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    1. SACREMENTS##


SACREMENTS. NOTION, LES PÈRES LATINS

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la controverse, mais simplement à en dégager les conséquences dogmatiques au point de vue de la théologie générale des sacrements. D’une part, Cyprien et les rebaptisants, tout comme leurs adversaires, confessent que l’efficacité des sacrements leur vient du Saint-Esprit. D’autre part, ils attachent l’action du Saint-Esprit au fait d’appartenir à l’Église. Comment le ministre qui, n’étant pas dans l’Église, n’a ni la vraie foi, ni la grâce, ni le Saint-Esprit, pourrait-il en faire part à un autre ? Epist., lxx, n. 1 ; lxix, n. 8 ; lxxi, n. 1, p. 767, 757, 771. Les hérétiques sont donc incapables de conférer validement baptême, confirmation et ordre : heercticum hominem sicut ordinare non liect, nec manum imponerc, ita nec baptizare, nec quicquam tancte et spiritualiter gerere, quando alienus sit a spirilali et deifica sanctitate. Epist., lxxv, n. 7, p. 815. L’attitude du pape Etienne et le triomphe partiel de sa pratique montrèrent qu’une tradition dogmatique (nihil innovetur nisiquod thaditvm est) existait dans l’Église, disjoignant la question de la validité de celle de la licéité ou même de la fructuosité du sacrement, ou encore la question du pouvoir et celle de la valeur morale ou de la foi du ministre. Le parti romain n’avait pas manqué d’ailleurs de mettre en relief, d’une manière explicite, cette dernière distinction : il insistait sur la puissance des noms divins invoqués dans la formule baptismale, puissance qui s’exerce indépendamment de la foi ou de la dignité du ministre. Cf. S. Cyprien, Epist., lxxiii, n. 4 ; lxxv, n. 9, p. 781, 815. C’est surtout dans le Liber de rebaptismate qu’est exposée cette considération dogmatique. Pour recevoir toute l’efficacité du baptême, remarque l’auteur de cet écrit, il faut renaître de l’eau et de l’Esprit. C. ii, éd. Hartel, p. 71. Sans doute, renaître de l’Esprit est la chose principale, puisque la cérémonie de l’immersion est susceptible d’être suppléée, comme on le voit dans le martyre. C. xi, xiv, xv, p. 83, 86-87, 88-89. Toutefois, on peut renaître de l’eau sans renaître de l’Esprit : l’un peut aller sans l’autre. C. iii, iv, p. 73-74. Ainsi en est-il dans le baptême des hérétiques. L’immersion faite par un hérétique « au nom de Jésus » (sur cette formule employée par les Romains, voir A. d’Alès, La théologie de saint Cyprien, p. 228-229) garde la vertu de cette invocation, et cette vertu est telle qu’elle commence l’œuvre de la régénération. Le rite n’a pas besoin d’être renouvelé. C. vi, vii, x, xii, xvi, p. 76-78, 81, 83, 87. Si le baptisé meurt avant de revenir à la vraie foi, son baptême non seulement ne lui sert de rien, C. vi, vii, x, mais il aggrave sa condamnation. Par contre, s’il se convertit, c’est assez de compléter, par la collation du Saint-Esprit (l’imposition des mains), la première cérémonie, pour qu’elle obtienne son plein et entier effet. C. x, cf. c. xii ; xv. On le voit, la querelle des rebaptisants servit, à sa manière, à faire progresser le dogme de l’efficacité du rite baptismal. Par contre, le symbolisme sacramentel n’est envisagé par Cyprien que d’une manière rapide et superficielle. L’eau signifie l’ablution intérieure de l’âme ; elle garde sa signification, quel que soit le mode du baptême, immersion ou simple aspersion (infusion). Epist., i.xix, n. 12, p. 761. De même, l’huile est l’image de l’onction spirituelle de l’âme. Epist., lxx, n. 2, p. 768. Le nom de sacrement est également appliqué par Cyprien à la confirmation (sacramento utroque nascuntur). Epist., i.xxii, n. 1 ; cf. LXXIII, n. 21, p. 775. 795. L’évcquc de Cartilage en indique le fruit propre : signaculum divinum, Epist.’, lxxiii, n. 9, p, 785 ; cf. n. 6, p. 783 ; ou signurn Cliristi..d Drmrlriannm c. xxii, p. 367. Pour la validité de la confirmation, comme pour celle du baptême, Cyprien (comme Firmilien d’ailleurs) part d’un faux supposé, à savoir que pour donner le Saint-Esprit au nom du Christ, le ministre doit déjà le posséder comme mandataire de l’Église. Epist., lxxv, n. 12, p. 813 et n. 18, p. 822. Mais, en affirmant que l’imposition des mains (manuum imponere ad accipiendum Spiritum Sanetum) confère le Saint-Esprit, Cyprien n’ignore pas que le baptême est inséparable du Saint-Esprit. La confirmation ne fait donc qu’apporter une plénitude d’un don déjà possédé. Epist., lxxiv, p. 802 ; cf. (Firmilien) Epist., LXXV, n. 9, p. 816.

En ce qui concerne le sacrement de l’eucharistie, le symbolisme sacramentel est fortement développé et utilisé. Rappelons tout d’abord que la foi de saint Cyprien en la présence réelle est aussi ferme que possible. Voir ici Euciiaiustie, t. v, col. 1132 sq. ; cf. J. fixeront, op. cit., t. i, p. 436 sq. ; P. Batiffol, op. cit., p. 227 sq. Sous ce rapport, l’efficacité du sacrement est donc indiscutable. Son symbolisme est multiple et Cyprien en présente les différents aspects selon les exigences de la controverse. Défenseur de l’unité de l’Église contre les novatiens, il trouve dans l’eucharistie le symbole de cette unité. Le pain est composé d’une multitude de grains de froment moulus ensemble ; il représente les fidèles unis au Christ et ne formant qu’un corps mystique avec lui. Epist., lxix, n. 5, p. 720. Ce symbolisme avait déjà été souligné, par la Didachè, voir col. 499. Quelques évêques d’Afrique avaient une pratique singulière, celle de ne mettre dans le calice que de l’eau, sans vin. À ces « aquariens », Cyprien rappelle dans la lettre lxiii la discipline de l’Église sur ce point et le symbolisme qu’il comporte : il faut les deux, vin et eau ; l’eau mélangée au vin est la figure du peuple chrétien uni au Christ, n. 13, p. 711. Le symbolisme du sacrement se retrouve également dans le sacrifice : l’eucharistie est le symbole du sacrifice du Christ ; mais elle n’est pas un pur symbole, elle est aussi un vrai et complet sacrifice, n. 17, p. 715. Le sacrifice de l’eucharistie est une représentation du sacrifice du Christ, mais une représentation qui en contient vraiment la réalité. Voir le développement de ces idées dans A. d’Alès, op. cit., p. 249-262.

L’efficacité du sacrement existe également par rapport aux effets produits par l’eucharistie dans l’âme du chrétien. Avant tout, l’eucharistie produit notre incorporation au Christ : « Nous demandons chaque jour que notre pain, c’est-à-dire le Christ, nous soit donné ; afin que, demeurant et vivant dans le Christ, nous-ne nous séparions pas de ce corps qui nous apporte la sanctification. » De oiat. dom., c. xviii, édit. Martel, p. 280. L’eucharistie est encore le sacrement de la force et de la vaillance spirituelles, le sacrement qui fait les martyrs. Aussi, à l’approche de la persécution, saint Cyprien décide-t-il de relâcher quelque chose de la rigueur ordinaire et d’admettre à la communion même les apostats, s’ils donnent des gages de repentir. Ne faut-il pas les munir pour la vie et les armei pour de nouveaux combats ? Epist., lvii, n. 2, p. 651-652.

Ce qui est à remarquer chez Cyprien, c’est la manière dont il veut, à l’exemple de Tertullicn dont il s’inspire volontiers, rendre sensible la réalité de l’action divine dans le sacrement, fout le passage du De oratione dominica, dont nous venons de donner la conclusion, marque cette action dans l’eucharistie. Voir A. d’Alès. fa théologie de saint Cyprien, p. 268-269.

La pénitence est présentée par Cyprien comme la rémission des péchés par le ministère des prêtres. De lapsis, n. 29. p. 258. Cette seule indication suffirait à montrer quc la pénitence est un sacrement. Confession (exomologèse), satisfaction, réconciliation, tels sont les trois actes de la pénitence, tels que Cyprien, nprè. Tertullicn, les éiiumère et décrit. Les mots dont Cyprien se sert pour parler de la réconciliation :