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RUSSIE L’ECOLE DE K I E

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Moghila, dans Orienlalia chrisiiana, n. 39, Rome, 1927, p. xiv, note 1.

Un Corpus kioviense. qui aurait recueilli les traités théologiques de la première époque de l’académie, fait malheureusement défaut ; les manuscrits se trouvent en grande partie dans les anciennes bibliothèques. Nous ne possédons de ces traités que des descriptions et analyses que nous ont transmises les historiens de Kiev, principalement D. ViSnevskij, Kievskaja Akademija v pervoi polovinc xviii stol., Kiev, 1903.

Le cours théologique de Kiev le plus ancien remonte aux années 1693-1697 et comprend une série de douze traités de théologie scolastiquc et de polémique, sous le titre général de Traclatus Iheologici in collegio Kiiwo-mohileano traditi et explicati. Les manuscrits ne donnent que la liste des questions et la date du jour où se termina l’exposition ; on y trouve : deux traités sur l’incarnation, dont l’un théologique (18 octobre 1693) et l’autre de controverse (10 février 1694) ; deux autres sur les sacrements, l’un dogmatique (30 juin 1694), l’autre contre les Romains (azymes, communion sous une seule espèce) et contre les ennemis de la présence réelle (10 septembre 1694) ; un sur la pénitence (23 février 1695) ; deux sur les péchés (28 juin 1696) ; un autre sur l’Église et ses membres (commencé le 5 septembre 1696) ; un traité sur la vertu de justice ; deux sur Dieu un en trois personnes, l’un théologique et l’autre de controverse contre les gentils et contre les Romains, relatif à la question spéciale de la procession du Saint-Esprit (13 juillet 1697). Cf. Macaire, Istorija Kievskoi akademii, p. 69-74, note. Macaire, dans son histoire de l’académie de Kiev, attribue ce traité à Krakovskij ; mais celui-ci ayant terminé ses leçons exactement en 1693, il en résulte que le cours a pour auteur le plus célèbre des professeurs de Kiev, Stéphane Javorskij, qui lui succéda dans la chaire de théologie.

Visncvski, mentionne encore d’autres cours manuscrits de professeurs de Kiev, adeptes de la doctrine de Moghila : le Cursus biennalis théologies sacrosanctæ, d’Innocent Popovskij, recteur de 1704 à 1707 ; la Theologia scholastica, de Cristobal Ciarnuckij (17061710) ; la Theologia chrisiiana orlhodoxa pro diversilale materiarum in varios Iractalus, dispulaliones et quæsliones divisa, de Joseph Volejanskij (1721-1727) ; la Theologia scholastica de Hilarion Levickij (1727-1731) ; le Cursus quadriennalis theologiæ christianw orthodoxie pro varietale materiarum in varios Iractalus divisas de Ambroise Duvnevic (1731-1735) ; la Theologia scholastica de Hilarion Negrebetskij (1733-1735) ; la Theologia : sacræ summa posl quadriennalem Iheologicarum rerum solemncm hic perlraclalionem oculis deinceps animisque theologia’in academia hioviensi studiosorum subjecta de Silvestre Kuljabka (1740-1745) ; le Cursus theologiæ de Silvestre Ljaskoronskij (1746-1751) ; et enfin l’œuvre du hiéromoine Barlaam LjaSèenvskij (1747), Argumentatrix theologia sancta pro varietate materiarum varios in Iractalus divisa. Sur tous ces traités, voir D. Visncvski j, op. cit., p. 229 sq. ; cf. A. Palmicri, Theologia dogmalica orlhodoxa, t. i, Florence, 1911, p. 154-156 ; M. Jugie, ’theologia dogmalica < hristianorum orientalium, t. i, Paris, 1926, p. 585 sq.

Comme celle de Kiev, la théologie de Moscou, aux débuts du xviii siècle, se conforme à la tendance de Moghila, laquelle se manifeste dans les trois cours les plus anciens qu’on ait conservé : celui de Théophylacle Lopatinskij : Scientia sacra disputationibus llieologicis SS. Ecclesise orientait, Scripturee, conduis cl l’alribus consenlaneis, spéculative et controverse illustrata in collegio Petro-Alexieiviano Mosquensi ann. 17061710 : la Theologia theoretica de Deo uno et trino, commentariis et disputationibus scholaslicis illustrata, ingenuo Hoxolano audilori cxposila ab nnno 17 17 ad ann. 1719 ; et l’ouvrage de G. Florinskij : Theologia positiva et polemica, tradita in Mosquensi academia a Cyrillo Florinskij (1737-1740). Voir S. Smirnov, Istorija Moskovskoi slavjano-greko-lalinskoi akademii, Moscou, 1855, p. 136-138. L’influence exercée par l’école de Kiev sur Moscou cesse avec Florinski ;, dont le système représente le passage de la scolastique à la nouvelle méthode introduite par Prokopovic, malgré l’estime de Florinsk j pour Stéphane Javorskij, qu’il appelle theologorum phœnix, solidæ erudilionis vertex… S. Smirnov, op. cit., p. 154 sq.

Le « latinisme » de l’école théologique de Kiev est un lieu commun chez les auteurs. L’historien du collège moghilien, A. Jablonowski, va jusqu’à dire que l’académie de Kiev, de 1615 jusqu’à 1800, représente un médium quid entre la culture occidentale et la culture orientale, sans rien posséder d’original ou de personnel, si bien que l’on peut affirmer que « par son caractère, sa signification, son esprit, elle était un institut d’éducation latino-polonaise ». A. Jablonowski, W spraivie « Akademii Kijowsko-Mohilanskiej », wgdanie w 1900 r. ad honorent quingentesimi anniversarii almse malris Jagellonicse, dans Kwarlalnik historgezny, t. xvi, 1902. Pour réfuter Jablonowski, Th. Titov a écrit deux grands articles : K voprosu o znacenii Kievskoi Akademii dlja pravoslavija i russkoi narodnosli xvii-xviii w., dans Trudꝟ. 1903, t. iii, p. 375-107 ; 19 !) 1, t. i, p. 59-100. Son intention était de prouver que le collège de Kiev fut, dès ses origines, un collège orthodoxe et russe ; bien plus, si le latin y était à la base de la culture, cela tiendrait, d’après Silvestre Kossov, premier préfet du collège, à ce qu’en Pologne on employait le latin au lieu du grec, comme il l’eût préféré. Th. Titov, loc. cit., p. 398. Mais les arguments de Titov se réfèrent à peine à l’enseignement de la théologie, à propos duquel il parle seulement de Théophane Prokopoviô, loc. cit., p. 76 sq., sans rien dire des théologiens moghiliens. Le jugement que ceux-ci ont mérité, même de la part d’écrivains russes modérés, peut se déduire des pages que j. Florovskij a consacrées récemment à l’école de Kiev et au style « baroque », comme il dit, de ses théologiens, lesquels étaient profondément imbus de la scolastique de l’Occident catholique. G. Florovskij, Puti russkago bogoslovija, Paris, 1937, p. 45-50. Quoiqu’avec plus de modération, Macaire écrivait déjà : « Tous (les théologiens kiéviens) se ressemblent entre eu<c par l’absence de système, soit dans la scolastique, soit dans l’esprit d’orthodoxie. » Macaire, Istorija Kievskoi akademii, p. 138.

On ne peut sérieusement nier que la théologie catholique post-tridentine ait exercé une influence profonde dans l’école de Kiev. L’œuvre capitale de Moghila, sa Confession orthodoxe, se rattache si nettement à nos auteurs, que ce n’est pas sans raison qu’on peut parler d’une véritable infiltration latine. M. Viller, S. J., Une infiltration latine dans la théologie orientale : la « Confession orthodoxe » attribuée à Pierre Moghila et le « Petit catéchisme » de Canisius, dans Kecherches de science religieuse, t. iii, 1912, p. 159-168. Parmi les manuscrits de Javorskij, il s’en trouve un au séminaire de Kharkov qui porte le titre suivant : Abgssus inscrutabilium Dei arcanorum, liber mea mmu scriptus, compendium theologiæ, quam audioi Vilnæ cl Posnanise, c’est-à-dire dans les collèges de la Compagnie île Jésus ; notes qu’il serait intéressant de rapprocher des ouvrages de Javorskij. Cf. Philarjte (Gumilevskij), Obzor russkoi dukhovnoi literaluri, 3° éd., Saint-Pétersbourg, 1884, p. 268 sq. Et, à un point de vue plus général, on peut affirmer sans crainte que chercher dans la théologie latine la source de renseignement théologique est une vraie tradition parmi les docteurs de l’école de Kiev. Ils se font un point d’hon-