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Le sacre des reines.

Dès les origines du sacre royal en France (milieu du viiie siècle), on a vu la reine paraître aux côtés du roi dans la solennité du sacre et participer, comme lui, aux onctions, prières, traditions d’insignes et couronnement. On pourrait marquer quelques différences entre les deux cérémonies, soit pour le moment où elles doivent se faire, la cérémonie du sacre de la reine suivant dans le pontifical celle du roi (bien qu’à Rome, depuis la fin du xiie siècle, les deux sacres et les deux couronnements de l’empereur et de l’impératrice se déroulassent simultanément), soit pour les formules employées. D’une manière générale, il suffit de rappeler que l’idée propre qui se dégage du sacre des reines, c’est la bénédiction, dans le sein de sa mère, du rejeton royal futur héritier présomptif : una cum Sara atque Rebecca, Lia et Rachel, beatis reverendisque fœminis, fructu uteri sui (œcundari seu graiulari mereatur, ad decorem totius regni, statumque sanctæ Dei Ecclesiæ regendum necnon prolegendum. ..

Le pontifical romain prévoit le cas des États où la souveraine jouit de l’intégrité du pouvoir royal et où seule elle reçoit la consécration du couronnement. L’onction qui, pour le roi, se faisait entre les épaules, se fait pour la reine sur la poitrine. Lors du sacre de la reine Victoria, en Angleterre, cette onction fut supprimée. Mais, pour tout le reste, le couronnement d’une reine seule ne contient rien qui n’ait été prévu précédemment, sauf les différences assez minimes exigées par la différence des sexes.

Cet article est résumé du c. xi de l’ouvrage de dora Pierre de Puniet, Le pontifical romain, histoire et commentaire, t. ii, Paris, 193f, p. 179-218. On devra s’y reporter pour les détails historiques et liturgiques qui ne pouvaient trouver place ici. Voir également Th. Bernard, Cours de liturgie romaine, t. i, l re part., Paris, 1902, c. iv, p. 396-465. Dans ce dernier ouvrage, on trouvera des détails intéressants sur le sacre des rois de France, auquel tout un appendice est consacré (p. 42°)-t6.")).

A. Michel.


SACREMENTS. — L’objet de cet article ne saurait être que les sacrements en général. Chaque sacrement, considéré en particulier, a déjà été l’objet d’une étude spéciale. Et encore, plusieurs questions intéressant les sacrements en général ont été précédemment étudiées, notamment celles du Caractère sacramentel, t. ii, col. 1698 ; de la Fiction dans les sacrements, t. v, col. 2291 ; de I’Intention dans l’administration et l’usage des sacrements, t. vii, col. 2271 ; de la Matière et forme dans les sacrements, t. x, col. 535 ; du Ministre des sacrements, ibid., col. 1776 ; de I’Opus operatum, t. xi, col. 1084 ; de la Reviviscence des sacrements, t. xiii, col. 2818. Tenant compte de ce qui est déjà acquis, nous n’y reviendrons que dans la mesure où il serait utile de marquer une précision nouvelle.

Nous étudierons successivement :
I. [(Dictionnaire de théologie catholique/SACREMENTS I. Le mot|Le mot.]]
II. [(Dictionnaire de théologie catholique/SACREMENTS II. La notion 1. Dans l’Ecriture Sainte|La notion (col. 494).]]
III. [(Dictionnaire de théologie catholique/SACREMENTS III. L’institution et le nombre septénaire. 1. L’intention du Christ suggérée par l'étude des sacrements eux-mêmes et de leur rôle respectif dans la vie surnaturelle de l’homme|L’institution et le nombre septénaire (col. 536).]]
IV. [(Dictionnaire de théologie catholique/SACREMENTS IV. Les explications théologiques relatives à l’institution des sacrements par le Christ et au nombre septénaire. 1. Explications hétérodoxes|Les explications théologiques (col. 558). ]]
V. [(Dictionnaire de théologie catholique/SACREMENTS V. Dogme et théologie de la causalité sacramentelle. 1. Les premiers tâtonnements des théologiens dans l’exposé et l’explication du dogme de la causalité des sacrements|Le dogme et la théologie de la causalité sacramentelle (col. 577).]]
VI. [(Dictionnaire de théologie catholique/SACREMENTS VI. Les effets des sacrements|Les effets des sacrements (col. 621).]]
VII. [(Dictionnaire de théologie catholique/SACREMENTS VII. Validité, licéité, fructuosité :problèmes moraux et canoniques 1. Définitions|La validité, la licéité, la fructuosité et les problèmes moraux et canoniques s’y rapportant (col. 635).]]

I. Le mot.

Le terme grec musterion. —

Dans la théologie grecque, c’est le terme jjluctt/)P(.ov qui désigne les sacrements. Aujourd’hui encore, les théologiens orientaux dissidents n’emploient pas d’autre expression. Voir Kimmel, Monumenta fidei Ecclesiæ orienlalis, pars I a, Iéna, 1850 : Confessio orthudoxa (de Moghila), pars l a, q. xcvm sq., p. 170 sq. ; Synodus hierosolymitana, p. 344 ; Décréta synodi Constant inop., p. 404 ; Acta synodi apud Giasium (Jassy), p. 414 ;

Dosithœi confessio, p. 448 ; et pars II a, Iéna, 1850 : Metrophanis Critopuli confessio, c. v, p. 89 sq. ; c. vii, p. 107 ; c. xi, p. 140 ; c. xxii, p. 201.

Le sens primordial de jjwo--7]ptov est « secret » ; c’est le sens qu’on trouve chez les classiques, poètes, littérateurs, historiens, philosophes. Par extension, (xuo-TY)ptov, au pluriel surtout, se disait des initiations religieuses qui imposaient le secret le plus absolu. D’où l’on peut déduire que la définition donnée par Théodoret à propos de Rom., xi, 25, est juste : M’jo-T^p’.ov tazi tô [AT] TtSai yvcôpi.u, ov àXXà u.ôvov toîç Œwpouijisvoti ;, P. G., t. lxxxii, col. 180 B.

La Bible retient ce sens primitif et ne fait que lui ajouter des nuances secondaires. On le trouve 45 fois dans les écrits de l’Ancien et du Nouveau Testament : Dan., 9 fois ; Judith, 1 fois ; Eccli., 2 fois ; Prov., 1 fois ; Sap., 3 fois ; Tob., 1 fois ; II Mac, 1 fois ; Apoc., 4 fois ; Mat th., Luc, Marc, chacun 1 fois ; et 20 fois dans les épîtres de saint Paul. D’après F. Prat, La théologie de saint Paul, t. ii, Paris, 1912, p. 394, on peut ramener à trois acceptions les diverses nuances qui se sont greffées sur la notion générique : 1° Secret de Dieu relatif au salut des hommes par le Christ, secret aujourd’hui dévoilé : Rom., xvi, 25 ; 2° Sens caché, symbolique ou typique, d’une institution : Eph., v, 32 (sens du mariage), d’un récit, Dan., ii, 18, 27, 30 (sens du songe de Nabuchodonosor), d’une chose ou d’un nom ; Apoc, i, 20 (sens des sept étoiles et des sept candélabres) ; ibid., xvii, 5-7 (sens du nom de la grande Babylone) ; 3° Action cachée : II Thess., ii, 7 (le mystère d’iniquité), ou qui n’est pas connue, I Cor., xv, 51 (le mystère de la résurrection future). On pourrait indiquer d’autres exemples.

Rien d’étonnant donc que la langue ecclésiastique se soit emparée de ce mot désignant philosophiquement la nature intime et secrète d’une chose, pour l’appliquer au rite symbolique produisant la grâce qu’il figure, puis aux vérités incompréhensibles qui dépassent les lumières de la raison.

Toutefois, dans la sainte Ecriture, on ne trouve pas le mot (jio<TT7)pt.ov, même quand il est traduit par sacramentum, appliqué au rite sacré qui constitue le sacrement. Même dans Eph., v, 32. le mot sacramentum ne vise pas le « sacrement » du mariage. Voir ici Mariage, t. ix, col. 2070. Les seize fois où ji.’joT/jpi.ov est traduit par sacramentum ne comportent aucune nuance spéciale, modifiant le sens général de mysterium. Dans l’Ancien Testament : Tob., xii, 7 ; Sap., ii, 22 ; vi, 24 ; xii, 5 ; Dan., ii, 18 ; n. 30 ; ii, 47 ; iv, 6 ; dans le Nouveau Testament, Eph., i, 9 ; iii, 3 ; m, 9 ; v, 32 ; Col., i, 27 ; I Tim., iii, 16 ; Apoc, i, 20 ; xvii, 7.

Avant le ive siècle le mot jjwottjplov garde sous la plume des écrivains chrétiens son sens classique de chose sacrée, mystérieuse.

Chez les Pères apostoliques, en effet, nous trouvons peu de lumières : MoaTrjpiov est absent de la Lettre aux Corinthiens de saint Clément, de l’épître du pseudo-Barnabe, du Pasteur d’Hermas. Dans la Didachè, xi, 11, on lit que le vrai prophète agit eîç fi.ijo-Tirpi.ov >cGo-[i, ixov sxxXï)o-iocç, ce qui est vraisemblablement une allusion à Eph., v, 32. Funk, Patres apostolici, t. i, p. 28. Pour Ignace d’Antioche, la mort du Christ est le mystère de notre salut, puisqu’elle est le principe de notre foi. Magn., ix, 1, ibid., p. 258. « La virginité de Marie, son enfantement, avec la mort du Sauveur, sont les trois mystères de clameur, qui ont été perpétrés dans le silence de Dieu. » Eph., xix, 1, ibid., p. 228. Peut-être Trall., ii, 3, 81axôvouç…u.uo-T7)pteov’I. X., offrirait-il un sens plus précis, encore qu’il soit difficile d’y voir une mention de l’administration de certains sacrements (cf. I Cor., iv, 4), Funk, ibid., p. 244. Dans l’Épitre à Diognète, à part peut-