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REVIVISCENCE DES PECHES


implique que les mérites revivifiés doivent récupérer toute leur ancienne efficacité. 3. Le péché étant parfaitement remis, on ne comprendrait pas qu’il en restât un effet au ciel, c’est-à-dire une gloire moindre. Voir la discussion de ces arguments dans Billot, De sacramentis t. ii, p. 119-121, et dans Galtier, op. cit., p. 4 11.

Arguments indirects : réfutation de l’autre opinion. 1. Il est impossible que les mérites revivent seulement quant à leur récompense accidentelle. (Nous savons que Suarez déclare n’avoir jamais rencontré cette opinion.) 2. Il serait injuste qu’ils revivent pour une récompense essentielle possédée indistinctement à des titres distincts, ("est l’argument que nous avons rappelé en exposant le fondement du système, col. 2636. En étudiant de près ces arguments, on s’apercevra bien vite qu’ils n’apportent pas de raison décisive contre l’opinion de saint Thomas.

Nous sommes, en réalité, en présence de deux conceptions théologiques de l'œuvre méritoire : celle de saint Thomas, pour qui le mérite est un titre à la gloire, titre dont la valeur se mesure au degré de grâce et de charité du sujet méritant ; celle de Suarez. pour qui le mérite est une disposition à la grâce et à la gloire, disposition dont la valeur est absolue et doit être réalisée. La solution des thomistes récents et de Scot s’efforce de concilier les deux points de vue, niais elle introduit un élément, dont le moins qu’on puisse dire est qu’il représente une anomalie psychologique : cette disposition supérieure qui interviendra nécessairement dans l'âme, tout au moins a l’heure de la mort.

En matière si délicate, où l’on peut craindre les écarts d’imagination, où l’on doit surtout être convaincu des insuffisances de notre raison, même éclairée par la foi, il est prudent de ne porter aucun jugement absolu. Pratiquement, il semble que s’en tenir à l’opinion plus sévère de saint Thomas et des anciens théologiens, c’est la seule manière de n’avoir pas de surprise dans l’au-delà. Au moment où elle bénit pour la dernière fois le cadavre de ses enfants, l'Église prie le Dieu de miséricorde « de ne point entrer avec son serviteur en des comptes trop rigoureux ». Non intres in judicium cum servo luo, Domine. Voilà qui nous met assez loin de la comptabilité par doit et avoir qui se trahit en trop d’auteurs modernes. « Il faut prendre garde, en pareille matière, de donner trop d’importance à l’argument de consolation, en adoptant une opinion, simplement parce qu’elle est plus consolante. La vraie consolation est celle qui ne s’appuie pas sur des imaginations, mais sur la vérité dont il est écrit : La vérité du Seigneur demeure éternellement. » Billot, De sacramentis, t. ii, p. 120-121.

On consultera.' 1° Solution de saint Thomas-Danez et des anciens thomistes : les auteurs eux-mêmes, aux endroits indiqués au cours de l’article. Parmi les contemporains : Billot, De oirtulibiis infusis (édil. de L905), prolegomenon, § 1, n. 2 ; S 2, n. 2, p. 25-29, 44-45 ; De sacramentis, t. u (édit. de 1922), p. 104-121 ; lie gratin ledit, de 11)12), th. xii. s- II, p. 28.V288 ; I.êpicier, De pœnitentia, q. vi, p. 219-245 ; A. d’Alès, De sacramenio pœnitenlim, c. v, th. mi ; Jannssens, De gratia Jiei et Cliristi, Frlbourg-en-B., 1021, p. 497-498 ; Hervé, Manuale, t. iv, n. 325-326 (niais simplement l'édition de 1937) et même Hugon, nonobstant son affirmation de fidélité à Gonet, Traclatus dogmatici, t. iii, p. 554-564. On consultera également Et. Hugueny, O. 1'.. I < pénitence, t. i,

Somme thiologique, édit. de la Re » ue des Jeunes, appen dice n ; H.-D. Noble. O. P., La charité, t. i (id.), notes 47,

50, p. 28l>, 287, et appendice ii, S 2, Le proi/rcs de la chu

riie. p. 393-421 ; Th. Deman, o. 1'., L’accroissement des

ocrtiis dans sailli Thonais et dans l'École thomiste, dans le

Dictionnaire de spiritualité ascétique et mystique, l. i. col. 138150 ; Ami </ « clergé, 1932, ». 358-363 ; 1933, p. 247. 2.">2. Voir

aussi c rd. Van Hoey, De lirtute charilatis, Malines, 1929, q. 'i, c..

2° Solution moyenne (le Scoi, -Jean de Saint-Thomas, Gonet, Billuart : voir les références au cours de l’article. Cette opi nion hybride, aujourd’hui délaissée, n’a plus qu’un intérêt rétrospectif. On consultera surtout Gonet, Clypeus, t. VI, Paris, 1876, Tractalus de pœnitentia, disp. VI, a. 1 et 2 (n. 1 à 01) ; Billuart, Cursus Iheologiæ, t. ix, Paris, 1878, Tractalus de sacramenio pœnitentia ;, dissert. iii, a. 4 et 5 ; Salmanticenses, tract, xvi, De gratin, disp. V, dub. un., a. 6.

3° Solution suarézienne, communément adoptée dans l'école jésuite. — La lecture de l’opuscule v de Suarez s’impose : Rcleciio de revwisceniia meritorum (édition Vives, t. ix). Voir également les autres auteurs cités au cours de l’article. Outre les traités De p enilenliade De Augustinis, De San, Palmieri, l.ercher, Huarte, le trait é De gralia de Mazzclla, on consultera spécialement Chr. Pesch, Prælectioncs dogmatiæ t. vii, De sacramenio pœnitentiæ, n. 31C, 344, et P. Galtier, De pœnitentia, Paris, 1923, p. 560-576. Ces deux auteurs s’eftorcent de s’abriter sous l’autorité de saint Thomas ou tout au moins d’en infirmer la portée. Voir également X. Gihr, Les sacrements de l'Église catholique, trad. française, t. IV.

IV. Reviviscence des péchés.

« La reviviscence, après une chute, des péchés déjà pardonnes, constitue une question que l’on pourrait dire « classée « en théologie depuis des siècles. » J. de Ghellinck, La reviviscence des péchés pardonnes, dans Nouvelle revue théologique, 1909, p. 400. Aussi la traiterons-nous au seul point de vue historique. On peut distinguer trois périodes : 1° Avant saint Thomas ; 2° L'œuvre de saint Thomas ; 3° Les spéculations postérieures à saint Thomas.

I. avaxt Saint thomas.

1° Comment se posait le problème ? — Aucune exposition ne vaut celle de Pierre Lombard, Sent., t. IV, dist. XXII, c. i, édit. de Quaracchi, t. ii, p. 885-888. « On vient d’affirmer, en s’appuyant sur de nombreuses autorités, que par une sincère contrition de cœur les péchés sont remis avant toute confession et satisfaction, même à celui qui peut-être retombera dans son crime. On demande donc si, méprisant de se confesser après avoir eu la contrition, ou encore retombant dans son péché ou dans un péché semblable, le pénitent verra ses péchés passés revivre. De cette question la solution est obscure et incertaine, les uns affirmant, d’autres niant que les péchés passés revivent ultérieurement quant à la peine.

Ceux qui tiennent pour la reviviscence des péchés quant à la peine invoquent un certain nombre de témoignages :

S. Ambroise (en réalité l’Ambrosiaster) : Donale invicem, si aller in iilterum peccel ; alioquin Deus repetit dimissa. Si enim in his contemptus jucril, sine dubio revocahil sententiam, per quam miscrirordiam dederal, sicut in Evangelio de servo nequam legitur, qui in conservum suum impius deprehensus est (cf. Matth., xviii, 33). Di episl. ad Eph., iv, 32, P. L., t. xvii (1845), col. 393.

Raban Maux (?) : Nequam servum tradidit Deustortoribus, quoadusque redderel universum debilum ; quia non solum peccala, quæ posl baplismum homo egit, repulabuntur ci ad pœnam, sed etiam peccata originalia, quæ in bapiismo ci sunt dimissa. Le texte se trouve dans Gratien, Décret, eau. Si Judas, 1, De ptciulentia, dist. IV.

S. Grégoire : Ex diclis CL’angclicis constat quia, si ex corde non dimillimus quod in nos delinquitur, et hoc rursum cxigitur, quod juin nobis per pœnilenliam dimissum fuisse gaudebamus. Diul., t. IV, c. i.x, P. L., t. lxxvii, col. 429. Dans C.ralien, can. Constat ex diclis, 2, De psenitentia, ibid.

S. Augustin : Dicit Deus : « Dimille, et dimilletur tibi (Luc, vi, 37) » ; sed ego prius dimisi, dimille vel poslea. Nom si non dimiscris, revocabo le, et quidquid dimiseram, replicabo te. Serm., lxxxiii, c. vi, n. 7. Dans Gratien. can. Dicit Dominas, 3, ibid.

Le même (?) : Qui divini beneficii oblilus, suas vult vindicare injurias, non solum de futuris peccatis veniam non merebitur, sed etiam præterita, quæ juin sibi dimissa credebal, ad vindictam ei replicabuntur. Ne se trouve