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1909

SERA PION DE THMUIS

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au concile de Sardlque et y avoir soutenu la cause de l'évêque d’Alexandrie. Apol. vont. Arianos, c. L. Vers 355, nous le trouvons à la tête d’une ambassade envoyée à I empereur Constance pour réfuter les griefs soulevés par les ariens contre saint Athanase. Soxomène, Hist. eccles., I. IN', c. ix. Il peut se faire qu'à la suite de cette mission infructueuse. Sérapion ait été envoyé en exil. Du moins saint Jérôme nous apprend-il qu’il mérita la palme des confesseurs, De rir. ill.. xc.ix. P. /… t. xxui. col. 699 ; cf. Epist., lxx. Ad Magnum, I :. Photius, Contra manich., 1. xi. P. G., t. eu. col. 32-33 ; Bibliotheca, cod. lxxxv. P. G., t. cm. col. 288. fin tout cas ce n'était pas lui qui était sur le siège épiscopaJ de Thmuis en 359 ; à cette date, l'évêque de Thmuis était un arien du nom de Ptolémée, qui prit part au concile de Séleucie. Epiphane, Hseres., î.xxiii. 26. Nous ne saxons rien des dernières années et de la mort de Sérapion. On peut seulement remarquer que saint Athanase lui adressa une lettre sur la mort d’Arius. P. G., t. xxv. col. 085690. et plusieurs lettres sur la question du Saint-Esprit, t. xxvi. col. 529-676, et que ces écrits paraissent remonter à la période 356-362.

Sozomène assure que Sérapion était un homme de la plus grande sainteté de vie et d’une éloquence extraordinaire, Hist. eccles., t. IV, c. îx. et saint Jérôme ajoute qu’il mérita le surnom de scholasticus, à cause de l'élégance de sou esprit. De l’ir.. xci.x. I.e même auteur donne le catalogue de ses écrits : Edidii adversum manichseam egregium libram et de psalmorum titulis alium et ad diversos utiles epistolas. Nous ne connaissons rien du livre sur les titres des psaumes, qui n’a laissé aucune trace. Deux des lettres ont été conservées en entier : un mot de consolation à un évoque malade du nom d’Eudoxe. et une lettre assez longue aux moines d’Alexandrie. P. G., t. xl, col. 921 sq. Nous connaissons également un fragment de la xx ! ^ lettre de Sérapion, ce qui indique l’existence d’une collection de ces lettres. Pitra, Analecta sacra et classica. t. i, Paris. 1888, p. 47. P. Martin a publié, cf. Pitra. Analecta sacra, t. iv, Paris. 1883, p. 214-215. 443-444, trois petits fragments syriaques sous le nom de Sérapion, extraits l’un d’une homélie sur la virginité, l’autre d’une lettre à des évêques confesseurs, le troisième d’un écrit incertain. L’authenticité de ces trois fragments n’est pas hors de conteste. Par contre, celle des deux lettres semble bien établie, et l’on a relevé de nombreuses analogies entre leur style et celui du traité contre les manichéens ; cf. RobertP. Casey, Sérapion of Thmuis against the manichees, Cambridge, 1931, p. 12-15.

Le seul ouvrage entier que nous possédons de Sérapion est ce traité contre les manichéens, dont nous connaissons actuellement cinq manuscrits, le meilleur de ceux-ci étant un codex de l’Athos, du xiie siècle, découvert en 1924. Cf. R.-P. Casey. The text of the antimanichean writings of Titus of lioslra and Sérapion of Thmuis, dans The Harvard theological review, t. xxi, 1928, p. 97-111. Dans tous nos mss, l’ouvrage de Sérapion est suivi de celui de Titus de Bostra, sur le même sujet ; et le ms. de Gênes, qui semble bien l’archétype des autres a l’exception de celui de l’Athos, présente dans l’arrangement de ses feuillets un tel désordre qu’une partie du texte de Sérapion figure au milieu du traité de Titus. Déjà en 1859, P. de Lagarde s'était aperçu que le livre de Titus comportait celle interpolation ou mieux ce bloc erratique, niais il n’avait pas cherché a en connaître le véritable auteur..1. Dràseke, Gesammelle patristische t’ntcrsuehungen, Altona, 1889, p. 1-2 1. avait attribué ce morceau à Georges de Laodicée, mais cette attribution n’avait pas été retenue, et pour cause. Ce fut seulement Brinkmann, Die Streitschrift des Sérapion

ron Thmuis gegen die Manichûer, dans Sitzungs berichte de l’académie des sciences de Merlin, 1894, p. 179-191. qui montra que le passage retiré par Lagarde à l'œuvre de Titus devait être restitué au livre de Sérapion. Par suite de l’interversion d’un cahier, ce ne sont pas moins des trois quarts du livre de l'évêque de Thmuis qui axaient été indûment installes dans celui de Titus ; savoir toute sa dernière partie depuis le c. xxv. La découverte du manuscrit de l’Athos a résolu définitivement la question, si tant est qu’elle ait p » encore se poser, et a permis de combler une lacune qui subsistait dans notre texte par suite de la disparition d’une page dans le ms. de Gênes. L'édition de Basnage, 1725, reproduite en 1769 par Gallandi, puis par Migne, P. ( ;., t. xi, , col. 899924, est de ce chef devenue inutilisable. Lille doit être remplacée par celle de Robert-P. Casey. Sérapion of Thmuis. against the manichees, dans Harvard theological studies, t. xv, Cambridge, 1931, dont l’introduction contient une précieuse étude sur le style et la rhétorique de Sérapion.

Il faut bien reconnaître que Sérapion n’a du manichéisme qu’une connaissance assez superficielle et qu’il est assez inutile de s’adresser à lui pour étudier la doctrine de ces hérétiques. Il en connaît à peu près ce que tout le monde en sait, sans avoir lu les livres de Mani ou de ses disciples, par ouï-dire et peut-être par des rapports personnels avec quelques adhérents de la secte. Sérapion ne dissimule pas d’ailleurs qu’il se propose de combattre la doctrine, non pas de l’exposer, et son livre est essentiellement polémique ; il réfute les thèses fondamentales sur le dualisme et l’origine du mal ; parfois même, semble-t-il, il lui arrive d’imaginer des objections pour avoir le plaisir de les réfuter. On peut relever, parmi les points essentiels de sa démonstration, ce qu’il dit pour défendre l’Ancien Testament que rejetaient les manichéens : le Nouveau Testament est fondé sur l’Ancien, si bien qu’on ne peut recevoir l’un sans accepter l’autre ; l’enseignement moral de l’Ancien Testament est si excellent cpi’il ne peut pas avoir été proposé par le démon.

Le principal intérêt de l’ouvrage de Sérapion est peut-être de nous faire connaître les idées personnelles de l’auteur. Sérapion nous apparaît ainsi comme un curieux mélange d’intellectualisme, formé à l'école de Clément et d’Origène, et d’ascétisme inspiré par les exemples et les leçons de saint Antoine. Loin d’accepter l’allégorisme d’Origène, il pense que, si la Bible a un sens spirituel, c’est seulement en ce qu’elle est inspirée par l’Esprit de Dieu et que sa lecture détourne l’esprit du péché en l’amenant à une véritable conversation avec Dieu. C. xliii.

Sa théologie est des plus simples. Il n’emploie, pour parler de Dieu que les mots courants, 6s6ç ou ô 6eôç ; 7rav/)p lorsqu’il le met en relations avec le Fils ; 7C0l7)Tfjç, 7TC7TO'."/5XO>ç, XTiaTYjç, SYj(i.'.oupYÔç. lorsqu’il le met en relations avec l’univers créé. Il ne se sert pas du mot ô(i.oo’jaioç pour exprimer les rapports du Père et du Fils, et se contente du terme vague 8[Zoloç. C. xlviii, lignes 15, 21, édit. Casey. De même lorsqu’il s’agit du Christ, Sérapion n’apporte aucune précision : il se contente de dire que le Sauveur a eu un corps mortel. qu’il a porté un corps semblable aux nôtres. C. lui, I. 23. Il ne faut pas épiloguer sur ces expressions. Elles montrent simplement que l'évêque de Thmuis n’avait pas à intervenir dans les grandes controverses doctrinales de son temps et que, pour instruire ses ouailles, il pouvait se ((intenter d’un vocabulaire assez simple. Si d’ail leurs, les lettres de saint Athanase sur le Saint-Esprit lui sont véritablement adres

secs, elles proiivent qu’il était capable a l'0C< (le s’intéresser aux vrais problèmes théologiques.