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SILYESTRK II


à ricTi de moins qu’à un bouleversement total de la constitution ecclésiastique. Arnoul l’emporta néanmoins et le concile se décida à procéder contre l’archevêque ; il fut déposé dans les formes et dégradé et consentit à ce qu’on lui donnât un successeur. A sa place, dès le lendemain, on élisait Gerbert qui fut prestement sacré et intronisé.

3. Gerbert archevêque de Reims.

Averti sans doute par les évêques de Lotharingie et d’Allemagne, Jean XV, dès 992, envoyait à Aix-la-Chapelle comme légat du Saint-Siège, Léon, abbé du monastère romain de Saint-Bon if ace. La lettre qu’il apportait, Jaffé, n. 3841, prescrivait aux évoques français de venir à Aix pour ventiler toute l’affaire. Comme ces prélats ne se hâtaient point, le légat repartait bientôt pour la Curie, d’où une sommation fut adressée aux mêmes évêques et aux deux rois de se rendre à Rome pour donner les explications nécessaires. Jaffé, n. 3815. En France, on fit encore la sourde oreille, Léon se remit donc en route pour l’Allemagne et, rassemblant un concile à Ingelheim, au cours de 991, il demanda aux évêques allemands de casser les actes de Saint-liasle, ce qui fut fait.

Fort de cet appui, Jean XV pouvait procéder contre les récalcitrants. L’ne lettre de Gerbert montre que le pape entendit lancer une sentence d’excommunication contre l’archevêque de Reims et les membres du concile de Saint-Basle. Epist., cxcii, édition Havet, p. 182, à Séguin de Sens. De pareille sentence, Gerbert contestait la légalité : « Les privilèges de Pierre, répétait-il, n’ont plus de valeur quand les règles de L’équité ne sont pas observées. » Pour faire front contre les prétentions romaines, un concile se rassemblait à (’.belles, au cours de 995, sous la présidence du roi Robert. Voir le récit dans Ricber, op. cit., t. IV, c. lxxxix, col. 160. Gerbert, comme à Verzy, mais cette fois à visage découvert, était l’âme de la résistance au Saint-Siège. Si le pape, disait-il, avançait une opinion contraire aux canons des Pères, il n’y avait qu’à la tenir pour nulle et non avenue, car il est écrit : « Fuyez l’hérétique, fuyez l’homme qui se sépare de l’Église. » On approuva une fois de plus l’abdication d’Arnoul de Reims et la promotion de Gerbert.

Mais le légat pontifical Léon, qui conservait le contact avec l’épiscopat de Germanie et de Lorraine et créait, par ses agissements, de sérieux embarras au roi Hugues, donna derechef rendez-vous aux évêques de ces pays et à ceux de France à Mouzon, sur la .Meuse. Défense fut faite aux prélats français de s’y rendre ; mais Gerbert sentait croître contre lui les défiances. Voir les lettres de justification qu’il écrit alors aux évoques de Liège et de Strasbourg. Epist., cxciii, ccxvii, édition Havet. Il ne put éviter de comparaître et de s’expliquer quin 995). Il le fit en des termes dont la modération fait contraste avec le ton passionnéque l’on avait pris à Saint-Basic ; somme toute, il ne se réclamait que de son entière bonne foi, dans une affaire où toutes les apparences étaient contre Arnoul. Voir son discours dans P. 1.., t. cxxxix, col. 313-316, à compléter par Ricber, t. IV, c. cn-cv, t. CXXXVlll, col. 166 L69. Cette attitude fit bonne impression ; les évêques comprirent sans doute que la cause d’Arnoul était médiocre, on se mit d’accord pour la reprendre a Reims un mois plus tard. Le légat, néanmoins, fit entendre a Gerbert qu’il devrait se considérer comme suspens et, tout en récriminant, l’archevêque promit de ne poinl célébrer jusqu’au

1 er juillet, date fixée pour le concile. Nous ne savons

si cette assemblée se tint : il semble que L’affaire soll encore demeurée en suspens. Mais, de ce chef, la situation de Gerbert à Reims devenait Intenable, car ses ennemis rappelaient qu’il demeurait sous le coup de l’excommunication lancée par Jean XV. Autour de lui

les défections se multipliaient ; ses clercs même refusaient de s’asseoir à sa table. Cf. Epist., clxxxi, à la reine Adélaïde. Il crut bon de céder (levant l’orage. Avec la cour d’Otton III, il avait conservé de bons rapports ; au printemps de 996, il rejoignit le jeune roi qui descendait en Italie pour y chercher la couronne impériale, espérant que celui-ci s’interposerait auprès de Jean XV.

3. Gerbert en Italie.

Or, ce pape disparaissait au moment même de l’arrivée d’Otton III et, pour le remplacer, le roi désignait un de ses chapelains qui devenait Grégoire Y. Malgré ses attaches avec la cour germanique, celui-ci ne paraissait guère pressé de liquider l’affaire de la succession de Heims et parlait de Gerbert comme d’un intrus. Jatfé, n. 3866. La mort d’Hugues Capet (octobre 996), le plus ferme soutien de l’archevêque, achevait de découvrir celui-ci. Au concile tenu par Grégoire V à Pavie, en février 997, le pape déclarait suspens des fonctions épiscopales les évêques ayant pris part à la déposition d’Arnoul, pour n’avoir pas obéi aux monitions ultérieures du Saint-Siège. Gerbert, qui était rentré en France — il était en mars 997 à un synode tenu à Saint-Denis — ne pouvait plus demeurer à Reims. Il reprit le chemin de l’Allemagne, puis accompagna Otton III dans sa deuxième campagne en Italie, qui devait mater la révolte de Crescentius (printemps 998). A peine le calme revenu dans Home. Gerbert, par la volonté d’Otton et du consentement de Grégoire V, était nommé archevêque de Ha venue. Jaffé, n. 3883 (28 avril 998).

Sitôt nommé, Gerbert se faisait à Ravenne le promoteur de la réforme ecclésiastique. Voir Mansi, Concil., t. xix. col. 219. De même secondait-il avec zèle l’action de Grégoire Y. Aux derniers mois de 998, il était aux côtés du pape en ce fameux concile de Saint-Pierre qui menaça d’excommunication le roi Robert le Pieux et les évêques qui avaient favorisé son mariage avec Berthe, sa cousine, régla avec autorité diverses causes épiscopales, tant en Allemagne qu’en France, bref, procéda justement selon les principes contre lesquels avait si vivement protesté le concile de Saint-Basle. Mansi, ibid., col. 225-226.

Quelques semaines plus tard, mourait le pape Grégoire V (18 février 999). Comme le dit son épitaphe, c’était la volonté d’Otton III « qui lui avait confié le bercail de Pierre ». Cette même volonté faisait monter sur la chaire apostolique, le 2 avril 999, Gerbert, archevêque de Ravenne. L’un des premiers protagonistes de ce que l’on pourrait déjà appeler le gallicanisme ecclésiastique devenait, de ce chef, le pape Silvestre II.

II. Le pontificat de Silvf.stre IL — -Trop bref

— il durera un peu plus de quatre ans — le pontificat de Silvestre II ne donnera pas tous les résultats qu’on aurait pu en attendre. Il marque néanmoins un renforcement passager de l’autorité du Saint Siège et il n’est pas sans intérêt de voir Gerbert se montrer intransigeant dans la défense des droits traditionnels du Siège apostolique.

Un de ses premiers actes était pour régler en Allemagne la question de l’ambitieux Gislar qui, évêque de Mersebourg et ne pouvant devenir archevêque de Magdebourg, avait imaginé, en 981, de Faire supprimer la distinction des deux diocèses et se considérait comme archevêque dans L’unique ressort ainsi créé. Fout puissant auprès de l’empereur Otton II, il avait

arrach ; au s unt-Snge par l intermidi lira de tehn ii,

une approbation telle quelle de ses agissements. Mais les vues d’Otton III n’étaient point celles de son père ; L’affaire de Gislar fut évoquée au synode romain qui suivit l’accession de Silvestre. I.a suspense ab officia fut prononcée par le pape contre l’archevêque qui s’était montré récalcitrant aux ordres du pape Grégoire v.