accuser maintenant « la négligence des maîtres [chrétiens] et l’inertie des docteurs, qui permettent à quelques rares prévaricateurs de séduire les campagnards et les ignorants ». Loc. cit., col. 1107. Car il n’y a plus désormais de mages savants, mais de vulgaires malefici. Col. 1098. Mettons qu’il y ait encore quelques idolâtres qui demandent des prodiges aux démons eux-mêmes ; mais beaucoup de fidèles s’adressent à de simples « devins » ou « sorciers », qui prennent des allures chrétiennes, qui fictæ religionis per quasdam, quas sanctorum sortes vocant, aul quarumeumque scripturarum scientiam profitentur. Loc. cit., col. 1100. Dans leurs prodiges, il y a d’abord beaucoup d’illusions, et quelques-unes si grosses, qu’elles sont visibles aux ignorants euxmêmes. Puis il faut tenir compte des phénomènes extraordinaires, que Baban explique, après saint Augustin, par « des raisons séminales cachées dans la nature par le Dieu créateur ». Loc. cit., col. 1105. Enfin les devins peuvent quelquefois avoir recours aux démons, plus intelligents, plus puissants et plus expérimentés que les hommes, lbid., col. 1106. Voir encore du même auteur, P. L., t. cviii, col. 80, 459, 463 ; t. exi, col. 22, 75, 422. Ces principes, très sages dans leur généralité, amènent l'évêque à réitérer les consignes de saint Augustin : Unde cuncla vitanda sunt christiano, et des apôtres : Non est aliud nomen…, Act., iv, 12. « Qu’est-il besoin de demanderla santé à un autre qu’au médecin compétent ? Qui enim sine Satvatore salulem petit, et sine Sapienlia prudenlem fleri posse putat, non salvus sed seger, non prudens est sed stultus. Loc. cit., t. ex, col. 1097. On remarquera, avec le sens profondément évangélique de l'évêque, sa réserve sur les faits de sorcellerie : sa documentation se borne à reproduire les citations scripturaires du concile de Worms de 829 ; Ex., xxii, 18, 24, etc.

Il aurait été bien utile de mettre à jour la législation ecclésiastique sur le sujet et de s’informer des pratiques courantes. Tâche difficile à laquelle s’attacha Hincmar de Beims, vers l’année 860. Une vingtaine de questions lui avaient été posées à propos du divorce de I.othaire, dont trois visaient la sorcellerie. Il y répondit longuement, De divorlio Lotharii, interr. xv sq., P. L., t. cxxv, col. 718, mais en canoniste habitué à utiliser à toutes fins des textes désuets. Il cite, en suivant, sans broncher, la table de l’IIispana qu’il devait avoir entre les mains : la décrétale d’Innocent ad Decenlium, celle de Léon ad episc. per Italiam : Aliquanti malefici, s’en remettant comme Léon le Grand à la législation séculière (qui visait désormais les simples sorciers), celles de Grégoire le Grand, Epist., t. XII, ep. xin ; t. VII, ep. lxvi ; Synod. rom., c. xi, puis les conciles d’Ancyre, can. 4 et 23 ; le IV 8 de Carthage, c’est-à-dire les Statuta Ecclesiæ anliqua, can. 89, enfin les can. 70-73 du IIe concile de Braga, qui ne sont qu’une recension timidement adaptée par Martin de Braga des anciens synodes orientaux. L’interprétation d’Hincmar a donc plus d’importance que ses textes canoniques : ainsi trouve-t-il que le concile d’Elvire, can. 6, est trop sévère pour son temps, puisqu’il ne parle pas de pénitence possible pour le sorcier repentant.

Mais, cette érudition épu sée, il doit en venir à l’appréciation des faits de sorcellerie populaire. Or, les sorcières, dont la puissance était bien établie dans les légendes germaniques, faisaient parler d’elles dans les milieux chrétiens du ix c siècle. « On m’a demandé, écrit Hincmar, loc. cit., col. 716, s’il peut être vrai, comme le disent beaucoup de gens, qu’il y ait des femmes qui par leur maléfice puissent mettre une