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SOM MES. CLASSIFICATION


1 895 ; de Smet, De absolutione complicis et sollicitalione, 1 92 1 ; Cappello, De pmnttentia, 1929, p. 493-561. On trouvera dans de Smet, op. cit., une bibliographie assez complète, p. i-i.

F. ClMBTIER.

    1. SOMMES THÉOLOG IQUES##


SOMMES THÉOLOG IQUES. — On oppose volontiers, en traitant des productions littéraires du Moyen Age, les Sommes aux Commentaires sur les Sentences ; on mentionne avec honneur, parmi les grands noms de la scolastique, les sommlstes, et l’on parle des Sommes qu’ils ont composées comme d’un genre littéraire dans lequel certains ont excellé. Tout ceci n’est que partiellement exact. Il y a. en effet, à travers tout le Moyen Age, une foule d'écrits d’allure fort diverse qui tous arborent ce titre de Somme et qui sont très loin pourtant de constituer un genre littéraire unique. Ce serait une erreur de les traiter de la sorte.

On se propose donc ici de dégager tout d’abord de cet amoncellement les productions littéraires auxquelles on peut attribuer, au sens riche du mot, le nom de Sommes théologiques ; de déterminer leur véritable caractère, leur histoire et leur valeur ; d’en indiquer enfin quelques exemples typiques. I. Les Sommes. Étymologie et classification. II. Les Sommes théologiques (col. 2350).

I. Les Sommes. Étymologie et classification. — Par lui-même le mot Summa est susceptible de plusieurs interprétations. Il peut indiquer la somme en tant qu’elle est la résultante d’une addition, d’une accumulation de traits ou de détails. Il sera alors à peu près synonyme de compilation ou de collection, visant à être complète ; poussé à la limite, il aboutirait à l’encyclopédie. Il peut au contraire signifier la somme en tant qu’elle est le fruit de contractions, de condensations, où se trouvent retenus, et presque seuls, les traits essentiels, les summa capita. Il deviendra synonyme d’abrégé, extrait, résumé surtout. Puis, entre ces deux acceptions extrêmes, empruntant d’ailleurs à l’une et à l’autre, se dessine un troisième genre qui n’est ni le résumé sommaire, ni la compilation abondante, mais la présentation exacte et complète, organique surtout, d’où rien d’essentiel n’est omis. C’est cette troisième acception qui, se développant et se précisant, donnera naissance à ces productions auxquelles on réservera finalement l’appellation technique de sommes. Dans le premier cas l’idée qui domine est celle de recueil complet ; dans le second.de brièveté exacte ; dans le troisième de présentation organique.

L.soiL)fj, s-coifp/LATioJfS — On peut passer assez rapidement sur ce premier groupe ; car, encore que cette acception soit réelle et connue, cette division est plutôt d’ordre théorique que pratique. Il est rare qu’une compilation de quelque ampleur ne soit pas déjà un exposé systématique, qu’elle n’ait un plan, et donc un minimum d’organisation. Il est rare encore qu’il y ait, au Moyen Age, de véritables encyclopédies, conçues du moins à la façon d’un ouvrage unique arborant le nom de somme. L'œuvre encyclopédique d’un Albert le Grand ou d’un Guillaume d’Auvergne ne porte pas ce nom, et demeure fractionnée en un grand nombre de traités. Et à la fin du xiiie siècle, Raymond Lulle dans son Grand art et ses divisions innombrables n'évite pas non plus le morcellement. Quant à Roger Bacon, il appellera son essai Opus majus, Opus minus ou Opus lertium.

Il reste cependant que le terme de somme se voit appliqué à diverses œuvres dans lesquelles l’aspect de collection ou compilation est beaucoup plus accusé que celui de systématisation. Les genres en sont variés d’ailleurs.

Genre homilélique.

La collection peut appartenir en effet au genre homilétique ou parénétique, recueillir des sentences ou des exemples dont les prédicateurs feront leur profit. La variété en sera grande :

depuis la Summa de arte priedicatoria d’Alain de Lille, jusqu'à la Summa de vitiis et virtutibus de Jean de Galles (appelée aussi Collrcliloquium), voir Th. -M. Charlandi Arles prirdicandi, Ottawa, 1936, p. 55 ; en passant peut-être par le Yerbum abbreviatum de Pierre le Chantre qui est désigné parfois sous le même titre de Summa de viliis et virtutibus ou sous celui de Summa philosophiæ ; sans omettre surtout ces collections de sermons qui se multiplient, portant ou non le nom de sommes, comme celle d’Evrard Du Val par exemple : Summa sernwnum de festis et de sanctis ; et bien avant lui, sous un titre semblable, le recueil non moins célèbre de Jean Halgrin d’Abbeville ; comme toutes ces collections de Guillaume de Mailly, de Pierre de SaintBenoît, d’Arlotto da Prato, de Servasanto de Fænza, qu’on désigne par le nom de leur auteur, ou par leur incipit plus simplement : Præcinxisli ; Abjiciamus ; Suspendium ; Legifer ; le Communiloquium ou Summa collationum de Jean de Galles, et tant d’autres collections de même genre, dont le patient dépouillement a été opéré par J.-Th. Welter dans son étude sur L’exemplum dans la littérature religieuse et didactique du Moyen Age, Paris, 1927.

Genre exégétique.

La collection peut tenir davantage du genre exégétique. Elle groupera alors sur les

textes de l’Ecriture, sur ses passages difficiles surtout, sur un livre donné ou même sur toute la suite des Livres saints, les explications des Pères ou des commentateurs. Et c’est alors le domaine fort large des sommes dans le genre de la Summa super Psalterium de Prévostin, ou de la Summa Abel de Pierre le Chantre, le premier genre se rapprochant davantage de la glose, le second du dictionnaire biblique. Cette Summa Abel (vers 1196) est diversement présentée dans les manuscrits ou sous le titre de Distincliones ou sous celui d’Exposiliones vocabulorum lîiblie secundum alphabetum, ce dernier indiquant et son objet et sa méthode. Elle est en effet un des plus beaux exemples de ces Distinctiones qui allaient se multipliant à cette époque. Les sens divers : littéral, allégorique, tropologique, anagogique, que les commentateurs « distinguaient » dans chaque texte se trouvent, dans ces œuvres, présentés de façon frappante, sous formes de schèmes, où des accolades et des traits, en rouge ou en noir, relient à chaque mot expliqué les sens dont il est capable. Véritable aidemémoire figuré, la Summa Abel compte ainsi quelque 1250 distinctions rangées suivant l’ordre alphabétique, de Abel à Xrus (Christus). Auprès d’elle on peut signaler l’ouvrage de Guillaume de Montibus, Distinctiones secundum ordinem alphabeti ; celui de Garnier de Rochefort († 1202), de Angélus à Zona ; les Distinctiones de Fr. Mauritius qui commencent par Abjcctio : ms. Vatic. lat. 980 ; Oltob. lat. 400 ; Oxford, Merton Collège, 102 ; la Summa liritonis, aussi ; et quantité d’autres qui portent d’ailleurs plutôt le nom de Distinctions que celui de Sommes. Voir Lacombe, La vie et les œuvres de Prévostin, 1927, p. 117-130. L’autre tendance que traduit la Summa super Psalterium de Prévostin (11961198) est toute proche de la glose, encore que cette œuvre de Prévostin ait dû être prêchée ; ainsi d’ailleurs que les Distinctiones in Psalterium de Pierre de Poitiers (avant septembre 1196) ou l’Expositio in Psalterium de Pierre le Chantre, et plus tard le Commentaire sur les psaumes de Philippe le Chancelier, et peut-être ceux d’Eudes (Odon) de Châteauroux.

Genre théologique.

D’autres collections enfin

toucheront plus directement aux matières théologiques. Moins évoluées pourtant que les sommes systématiques dont il sera question plus loin, elles se rattachent encore nettement au genre et aux procédés des tlorilèges ou des deflorationes dans lesquels la préoccupation dominante est de recueillir les extraits et les sentences des Pères, des écrivains plus récents, voire