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SEMI-PÉLAGIENS. REACTION CONTRE LE DE CORREPTIONE

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laisser-faire et de laisser-aller. Porté on ne sait comment à Saint-Victor, le De eorreptione et gralia suscita l’inquiétude, la contradiction même de la pari surtout drv chefs de la communauté. Parmi les moines, cepen dant, il en étail de favorables à l’augustinisme le » lus strict. Simples laïques et dès lors peu qualifiés pour se mesurer avec les vétérans, dont plusieurs étaient honorés du sacerdoce, ils avaient cependant le courage de leurs opinions. Des discussions s’engagèrent à SaintVictor, peut-être aussi à Lérins ; elles amenèrent les chefs du monachisme gaulois à mettre au clair leurs idées.

Sur ces joutes théologiques, nous sommes renseignés p. iideux lettres qu’adressèrent à Augustin, au cours de 128, deux adeptes très fervents de sa doctrine, Prosper et Hilaire. Dans correspondance de s. Augustin, Epist., ccxxv et ccxxvi, /'. 1… t. xxxiii, col. 1002 et 1007

l. L’opposition antiauguslinienne selon Prosper et Hilaire. C’est Hilaire qui avait pris l’initiative d'écrire a llippone : niais, sa lettre terminée, il s’aperçut que son exposé de la doctrine antiaugustinienne n'était pas limpide et il demanda à Prosper de le reprendre sur nouveaux frais.

a) Lettre de Prosper à Augustin. — Prosper commence par se défendre d'être un ennemi personnel de ceux dont il dénonce les doctrines : il sait leur expérience ès-choses ascétiques, mais il lui paraît qu’ils courent le risque de retourner au pélagianisme qu’ils déclarent pourtant détester. Leur opposition à l’augustinisme, déjà ancienne, s’est fortifiée par la lecture du De eorreptione, devenant ouverte hostilité. Epist., ccxxv, n. 2.

Aussi bien, leur point de départ est-il la volonté salvifique universelle. Sans doute, disent-ils, tous les hommes ont-ils péché en Adam, et il faut reconnaître que nul n’est sauvé par ses œuvres, mais par la grâce divine. Mais c’est à tous les hommes, sans exception, qu’est offerte la propitiation que procure le sang du Christ, et dès lors tous ceux qui veulent bien venir à la foi, au baptême, peuvent se sauver. Ceux qui croiront et persévéreront dans la foi, aidés qu’ils sont ultérieurement par la grâce, Dieu les a vus dès avant la création et il a prédestiné à la gloire ceux dont il a vu qlie, appelés gratuitement, ils deviendraient dignes de cette élection et feraient une bonne mort. Les docteurs marseillais s’opposent donc à cette thèse (augustinienne) de la vocation divine, selon laquelle, avant toute création, Dieu a fait un choix entre ceux qu’il appellerait a la gloire (eligeruÛ) et ceux qu’il en exclurait (rejieiendi). en sorte que, selon le bon plaisir du Créateur, les uns sont créés comme vases d’honneur, les autres comme vases d’ignominie. A leurs yeux une telle doctrine est génératrice d’indifîérentisine moral : elle introduit ou le fatalisme ou encore cette doctrine (manichéenne) selon laquelle Dieu a créé des natures humaines différentes. Somme toute, iK prennent a leur compte les attaques auxquelles Augustin ne cesse de répondre et déclarent que la pensée de ce docteur n’est pas traditionnelle : fût-elle exacte, ajoutent-ils, il faudrait se garder de l’exposer, car elle risque de scandaliser. Ibid., n. ! i.

Mais, au vrai, ce sont eux-mêmes, continue Prosper, qui ne savent pas se g irder de l’erreur pélagienne. A les entendre, du moins certains d’entre eux. au lieu de confesser la grâce du Christ qui prévient tous les mérites humains, il faut reconnaître que la grâce appartient a la condition de tout homme ; c’est la grâce du Créateur (non celle « lu Rédempteur). En dotant l’homme de raison et de libre arbitre. Dieu lui a donne de pouvoir, par le discernement du bien et du mal, dirig-r sa volonté vers la connaissance de Dieu, vers l’obéissance a ses préceptes et de parvenir ainsi

DICT. DE I HÉOL. ( I ll"I..

a la grâce qui le fait renaître dans le Christ. Il y parvient par son pouvoir naturel, en demandant, en cher chant, en frappant ; finalement, s’il revoit, s’il trouve, s’il entre, c’est que, ayant fait bon usffge d’un bien de la nature, il a mérite de parvenir par le moyen de la grâce initiale à la grâce qui sauve. Cette grâce initiale, que l’on peut appeler aussi grâce d’appel (gratia vi cans i s’adresse à tous les hommes : c’est la loi na1 u relie, la loi écrite, la prédication de l'Évangile ; dès lois ceux qui le veulent deviennent fils de Dieu, ceux là. au contraire, sont inexcusables qui ne veulent point répondre à cet appel ; la justice de Dieu consiste donc en ceci que ceux qui repoussent ledit appel périssent : -a bonté en cela que Dieu ne repousse personne de la vie, mais veut que tous sans distinction soient sauvés et arrivent à la connaissance de la vérité. A propos de quoi ils alignent force textes scripl uraircs qui cxhoi lent l’homme à faire bon usage de sa volonté, s’effor eant de faire croire par là que nous avons autant de force pour le bien que pour le mal. le momentum (le poids additionnel) étant égal qui fait pencher l'âme vers le vice ou vers la vertu.

Aux objections qu’on peut faire à leur système en invoquant le sort différent des enfants qui meurent avant l'âge de raison, les uns avec le baptême, les autres sans celui-ci, ou en invoquant l’inégale répartition de la prédication évangélique, certains individus étant touchés par elle, d’autres ne l'étant pas, ils répondent par la considération de mérites hypothétiques. C’est parce que Dieu a prévu que tel enfant, s’il vivait, userait mal de son libre arbitre, qu’il lui a refusé le baptême prématuré qui l’aurait sauvé, ('.est parce qu’il a prévu que tels peuples ou tels individus ne répondraient pas, en vertu de leur libre arbitre, à la prédication de l'Évangile, qu’il ne les a pas appelés à ce bienfait. Dans les deux cas, c’est donc à cause de leur mauvais vouloir qu’enfants morts en bas âge ou peuples laissés dans l’ignorance sont amenés à leur perte. Ibid., n. 5 et 6.

Et Prosper de remarquer que plusieurs sont arrivés à ces concepts qu’ils repoussaient antérieurement, par antagonisme contre l’idée de grâce absolument gratuite. S’il faut professer, disent-ils, que la grâce prévient tous les mérites sans exception et qu’elle est donnée précisément pour que le mérite existe, on sera bien obligé de reconnaître que Dieu, selon son libre dessein et par un jugement secret mais infiniment sage, crée tel vase pour l’honneur, tel autre pour l’ignominie. Voilà ce qui leur fait peur. Leur doctrine à eux, au rebours, favorise l’effort humain ; l’homme sait, en effet, dans leur système, que par son application, diligentia, il peut être bon et que sa volonté pourra être aidée par Dieu, une fois qu’elle aura elle-même choisi de faire ce que Dieu commande. l’osé donc que, dans les adultes, il y a deux choses qui opèrent le salut, la grâce de Dieu et l’obéissance de l’homme, ils veulent que l’obéissance de l’homme soit antérieure à la grâce, afin que le début du salut, initium salut is, vienne de celui qui est sauvé et non de celui qui sauve : ils veulent que la volonté humaine se procure l’aide de la grâce divine et non point que la grâce se soumet le la volonté humaine : volunlas hominis divines gratia sibi pariai opem, non gratia sibi humanam subjiciai voluntatem. Voir col. 1006.

b) Lettre d' Hilaire à Augustin. Elle fournit peu de renseignements sur le milieu marseillais qui ne soient dans l'épître précédente. Il faut retenir | t anl ce qui est dit au début.

Les antiaUgUSthlienS se rendaient plus on moins

vaguement compte que leurs spéculations pouvaient

les mener au pélagianisme. Aussi co >n<.n. ni il

par prendre leurs Uretés. Us reconnaissaient cei tains tout au moins que nul ne peut s, suffire abso

i.