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SCANDALE. SCAPULAIRE


scandale qu’elles sont susceptibles d’occasionner n’est prévu que confusément. Il en serait de même si une personne nettement déterminée devait tomber et si pour éviter le scandale il fallait négliger ou remettre trop souvent à plus tard l’action de conseil ou s’il y avait une raison spéciale de l’accomplir hic et mine, de communier par exemple le jour anniversaire de son baptême. S. Alphonse, t. II, n. 50. En dehors de ces hypothèses, il y a obligation de ne pas poser les œuvres de pur conseil si elles risquent de faire tomber les faibles.

Quant aux actions indifférentes, qui ne revêtent pas l’apparence du mal, elles devront être omises ou différées plus souvent que celles de pur conseil, s’il y a danger de scandaliser une personne déterminée. Il en est de même à peu près d*s actes qui ne sont que vénicllement mauvais. C’est pourquoi la femme doit parfois s’abstenir d’une toilette qui n’est pas notablement déshonnête.

Nul n’est tenu, enfin, de subir une perte grave dans ses biens temporels, pour éviter que les faibles ne se scandalisent. S. Alphonse, t. II, n. 52.

A condition qu’il y ait une raison même très légère d’agir, il n’y a aucune obligation d'éviter le scand Ue pharisaïque, puisque toute la malice provient de celui qui tombe. Aucun d 'voir prescrit parle doit positif ne doit dès lors être omis ni même différé. S’il peut être satisfait au précepte en un autre lieu, si par exemple il est possible d’assister au saint sacrifice de la messe ailleurs que dans son église paroissiale, et aussi commodément, ce n’est qu’un devoir imposé sub levi.

Les œuvres d> pur conseil ne sont pas à négliger à cause du scandale pharisaïque qu’elles susciteraient éventuellement ; on pourrait cependant plus facilement les différer quelquefois, mais ce n’est là qu’une obligation légère. Il n’est pas nécessaire de se démettre des biens temporels pour éviter que le prochain ne pèche uniquement par sa malice. S. Thomas, IIMI*, q. xliii, a. 8 ; S. Alphonse, t. II, n. 52. Un curé, par exemple, peut conserver ses droits d'étole, malgré les calomnies d’autrui.

IV. La réparation du scandale.

C’est une obligation de charité si le prochain a été entraîné au mal par la persuasion ou par le mauvais exemple. Si le scandale a été occasionné ou causé par des moyens injustes, par la ruse, la crainte, la violence ou par la fausse doctrine, c’est aussi un devoir de justice. S. Alphonse, t. III, n. CC2. La réparation est obligatoire sous peine de faute mortelle, s’il y a eu scandale en matière grave.

Celui qui n’a rien fait et qui ne veut rien faire pour réparer les scandales qu’il a commis, est indigne d’absolution. Pour réparer, il faut avant tout mettre fin à ce qui est à l’origine du péché et tâcher de provoquer l’amendement du prochain. Pratiquement la réparation varie selon la qualité des personnes en cause et les circonstances du scandale. Si celui-ci a été public, elle doit l'être également. Aussi celui qui a donné des conseils dont l’efficacité persévère encore doit-il s’efforcer d’en annuler les effets, en particulier chez ceux qui ont pu être influencés par son attitude antérieure. Ceci importe davantage encore lorsque l’auteur du scandale a autorité sur ceux qu’il a entraînés au péché ou qu’il occupe une situation sociale élevée. Celui qui a séduit les autres par de fausses doctrines en matière de foi ou de morale est tenu de révoquer ses erreurs. Quiconque a corrompu autrui par des ouvrages mauvais, hérétiques, impies ou obscènes doit se rétracter par écrit et faire son possible pour éviter la diffusion ultérieure de ses écrits. Celui qui a vécu en concubinage public, doit d’abord renoncer à son commerce charnel peccamineux et s’approcher publiquement des sacrements, etc.

Quant aux scandales ordinaires, qui ont été occasionnés seulement par le mauvais exemple, il suffit la plupart du temps pour les réparer, de ne plus poser l’acte peccamineux, de s’approcher publiquement et fréquemment des sacrements, de donner le bon exemple, de prier pour ceux qui sont tombés ou d’avoir recours à d’autres moyens analogues.

Le scandale est étudié dans tous les manuels de théologie morale. Les auteurs en traitent d’ordinaire, soit à propos de la charité, soit à propos du cinquième commandement de Dieu. La courte bibliographie que nous donnons ici pourra se compléter facilement par celle que fournissent les auteurs cites.

S. Thomas, Sum. theol., II » -II », q. xliii sq. ; S. Alphonse de Llguori, Theologia moralis, 1. II ; Aertnys, Theologia moralis juxla doctrinam S. Alphonsi de Ligorio, 2e éd., Tournaꝟ. 1890, 10e éd. adaptée au Code par Damen, Tournaꝟ. 1919-1920 ; Ami du clergé, t. xxiii, 1901, p. 1195 sq. ; D’Annibale, Summula théologies moralis, 3e édit., Rome, 1888 ; Ballerini-Palmieri, Opus momie a Ballerini amscriplum et a Palmieri cum annotationibus editum, t. ii, Prati, 18'JSJ ; Ebel-Bierbaum, Theologia moralis, decalogalis et sacramentalis, I’aderborn, 1891 ; L. Ferraris, Prompla bibliotheca, Paris, 1857, art. Scandalum ; Ferreres, Compendium théologies moralis (Gury), t. i, 1918 ; S. François de Sales, Traité de l’amour île Dieu, 1. I ; Genicot-Salsmans, Theologia* moralis instituliones, t. i, Bruxelles, 1927 ; Gousset, Théologie monde, t. i et II, 10e édit., Paris, 1855 ; Gury-Ballerini, Compendium theologies moralis ab auctore reeognitum et Ballerini adnotationibus locuplelaturn, 4e édit., t. i, Rome, 1877 ; Laloux, De actibus hum mis, Paris, 1862 ; Lehmkuhl, Theologia moralis, Frisbourg-en-Br., 1902, 11e édit., 1910, t. i ; Noldin, Summa théologies moralis, De præeeplis Dei et Ecclesiæ, Inspruck, 191 1 ; Noldin-Schmitt, Summa theologia ? mor<ilis, De prazeeptis Dei et Ecclesiæ, Inspruck, 1926 ; Pruemmer, Manuale théologies moralis, t. ii, Fribourg-en-B., 1923 ; Sébastian !, Summarium theologia' moralis, Turin, 1918 ; SporerBierbaum, Theologia moralis decalogalis, Paderborn, 1897 ; Tamburini, Explicatio Decalogi, dans Opéra omnia, t. II, Venise, 1707 ; Tanquerey, Synopsis theologia : moralis et pasloralis, t. II, Rome et Paris, 1922 ; Venneersch, Theologia ; moralis principiu, responsa, consilia, t. ii, De virtutum exercitalione, 1e édit., Bruges, 1928 ; Wouters, Manuale theologiæ moralis, t. i, Bruges, 1932.

N. Iung.

    1. SCAPULAIRE##


SCAPULAIRE. — Dans un dictionnaire de théologie, on ne peut pas envisager la question du scapulaire sous les multiples aspects qu’elle revêt dans la pratique : nomenclature des scapulaires différents et des indulgences attachées au port du scapulaire, modes et formules d’imposition, pouvoirs délégués requis à la validité de l’imposition, sanations pour les réceptions invalides, etc. Tous ces petits problèmes d’ordre pratique et pastoral débordent le cadre de la théologie proprement dite. Nous devons ici nous contenter d’examiner : I. L’origine du port du scapulaire et son fondement dans la doctrine catholique. II. L’examen de certains privilèges en regard du dogme catholique et de l’histoire.

I. Origine du port du scapulaire et son fondement DANS LA DOCTRINE CATHOLIQUE. 1° Dé finition

et origine du scapulaire. — Le scapulaire (du latin scapula, épaule) est une longue pièce d'étolïe, passée sur les épaules et descendant sur le dos et sur la poitrine. Primitivement, pour les moines bénédictins, c'était un vêtement de travail dont on recouvrait les vêtements ordinaires afin de les préserver. Scapulare propter opéra, dit la règle de Saint-Benoît, c. lv, P. L., t. lxvi, col. 771 C ; cf. t. ciii, col. 1231. Avec le temps, le scapulaire est devenu le signe ou symbole du moine travailleur. Dans la cérémonie de l’imposition, on le comparait à la croix de Jésus-Christ, au joug du Seigneur, à une armure, à un bouclier. Cf. Cassien, De cœnobiorum instilulis, P. L., t. xlix, col. C8.

Peu à peu, aux ordres proprement dits s’adjoignirent un deuxième et un troisième ordre, ainsi que des