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    1. SCHISME##


SCHISME. NOTION. L'ÉGLISE ANCIENN

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Christ, de tenir le même langage tous, et de n’avoir pas entre vous de scissions, mais de rester bien en harmonie dans la même intelligence et dans la même façon de sentir. » i, 10. « Quand vous vous réunissez en assemblée, j’entends dire que des scissions se font parmi vous, et j’en crois bien quelque chose, car il faut qu’il y ail parmi vous des sectes. » XI, 18, « … afin qu’il n’y ait point de dissentiment dans le corps, mais que les membres s’inquiètent de la même chose les uns pour les autres ».xii, 25 (trad. Allô). On le voit, il ne s’agit pas à proprement parler de schismes au sens actuel du mot : les rr/ôau-a-ra dont parle l’Apôtre ne sont pas des sectes ou des groupements sortis de la communion ecclésiastique, mais des partis à l’intérieur de la communauté, des « cliques », (J.Weiss ; Allô). Ce sont des particularismes fondés soit sur des interprétations différentes du christianisme se recommandant de patronages divers, i, 10, soit sur des différences de classes et de condition, xi, 18, soit surl'égoïsme naturel lui-même lié à tout cela, xii, 25. Le mot est repris dans un sens semblable, mais plus fort, d’ailleurs avec référence à saint Paul et aux Corinthiens, par Clément Romain, / Cor., ii, 6 ; xi.vi, 5, 9 ; xux, 5 ; liv, 2. Cf. Estienne, Thésaurus, à ce mot ; II. Lesètre, art. Schisme, dans le Dictionn. de la Bible, t. v, col. 15291531 ; J. Weiss, dans le commentaire de Meyer ; E.-B. Allô, Commentaire dans la collection des Btutles bibliques ; Whotherspoon, art. Unit ; /, dans Hastings, Dicl. of Christ and Ihe Gospel, t. II, col. 7<S 1 ; H.-YV. Fulford, art. Schism, dans Encyclopædia of religion and elhics, t. xi, p. 232.

Les commentateurs anciens n’apportent rien d’original : saint Jean Chrysostome, ayant dans l’esprit le sens ecclésiastique du terme, note que si Paul use d’un mot aussi grave, alors qu’il n'était pas question de divergences proprement doctrinales, c’est pour frapper les Corinthiens et leur faire sentir toute la gravité du mal, In i am Cor., hom. iii, P. G., t. lxi, col. 23 ; hom. xxvii, col. 225-226. Théodoret de Cyr insiste sur l’idée de contestation au sujet des présidents et des chefs de file. Interpret. epist. I ad Cor., P. G., t. lxxxii, col. 232, 313.

Saint Paul fait-il une différence entre oyî(7(j.<7. et atpeaiç, rapprochés I Cor., xi, 18-10. et laquelle ? Plusieurs pensent que les sens en sont indiscernables et que les deux mots seraient, en somme interchangeables : Cremer-Kogel, Biblisch-theologisches Wôrlerbuch der N.-T. Grâzitât, I0 8 éd., Gotha, 1915, p. 85 ; E. Buonaiuti, Scisma ed eresia nella primitiva letteralura cristiana, dans Saggi su ! cristianesimo primitivo, 1923, p. 274-285 ; Hennecke. art. Hâretiker des Urchristentums, dans Die Religion in Gesch. u il Gegenwart, 2e éd., t. ii, 1928, col. 1567-1568 ; enfin, sans se prononcer catégoriquement, et avec beaucoup de nuance. J.-V. Bartlet, art. J/crcsy dans le Dicl. of Ihe Bible de Hastings, t. ii, p. 351. En fail, ni l’un ni l’autre des deux mots n’a chez saiid Paul le sens précis que Ces 1' rm< s prendront plie, lard. Tout ce que l’on peut dire, c’est que l’al’peoiç englobe plus de choses que le r>-/'r, L’t. cl, du moins à I Cor., xi, 18-19, en marque

peut-être une aggravation. Par quoi l’on ne nie d’ailleurs pas que le mot otïpeciç se charge parfois d’un sens déjà plus défini, Il l’elr., ii, l.et peut être Tit., m ni ; cf. ! '. l’rat. l.n théologie de saint l’uni. I. I, Ii, ' éd., p. 1 H, n. 1 et b12 103 ;.1. Brosch, Das Wesen der Hàresie, Bonn, 1936, p. 17-24. De plus, chacun des deux mots a sa nuance propre, de qui les ultérieures précisions peuvent se réclamer légitimement. Comme le remarque J. Weiss, « /'. cit., 10e éd., p. 13, oxlcu/x mi^ gère l’idée d’une unité violemment troublée ; -/(.'pso-iç Implique que chacun adhère à son « ré à une doctrine

ou à une forme de doctrine, au sens oii les écoles phi

losophiques de l’antiquité el le christianisme lui même

à son début furent appelés des « hérésies » ou des i sectes ».

II. La NOl ion DE SCHISME. APERÇU HISTORIQUE. La notion de schisme, qui semble de prime abord très simple, est cependant assez complexe et difficile à définir : elle n’a pas trouvé tout d’un coup la précision que nous lui connaissons. Son développement ou ses variations sont liés à deux facteurs principaux : d’une part, comme il est normal, à la manière dont est conçue l’unité de l'Église, à quoi le schisme se soustrait ; d’autre part, aux faits de schismes existant dans l'Église à un moment donné ou dans un lieu déterminé.

1° L'Église ancienne, jusqu’au donatisme. — Les Pères apostoliques sont remplis du zèle de l’unité el ils ont certes une idée très riche de l'Église une ; mais la notion de schisme n’a pas chez eux une valeur ecclésiologique technique. L’unité est faite de la concorde des chrétiens, de leur accord en une même croyance dans la soumission aux autorités légitimes de chaque communauté ; elle est violée quand des discussions surviennent entre chrétiens : d’où les adjurations ou la mise en garde contre les uy[rsioi.-zrx, scissions, Clément, / Cor., ii, 6 ; xlvi, 5 et 9 : xlix, 5 ; liv, 2, dissensions, Didachc, iv, 3 : Ép. de Barnabe, xix, 12, discordes, Ilermas, Sim., VIII, ix, I. Ignace, qui est rempli par la passion de l’unité, n’emploie pas le mot oyîcu.a ; mais, en une phrase toute paulinienne, il avertit que « qui suit un fauteur de schisme, ayîÇov-u, n’héritera pas le royaume de Dieu », Phil., ii, 3, et il exhorte les Philadelphiens, c. m-iv, et les Smyrniotes, Smijrn., viivin : Polijc., vi, à garder la paix en obéissant aux conditions de l’unité ecclésiastique. La condition décisive est, pour Ignace, l’obéissance à l'évêque, la fidélité à la doctrine qu’il tient, à l’eucharistie qu’il préside. Ignace donne ainsi la première formule, et combien fr>rte, d’un critère de l’unité et du schisme : est schismatique celui qui se sépare de l’autorité légitime, à savoir de l'évêque, et dresse un autel en dehors de cette autorité.

Telle est l’idée la plus simple du schisme : elle envisage la rupture de l’unité dans le cadre de l'Église locale et définit le fait de schisme par rapport à l’autorité locale légitime. C’est celle que nous retrouverons dans le canon 5 du concile d’Antioche de 341, le plus ancien document officiel qui, sans d’ailleurs employer le mot, propose une notion du schisme : Si quis presbyler vel diaconus proprio conlemplo episcopo, ab ecclesia seipsum segregaverit, et privatim congregationcin c/jcceril. et allure erexerit et episcopo uccersente non obedicril. née velit ei parère… Mansi, Concil., t. ii, col. 1309-1310.

Du cadre de l'Église locale, il y a d’ailleurs un passage à celui de l'Église universelle : la communion avec celle-ci est rompue par la rupture de la communion avec un évêque particulier : car, entre les Églises locales, il y a une solidarité fondée sur une unité profonde qui trouve son expression dans un rigoureux conformisme de foi. L’autorité épiscopale d’une Église particulière engage l'Église universelle, et qui rompt avec elle rompt avec l'Église totale. Ceci se marque au plan insi il ut ionnel par la valeur universelle de l’excommunication qui frappe le schismatique : le canon 6 du concile d’Antioche précédemment cité porte : Si quis a proprio episcopo fuit excommunicatus, ne prius ab aliis suscipiatur, quam fuerii a proprio episcopo susceptus, ni…. col. 1311-1312. Or, ce canon ne fait que répéter ce qui a déjà été décidé aux conciles d’Elvire (300), eau. : ").' !. Mansi, Concil., t. ii, col. Il ; d’Arles (311). eau. 10. ibid., col. 173 : de Nicee (325), nui. 5, col. 009670 ; ce qui sera bientôt repris au concile de Sardiquc (3 13). can. 13, Mansi. t. iii, col. 10-17.

Au plan idéologique, nul n’a formulé plus fortement que saint Cypricn celle valeur universelle du schisme.