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RICHARD DK SAINT-VICTOR. ŒUVRES
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tient des considérations pieuses sur le baptême reçu par le Christ et sur celui qu’il a institué.

6. De statu inlerioris hominis (col. 1115-1159). Ce traité expose l’état de la nature de l’homme après la chute. Il décrit la triple plaie de l’homme, constituée par la faiblesse, l’ignorance et la concupiscence ; les trois genres de péché qui en résultent, faiblesse, erreur, et méchanceté, auxquels il oppose comme remèdes les commandements de Dieu, ses promesses et ses menaces. De nombreuses considérations d’ordre ascétique sont mêlées à l’exposé de l’état de la nature humaine.

7. Dans l’opuscule intitulé De potestate tigandi et solvendi (col. 1159-1178), Richard distingue entre peccala dimittere et peccala remiltere. Par peccala dimiltere, il entend la relaxation de toute la peine due au péché, tandis que peccala remiltere ne signifie, selon lui, que la mitigation de cette peine. Cette mitigation est opérée par le prêtre au sacrement de pénitence. Quant à la relaxation totale, sans prestation d’aucune satisfaction de la part du pécheur, elle n’est réalisée qu’au baptême. Ce traité adressé à plusieurs personnes qui avaient consulté Richard est du reste plutôt parénétique que dogmatique.

8. De judiciaria potestate in finali et universali judicio (col. 1177-1185). Ce petit traité semble être un sermon ; il expose comment les apôtres procéderont au jugement de tous les hommes et détermineront les sanctions pour chacun d’entre eux. Il est lui aussi plutôt parénétique que dogmatique.

9. Tractalus de spirilu blasphemise (col. 1185-1191). Cet opuscule répond à une question posée concernant l’identité du péché de blasphème et du péché contre l’Esprit. L’auteur pèse le pour et le contre sans donner de solution bien nette.

10. De differentia peccati mortalis et venialis (col. 1191-1194). Un homme mort coupable d’un péché mortel et d’un péché véniel, ayant encouru la damnation éternelle par le premier, a-t-il à subir un surcroît de peine pour le second ? Richard, auquel cette question avait été posée, l’examine ici sans toutefois fournir une solution nette.

Troisième groupe.

Sept ouvrages de Richard

sont classés par Kulesza dans le groupe des écrits exégétiques.

1. Exposilio difllcultatum suborienlium in expositione tabernaculi fœderis (col. 211-255). Cette « exposition », que Richard écrivit à la demande de ses amis, contient dans une première partie la description littérale et tropologique du tabernacle de l’ancienne alliance. Il s’y joint des considérations d’ordre ascétique. Une deuxième partie donne la description du temple de Salomon, d’après les Livres des Rois. I Jne troisième partie se borne à la chronologie des rois d’Israël et de Juda. L’importance exégétique de ce traité est minime.

2. Declaralion.es nonnullarum difficultatum Scripturse (col. 255-265), Cet opuscule que les éditeurs estiment dédié à saint Bernard donne de brèves réflexions sur les animaux purs et impurs de l’ancienne Loi et sur le texte de saint Paul : Expurgate velus fermentum (1 Cor., v, 7). Il est sans grand intérêt et la dédicace à saint Bernard semble fort douteuse.

3. Dans le grand traité intitulé In visionem Ezechielis (col. 527-600), Richard s’applique à donner des explications littérales de la vision relatée dans le premier chapitre du prophète Ézéchiel, ainsi que de celle

qui décrit le temple des temps nouveaux dans les c. xi. i et suivants du même prophète. I.’auteur a inséré des plans dans son commentaire.

4. Explicatio aliquorum passuum difflcilium Aposloti (col. 665-684). Les passages difficiles que Richard

essaie d’expliquer en cet opuscule ont Irait au rôle des œuvres de la Loi dans la sanctification du chrétien.

5. Les sept livres qlie Richard a écrit In ApOCalyp sim Joannis (col. 683-887) forment le plus volumineux de ses traités exégétiques. Il suit le sillage de la Glossa urdinaria, divise comme elle l’Apocalypse en sept visions et joint à son commentaire des remarques et des applications d’ordre mystique.

6. De Enunanuele (col. 601-665). Richard nous avertit, dans un prologue, qu’il a écrit ce traité parce qu’un certain Maître André avait donné une explication peu satisfaisante du texte d’Isaïe Ecce virgo concipiet. Il reprend les arguments de saint Jérôme pour montrer que ce texte ne peut viser que la conception du Sauveur.

7. Quomodo Christus ponitur in signum populorum (col. 523-527). Ce très bref opuscule ne contient que des considérations pieuses sur le texte d’Isaïe : Radix Jesse qui stat in signum populorum (xi, 10).

Cette brève revue de l’œuvre exégétique de Richard suffit pour faire voir qu’elle est fort peu originale, voire même très peu scientifique, comme le remarque Kulesza, op. cil., p. 9.

Kulesza a omis de signaler parmi les écrits de Richard le Liber excerplionum (dans l’appendice d’Hugues de Saint-Victor, t. cxxvii, col. 193-225). On y trouve un résumé des trois premiers livres du Didascalicon d’Hugues de Saint-Victor. Il y expose l’origine et la différence des arts libéraux ; il donne une description du monde et un résumé de l’histoire. Si cet écrit n’est pas original, il démontre néanmoins que Richard reconnaissait l’utilité du savoir profane et s’y intéressait. L’éditeur de Richard, dans P. L., l’avait avec raison, rangé parmi les mélanges.

Trithème et Montfaucon ont prétendu qu’un certain nombre d’écrits de Richard se trouvent encore manuscrits dans des bibliothèques d’Italie, d’Allemagne et d’Angleterre. Aucun de ces traités n’a été publié et leur authenticité semble fort douteuse. Voir la nomenclature de ces traités, P. L., t. exevi, col. xxix sq.

III. Doctrine.

Richard de Saint-Victor est surtout connu comme auteur mystique. C’est en cette qualité que ses contemporains l’estimaient et Dante dit de lui que « pour contempler, il fut plus qu’un homme ». Paradis, chant x, 130. Son influence a été considérable sur la mystique allemande. Voir E. Krebs, Meisier Dietrich, Munster-en-W., 1906, p. 132 sq. Pour le détail de la doctrine mystique de Richard, voir ici Mystique, t. x, col. 2613 sq.

L’œuvre exégétique de Richard étant négligeable parce que peu originale, il reste à exposer sa doctrine philosophique et théologique.

Longtemps notre Victoria fut méconnu ; bien que sa position dans l’histoire de la pensée scolastique ait été convenablement exposée par Petau, les théologiens paraissaient faire fort peu de cas de lui. Encore en 1905, l’éditeur du deuxième volume de YHisloire de la philosophie d’Ueberweg, un prêtre catholique cependant, le rangeait parmi les mystiques qui tendent à éliminer la dialectique de la recherche théologique, t. ii, 9e éd., p. 222 sq. L’Histoire de la philosophie médiévale de M. de Wulf, parue vers le même temps, ne connaît Richard que comme auteur mystique. P. 231. Après Scheeben, c’est le P. de Régnon qui a eu le mérite de mettre en évidence l’originalité de la spéculation théologique de notre Victorin. Études de théologie positive sur lu sainte Trinité, t. ii, p. 235 sq. Cf. Scheeben, Dogmatik, t. i, p. 128. Plus tard, Clément Baumkcr a souligné l’importance de sa pensée philosophique, surtout en ce qui concerne les preuves de l’existence de Dieu, Witelo, Munster-en-W., 1907, p. 312.

Le traité De Trinitate étant le seul des grands écrits de Richard qui soit exclusivement spéculatif, nous estimons qu’une analyse détaillée constitue le meilleur moyen de saisir l’originalité de la pensée du prieur de Saint-Victor.