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1931 SERIPANDO (JÉROME). ROLE DOCTRINAL 1932

mai 1545, Seripando avait une réputation solidement établie. Son activité antérieure, ses travaux et ses écrits, sa qualité de maître général d’un ordre illustre, son amitié avec les cardinaux Cervini et Poie, deuxième et troisième présidents du concile, tout devait contribuer à lui assurer une place importante dans l'assemblée chargée d’opérer la réforme de l'Église. De fait, dés l’ouverture des travaux, il se fit remarquer par l'étendue de son savoir, la netteté de ses opinions et par son zèle pour la réforme. Cervini. qui avait la plus grande part dans la direction du concile, employa très habilement le général des ermites de Saint-Augustin à préparer les matières qui devaient faire l’objet des discussions du concile.

La première intervention de Seripando fui très remarquée. Le décret de la 11e session donnait comme titre au concile les mots Sacrosancta Tridentina Syno dus sans y ajouter la formule employée par les anciens conciles : unioersalem Ecclesiam représentons ; plusieurs évêques protestèrent contre cette omission et créèrent ainsi une grosse difficulté aux légats qui ne voulaient pas de la formule parce qu’ils y voyaient une concession aux protestants. Dans la congrégation générale du 13 janvier 1546, les cardinaux Cervini, Madruzzo et Pacbeco, Pévêque d’Astorga, Diego de Alaba y Esquive], prirent la parole sans trop réussir à calmer les opposants. Seripando se leva alors et, avec beaucoup d’habileté, fit remarquer qu’il ne s’agissait pas de renoncer définitivement à la formule, i mais de ne pas s’en servir provisoirement, en attendant que le nombre de ceux qui participaient au concile fût devenu plus considérable et que l’assemblée eût voté des décrets assez importants pour justifier un si grand qualificatif ». Conc. Trid., t. iv, p. 565 sq. Les évêques opposants se déclarèrent satisfaits.

Cette première discussion n'était rien auprès de celles qui allaient suivre. Jusqu’alors le concile n’avait eu à s’occuper que de l'élaboration de son règlement cl de la fixation de son ordre du jour ; la IVe session aborda enfin les questions doctrinales en traitant du canon des Écritures et des traditions apostoliques. Parmi les discussions qui se produisirent à ce sujet, on remarqua beaucoup l’intervention de Seripando. Avec vigueur, le général des augustins proposa au eoneile d’adopter la distinction — renouvelée de Cajétan entre livres authentiques et canoniques, fondement de la foi, et livres simplement canoniques, utiles à la foi, Conc. Trid., i. v, p. 7 ; malgré l’appui des dominicains, en particulier de l'évêque de Fano, Pietro Berlano, Seripando ne réussit pas à faire admettre son point de vue ; il eut néanmoins une part relativement active à la rédaction du décret de cette session, ibirf., p. 54 ; son rôle devait être beaucoup plus important dans la session suivante consacrée à l’examen delà question du péché origine).

Auparavant Seripando dut prendre la parole contre le bouillant évèquc de l-'icsole, Hræei-Martclli - l’un des tenants de la formule universalem Ecclesiam représentons — qui avait violemment manifesté contre les privilèges des moines en matière de prédication. L'évêque dominicain, Thomas Gaselli, île Bertinoro, en défendant la cause des religieux, était tombé dans l’excès opposé et n’avait fait qu’envenimer le débat. Le discours de Seripando produisit une profonde impression, i il écarta avec beaucoup de calme et d’intelligence les raisons invoquées par les évêques ou les

religieux pour l’exercice de la prédication. Il montra clairement que les évêques et les curés, dans l'état

actuel des choses, ne pouvaient suffire aux besoins

d'évangélisation d’un diocèse. Après qu’il eut prouvé la nécessité de recourir au concours des moines, il montra combien il sérail injuste de les faire dépendre, jusque dans leurs propres églises, ent ièreiiient de la

volonté des évêques, Pastor, llisi. des papes, trad.

l’oiLat. t. xii. p. lit', ; cf. Conc. Trid.. t. v, p. 132 sq.

A cet te séance, qui eut lieu le 21 mai 1546, le concile avait décidé de mettre à l'étude la question du péché originel. Seripando fut chargé par les légats de dresser, avec l’aide d’autres théologiens, une liste des principales erreurs sur ce sujet. Cette liste fut proposée aux Pères le 9 juin. Les discussions avaient commencé Cependant avant cette date ; Seripando y apparia plus d’une fois la lumière (cf. par ex. Conc. Trid., i. v. il 194-195). Les légats lui demandèrent de collaborer à la rédaction du décret qui fut promulgué le 17 juin. Le texte primitif avait été proposé le S juin et souleva de nombreuses observations de la part des Pères et des théologiens. Une des discussions les plus vives eut lieu a propos du canon 2. Le texte du projet portait qu’Adam avait transmis, secundum communem legem, non seulement la mari et les peines du corps, mais aussi le péché qui est la mort de l'âme. L’incise secundum communem legem était ambiguë par rapport à l’immaculée conception de.Marie ; plusieurs Pères sollicitèrent une addition au texte, par exemple le cardinal Pacheco, qui souleva l’indignation des dominicains par son contre-projet : nisi Deus alicui ex privilégia dederit, prout in bsata Virgine. Seripando intervint en en appelant au témoignage des universités en faveur de l’immaculée conception ; il se montrait cependant partisan du maintien de l’incise (n'était il pas un des rédacteurs ?). Le concile cependant ne le suivit pas et supprim’a purement et simplement la formule sans vouloir trancher le débat. Conc. Trid., t. v, p. 202 sq. ; cf. Cavallera, Le décret du concile de Trente sur le péché originel, dans Bulletin de litt. ceci. (Toulouse), 1913, p. 294-296.

La discussion sur le péché originel avait amené le concile à s’occuper de la question éminemment actuelle de la justification. Du 22 au 28 juin eurent lieu des discussions préalables sur les points les plus difficiles. A partir du 30 juin, les Pères furent invités à examiner un programme en trois points, répondant aux trois états dans lesquels l’homme peut être considéré. A propos du premier état (celui de l’homme qui accède à la foi), Seripando intervint longuement dans la congrégation générale du 13 juillet. Conc. Trid., t. v, j>. 337 sq. Cette communication fut très remarquée, parce que son auteur y manifestait nettement sa tendance augustinienné, réduisant la part de l’homme au profit de la grâce. Ibid.. p. 337 sq. Le 23 juillet, Seripando prit de nouveau la parole au sujet du deuxième état (celui de l’homme déjà justifié), sur le point précis du mérite ; s’inspirant principalement de saint Augustin et de saint Bernard, le général des ermites montra comment les bonnes œuvres accomplies sous l’influence de la foi et de la grâce sont méritoires de la vie éternelle : Dico quod, sicut vita wterna me.rc.es dicitur in sacris litleris et gratin, sic opéra dic.i possunt mérita, sed debent cliam dici dona, P. 373 sq. Le lendemain, 2 1 juillet, on distribuait aux Pères un projet de décret sur la justification, dû à la collaboration de l’archevêque d’Armagh, Robert Vauchop, et du franciscain observant in André de Vega. Ce projet ne satisfit personne et fut finalement rejeté à cause des tendances seolisles qui s’y manifestaient. Le jour même. Cervini prit l’affaire en 'nain cl confia la rédaction d’un nouveau projet à Seripando.

Le général des augustins a raconté les vicissitudes de sa collaborai ion. Conc. Trid., I. ii, p. 428-432. Cervini lui demandait de rédiger un décret De justificatione selon les vues qu’il lui exprima. Le texte fut prêt le il août : il est publié ibid., t.. p. 821 828. Une

seconde rédaction, avec quelques modifications de

détail, fut présentée le 19, t. v, p. 828-833. Mais pendant ce temps, Cervini consultait également d’autres