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paraissait une 3e édition entièrement refond.ie, et, en 1855, une 4e sous le titre : Catéchisme du sens commun et di' lu philosophie catholique. L’auteur s'écarte de la doctrine de Lamennais, pour qui « le consentement commun, sensus communis, est pour nous le sceau de la vérité et il n’en est pas d’autre ». Essai, t. ii, c. xiii. Dans son Catéchisme, divisé en trois parties, il étudie le sens commun comme fondement et règle de la certitude, il expose les vérités principales que la foi et le sens commun nous obligent de croire, et il critique ceux qui ne suivent pas la règle du sens commun et de la foi catholique. Selon lui, le sensas communis est l’ensemble des principes premiers de la raison naturelle et de leurs principales conséquences. Pour en connaître les éléments il faut s’adresser à la tête du genre humain, à l'Église. Il n’exclut pas, mais suppose les sens, le sens intime et la raison dans l’individu ; comme règle, il n’admet l’autorité du genre humain en dehors de l'Église qu’autant que ses témoignages sont conformes à la tradition chrétienne. Il revint sur ce sujet dans une Lettre à M. F. de Lamennais, du 23 mars 1835 (Hist. univ., éd. Fèvre, t. i, p. 127-129), à propos de la publication des Paroles d’un croyant, se séparant de plus en plus des idées de cet auteur : « Dieu m’a donné comme trois lumières : l’autorité de son Église, l’expérience de mes compagnons et enfin ma propre raison.

Arrivé à Paris, pour rejoindre Lamennais, il s’essaya d’abord dans la polémique. En 1826, il publiait à Paris la Lettre d’un anglican à un gallican, et la Lettre d’un membre du jeune cierge à l'évéque de Chartres. Ces deux publications étaient provoquées par la controverse gallicane. Dans la première, il combat la Déclaration de 1682 et montre que l’aboutissement des principes gallicans est l'Église établie à la façon d’Henri VIII ou des trente-neuf articles d’Elisabeth. La seconde traite des mêmes matières à un point de vue différent. Peutêtre contribua-t-elle à l'évolution de Clausel de Montais qui abandonna le gallicanisme après 1830.

L’année suivante, 1827, pour détruire l’illusion de Lamennais sur l'Église primitive et pour montrer que le christianisme n’avait pas dégénéré, que l'Église catholique était toujours féconde, il donna à Paris, en 2 vol., le Tableau des princijxdes conversions qui ont eu lieu parmi les protestants depuis le commencement du XIXe siècle ; après la seconde édition, 1811, paraissait une traduction allemande, à SchalTouse, 1811. Il publia, en même temps que le Tableau, des Motifs qui ont ramené à l'Église catholique un grand nombre de protestants, suivi du Catéchisme de controverse du P. Scheffmacher. Une 3e édition paraissait en 1850. Il décrit la lutte difficile que les convertis ont eu à soutenir contre les préjugés, la volonté généreuse d'être toujours fidèles à la vérité et à la vertu, la justification qu’ils donnent de leur nouvelle foi.

Son intimité avec Lamennais le fait s’intéresser à la fondation de l’Avenir, auquel il donne plusieurs articles, deux, entre autres, sur le célibat. Après la suspension du journal, il écrivit, en 1832, une Justification de la doctrine de Lamennais contre la censure imprimer à Toulouse. Treize évêques avaient signalé à Grégoire XYI cinquante-six propositions extraites des ouvrages de l’auteur de l’Essai et de ses amis. Rohrbacher s'était senti touché et voulut se justifier. Mais il ne livra pas cette lettre à la publication ; il en confia à sa mort le manuscrit au P. Gauthier, du séminaire du Saint-Esprit, demandant qu’on la conservât, car il en avait envoyé une copie à Lamennais. La préface seule a été publiée dans l’Histoire universelle, éd. Fèvre, t. i, p. 23-24 ; il y reconnaît la possibilité d’erreurs en des choses accessoires et affirme sa pleine soumission au Saint-Siège.

La Religion méditée, parue à Paris, en 1 836, en 2 vol.

et rééditée en 1852, se propose de rectifier une idée chère à Lamennais, que l'Église de nos jours était, dans une complète décadence. Hn étudiant les Pères pour son Histoire universelle, Rohrbacher s'était rendu compte qu’il y avait là un préjugé. Il résolut alors de faire, écrit-il, « une suite de méditations sur toute l’histoire de la religion et de l'Église, depuis la création du monde jusqu’au jugement dernier, afin de montrer par les faits que, dans ces derniers temps comme dans les autres, l'Église catholique a toujours été digne de Dieu et que, de nos jours même, elle n’a cessé d’enfanter de saints personnages et des œuvres saintes. » Hist. univ., éd. Fèvre, t. i, p. 43. On voit déjà dans cet ouvrage l’idée maîtresse de son Histoire, qui fait commencer l'Église à la création.

Ce fut également pour corriger une idée fausse de Lamennais que Rohrbacher publia les Réflexions sur la grâce et la nature, Besançon, 1838. Il avait eu entre les mains, en 1832, les cahiers de philosophie de Lamennais, qui préparait alors un Essai de philosophie catholique, qui deviendra l’Esquisse d’une philosophie. Dans ces cahiers, Lamennais ne voyait dans la grâce qu’une restauration de la nature et semblait confondre l’une avec l’autre ; et ces erreurs se répandaient parmi les élèves de Malestroit. Rohrbacher prépara sis Ré flex ions en étudiant saint Thomas, saint Bon aventure, Louis de Blois et les décrets du Saint-Siège. H soumit son travail à Lamennais qui l’approuva pleinement et promit de modifier dans ce sens son Essai. Il rétablit la distinction entre naturel et surnaturel, prouve l’existence des deux ordres de nature et de grâce, montre l’influence nécessaire de la grâce sur la nature. Mais on reconnaît qu’il n’est sur ce terrain qu’un écrivain d' « avant-poste ».

Kn préparant son Histoire universelle, il fut frappé de l’injustice des historiens vis-à-vis des papes, notamment de ceux de la grande période du Moyen Age, de Grégoire VU à Boniface VIII : la conduite de ces papes et de l'Église était attaquée dans maints ouvrages. Il s’attacha à cette question dès 1829, et publia en 2 vol., Besançon, 1838, les Rapports naturels entre les deux puissances d’après la tradition universelle, suivis du Discours de réception de l’auteur à l' Académie Stanislas de Nancy. Il y étudie les lois multiples de l’ordre social : la condition du pouvoir dans l’humanité, sa constitution dans l'Église, les limites inorales que doit respec ter la puissance temporelle, la conciliation entre la liberté et l’ordre, le droit divin de l'Église dont l’entier exercice doit lui être reconnu.

2° L’Histoire de l'Église. — Ces publications servirent à Rohrbacher de préparation à sa monumentale Histoire universelle de l'Église catholique. Il y travailla depuis 1826 ; elle parut de 1812 à 1849, en 28 volumes in-8°, chez Gaume, à Paris. Il donna lui-même une seconde édition de 1849 à 1853. Une Table dressée primitivement par L. Gauthier et remaniée ensuite et un Atlas dessiné par A. -H. Dufour portèrent l'édition à 30 volumes. L'œuvre de Rohrbacher s’arrête à 1845. Elle a été continuée par J. Chantrel, de 1815 à 1868, sous le titre Annales ecclésiastiques, t. xvi et xvii de l'édition in-4°, puis par dom Chamard, de 1868 à 1889, t. xviii et xix, sous forme d' Éphémértdes, avec tables permettant de grouper facilement les faits. Une nouvelle édition a été réimprimée avec ces additions, en 1903, par Guillaume, à Paris. D’autres furent entreprises par Mgr J. Fèvre, l’une allant jusqu'à la vingtcinquième année du pontificat de Pie IX, la seconde « revue, annotée, augmentée d’une vie de Rohrbacher, de considérations générales, de dissertations, et continuée jusqu’en 1900°, 16 vol. in-4°, Paris. 1899-1901. C’est la meilleure édition. L' Histoire universelle lut traduite en allemand (en partie) et publiée à Munster, à partir de 1860, par Hulskampf et divers auteurs ; en