Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 14.2.djvu/284

Cette page n’a pas encore été corrigée
2069
2070
SILVESTRE I er (SAINT)


tioche de 324, qui se rangea aux côtés d’Alexandre. Voir sur ce synode, G. Hardy, dans Fliche-Martin,

Histoire de l’Eglise, t. iii, p. 7 1. Mais il semble que, du jour où Constantin se fut saisi de l’affaire alexandrine. on ait oublié, plus que de raison, le rôle qui revenait au pape dans une question de cette importance. Silvestre fut simplement invité, comme les autres évoques de l’empire, au concile qui, sur ordre impérial, se réunirait à Nicée. Il y délégua les deux prêtres romains Victor et Vincent ; mais ces deux légats — ces cardinaux d’avant la lettre — n’eurent certainement pas au concile le rôle qui reviendra, cent ans plus tard, aux légats du pape Léon à Chalcédoine. A la vérité, bien que simples prêtres, ils signeront au procèsverbal avant l’ensemble des évêques, mais seulement après Hosius, qui a été le vrai président du concile. Sans doute, par la suite, on a cherché à représenter Hosius comme ayant été délégué par Silvestre. Dès la fin du ve siècle, Gélase de Cyzique se fait l'écho de cette idée. Hisl. eccl., t. II, c. v, édit. Lœschke-Heinemann, p. 44. Mais, quinze ans après Nicée, le pape Jules ne sait rien de cette délégation ; la Curie, dit-il, a été renseignée sur ce qui s’est passé à Nicée par les prêtres romains qui étaient au concile, Id quoque (l’orthodoxie de Marcel d’Ancyre) ttstali sunt et presbyteri nostri qui Xicense synodo adjuerant, P. L., t. viii, col. 900 D. De quelque considération, d’ailleurs, qu’aient été entourés à Nicée les représentants du Siège apostolique, il est impossible de dire s’ils ont eu une influence sur les principales décisions du concile. Quant à une approbation demandée et obtenue du pape en faveur de celles-ci, il est tout aussi impossible de la démontrer. Nous dirons plus loin comment la légende a suppléé ici aux lacunes de l’histoire. Pour cette question du pape Silvestre et de Nicée, voir l’article Nicée ( I" concile de), t. xi, col. 399-417, et spécialement col. 402, 404, 417. Pour la discussion du can. 6, voir l’art. Patriarcats, t. xi, col. 2253-2259.

Il reste que saint Silvestre a été dans Rome l’un des témoins et même l’un des acteurs principaux du grand changement qui s’opère dans la situation du christianisme. Rudement persécuté dix ans plus tôt, celui-ci devient la religion tout spécialement choyée par le souverain. Les munificences impériales, en particulier l'érection et l’opulente dotation des grandes basiliques chrétiennes, sont le témoignage extérieur de ce brusque revirement. En insérant dans sa notice une documentation considérable relative aux constructions de l'époque, le rédacteur de la seconde édition du Liber pontificalis a donné la meilleure démonstration de ce qu’a été le pontificat de Silvestre : la Rome païenne commence à devenir la Rome chrétienne. Par les soins de Constantin s'élèvent : la Basilique constantinienne (Saint-Jean de Latran) avec son baptistère ; Saint-Pierre, où est déposé le sarcophage contenant les reliques du prince des apôtres ; Saint-Paul-hors-les-Murs, où est transporté le corps de l’Apôtre des gentils ; la Basilique sessorienne (SainteCroix de Jérusalem), où sera déposée ultérieurement une importante relique de la vraie croix ; Saintevgnès sur la voie Nomentane ; Saint-Laurent sur la Ivoie Tiburtine, sans compter d’autres édifices dans la petite ou la grande banlieue. Tous ces sanctuaires élevés ou au moins commencés au temps du pape Silvestre, plusieurs à sa suggestion, n’ont pas peu contribué à augmenter le prestige <ie la chaire apostolique. Et cette transformation de Rome a réagi à son tour sur le souvenir du pape qui en avait été le témoin. Sa notice se termine sur une note qui interlent rarement au Liber pontificalis : Qui l’ero calliolicus et confasor quievit. Mais, aussi bien, dès ce moment la de avait énergiquement travaillé sur la mémoire le Silvestre.

II. Données légendaires, — On peut distinguer celles qui ont déjà laissé des traces dans le Liber pontificalis (2e édition de la fin du vi c siècle), et celles qui, prenant leur point d’appui dans ces données, les ont ultérieurement prolongées.

1° Données du « Liber pontificalis ». — 1. La conversion et le baptême de Constantin. — D’après la notice, au début de son pontificat, Silvestre est « en exil », au mont Soracte, puis, « revenant avec gloire, il baptisa l’empereur Constantin, que le Seigneur guérit (alors) de la lèpre ; c'était pour fuir la persécution de celui-ci que Silvestre s'était ainsi enfui en exil ». Cette présentation des événements est une suite de contre-vérités. Constantin n’a jamais persécuté les chrétiens ; par ailleurs, il n’a certainement pas été baptisé au début de sa « conversion » au christianisme, il ne l’a pas été à Rome. C’est aux tout derniers jours de sa vie qu’il le fut, à Nicomédie, par l'évêque arianisant de cette ville, Eusèbe. Cf. Eusèbe de Césarée, Vita Constantini, 1. 1 V, c.lxi ; Socrates, Hist. eccl., 1. 1, c. xxxix ; Sozomène, Hist. eccl., t. II, c. xxxiv.

Or, toute cette narration du Liber pontificalis est empruntée à un roman, la Vita Silvestri, dont l’on trouvera une des formes dans Mombritius, Sanctuarium, nouvelle édition, t. ii, p. 508-531. Levison en a fait connaître une forme assez différente et qui semble l’original : Konstantinische Schenkung und Siluesterlegende, dans Mélanges Ehrle, publiés dans Studie lesti, n. 38, t. ii, 1924, p. 159-247. La jeunesse et l'éducation de Silvestre y sont d’abord longuement racontées, puis ses ordinations, par Miltiade, comme diacre et comme prêtre, son élection enfin au siège pontifical. Mais une violente persécution est déclenchée contre les chrétiens par Constantin ; Silvestre s’enfuit au mont Soracte. Cependant l’empereur, atteint de la lèpre, reçoit des prêtres païens le conseil de prendre pour guérir un bain dans le sang de petits enfants ; il en fait rassembler un grand nombre. Finalement, il est pris de pitié et renvoie les mères qui les avaient amenés en leur rendant leur progéniture. Sa clémence est récompensée ; la nuit suivante, lui apparaissent deux personnages inconnus de lui, qui ne sont autres que les apôtres Pierre et Paul. Ils lui conseillent de faire chercher Silvestre qui lui indiquera un bain de nature à lui rendre la santé. Ainsi est-il fait. Silvestre, amené devant Constantin, lui fait reconnaître dans les images des saints apôtres, qu’il lui montre, les deux personnages que l’empereur a vus en songe, le renseigne sur le bain qui doit le regénérer et qui n’est autre que le baptême. Le souverain accepte, non sans avoir reçu et promis d’accomplir la pénitence que lui impose Silvestre : aumônes, fermeture des temples païens, élargissement des prisonniers. Le baptême est conféré à Constantin, dans la piscine des bains du palais des Lalerani ; l’empereur en sort purifié dans son âme et dans son corps, qui est soudainement guéri. Durant toute la semaine qu’il passe in albis (revêtu du costume blanc des néophytes), le souverain édicté diverses mesures en faveur des chrétiens, la plus importante est celle qui reconnaît l’autorité du pontife romain sur tous les évêques : privilegium Ecclesiæ romanie pontificique conlulit ut in loto orbe romano sacerdoles ita hune caput habcanl sicut omnes judices (les fonctionnaires) regem. Le huitième jour, albis deposilis, il vient à la confession de saint Pierre et, après une longue prostration, il prend lui-même la pioche et commence le tracé des fondations d’une nouvelle basilique ; même acte le lendemain pour fonder la basilique du Latran. Sont ensuite rapportés les efïorts faits par Constantin pour amener au christianisme les sénateurs attachés à la vieille religion et sa mère Hélène, qui est passée au judaïsme. Une conférence contradictoire est organisée entre juifs et chré-