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RÉSURRECTION. LES PÈRES LATINS
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ments ? « J'étais autre à dix ans, écrit-il, autre à trente, autre à cinquante, et autre aujourd’hui que mes cheveux sont tout blancs. Mais, conformément aux traditions des Eglises et à l’enseignement de saint Paul, il faut répondre que nous ressusciterons tous à l'état d’hommes parfaits et dans la plénitude de l'âge du Christ. » EpisL, cviii, n. 24, P. L., t. xxii, col. 902.

Nous avons vu ailleurs, voir Purgatoire, col. 1216, que saint Ambroise admettait plusieurs résurrections. Mois la première seule est la résurrection des corps à la fin du monde, les autres n'étant que des résurrections spirituelles, désignant l’entrée des élus au ciel ou la fin de leurs purifications. La véritable résurrection, la résurrection des corps, se présente, chez Ambroise, sous de multiples affirmations. Elle sera pour tous, justes et impies, la justice de Dieu l’exigeant, puisque le corps a sa part des actions de l'âme. De excessu jrairissui Sattjri, t. II, n. 88, P. L., t. xvi (1843), col. 1340. Elle implique l’identité du sujet qui est mort et qui reçoit une vie nouvelle. Id., n. 68, 77, col. 1334, 1337. Le terme seul de résurrection indique qu’il en doit être ainsi, heec est enim resurrectio… ut, quod cecidil, hoc resurgat ; quod mortuam fueril, reviviscat. Id., n. 87, col. 1340. Enfin, dans la résurrection des élus, le corps subira une transformation, une spiritualisation, qui devra cependant respecter la réalité matérielle du corps : immulabuntur justi in incorruplionem, nuinenle corporis veritale. In Ps. i, n. 51 ; In Lucam, t. X, n. 168, 170 ; cꝟ. t. VII, n. 94, t. xiv, col. 949 ; t. xv, col. 1846, 1846, 1723. On trouve esquissée l’analogie de la semence et indiqué le recours à la puissance divine pour expliquer la résurrection des corps. De excessu…, t. II, n. 60-64, t. xvi, col. 1332-1333.

2. Le dogme de la résurrection chez saint Augustin. — Pendant quelque temps, Augustin avait admis l’erreur du millénarisme. Cf. De civilale Dei, t. XX, c. vii, n. 4, P. L., t. xli, col. 669 ; cf. Serm., ceux, n. 2, t. xxxviii, col. 1197. Mais il repoussa plus tard cette doctrine et, pour lui enlever son meilleur point d’appui, présenta dans le livre XX De civilateDei, une explication allégorique de la vision de Patmos. La première résurrection serait la rédemption et l’appel à la vie chrétienne ; le règne de Jésus-Christ et de ses saints n’est autre que l’Eglise et son apostolat ici-bas ; les mille ans sont ou bien les mille dernières années qui précéderont le jugement ou mieux la durée totale de l'Église terrestre. De civ. Dei, t. XX, c. vi, n. 1, 2 ; c. vii, n. 2 ; c. ix, n. 1, t. xli, col. 665, 606, 668, 672.

Ainsi donc, la résurrection de la chair se produira à la fin du monde. On peut dire qu’elle apparaît chez Augustin comme l’un des dogmes qui préoccupait alors vivement les esprits et donnait lieu à des questions bien étranges et même grossières. Augustin en a traité surtout dans les Serm., cc.ci.xi et ccclxii, t. xxxix, col. 1599 et 1611, dans VEnchiridion, c. lxxxiv-xcii, t. xl, col. 272-275, et dans le De civilate Dei, t. XXII,

c. V, XM-XXIX.

a) Tout d’abord, saint Augustin confesse comme un dogme de la foi chrétienne le fait de la résurrection universelle, à la fin des temps : « Un chrétien, dit-il, ne doit pas douter le moins du monde que la chair de tous les hommes, de ceux qui sont nés et de ceux qui naîtront, de tous ceux qui sont morts et de tous ceux qui mourront, ne ressuscite un jour. » Enchir., lxxxiv, t. xl, col. 272 ; cf. lxxxv-lxxxvii ; cf. Serm., ccxli, n. 1, t. xxx viii, col. 1133 : » La résurrection des morts est la croyance propre des chrétiens. » Toutefois, Augustin hésite, à propos de I Thess., iv, 14-16, pour le cas des derniers survivants ; s’ils ne meurent pas, ils n’auront pas à ressusciter. Il incline toutefois à penser que, par le péché originel, tous les hommes sont condamnés à la mort. De octo Dulc. quæsl., q. iii, n. 3, vellem hinc audire doctiores… ; n. 4-6, t. xl, col. 159 161. Cf. EpisL, cxciii, n. 9-13, t. xxxiii, col. 872-874.

b) Quoi qu’il en soit, les corps ressuscites seront identiques aux corps possédés sur cette terre. Dans son sermon cclxiv, n. 6, Augustin explique que, même dans les élus dont le corps sera « transformé », l’identité sera sauvegardée : « La chair ressuscitera, mais que devientelle ? Elle est changée, elle devient elle-même corps céleste et angélique. Eh ! quoi, les anges auraient-ils des corps ? Voici la différence : cette chair qui ressuscite, c’est la même qui est ensevelie, qui meurt, c’est cette chair qui se voit, qui se touche, qui a besoin de manger et de boire pour subsister, cette chair qui est malade, qui endure la souffrance ; c’est donc cette même chair qui ressuscitera, chez les impies en vue des peines éternelles, chez les justes, pour être transformée. Et quand sera faite cette transformation, qu’arrivera-t-il ? C’est alors que le corps sera appelé céleste et non plus chair mortelle ». T. xxxviii, col. 1217 ; cf. Serm., cclvi, n. 2, col. 1192 ; Enchir., c. lxxxix, t. xl, col. 273.

Nonobstant cette identité, tous les corps sans distinction revêtiront l’incorruptibilité, aussi bien les damnés que les élus. Chez les damnés, l’incorruptibilité empêchera le feu de consumer les corps. Serm., ci i. i. Inc. cit. ; Enchir., c. XCII, col. 274. Chez les élus, cette incorruptibilité se doublera de la transformation spirituelle dont il vient d'être parlé et qui leur communiquera les qualités des corps glorieux. Voir ce mot. t. iii, col. 1896.

c) La restitution des corps dans leur intégrité sera due à la puissance divine : « A Dieu ne plaise que, pour ressusciter les corps et leur rendre la vie, la toute-puissance du Créateur ne puisse rappeler les éléments détruits par les bêtes ou par le feu ou réduits en poussière et en cendre, ou dissous dans les liquides ou répandus dans les airs… » De civ. Dei, t. XXII, c. xx, n. 1, t. xli, col. 782. Cependant Augustin nous laisse entendre que la répartition des éléments matériels importe beaucoup moins à l’intégrité du corps ressuscité, que la disposition générale : « Si une statue d’un inétal fusible était liquéfiée par la chaleur, ou si elle était broyée en poussière ou mélangée dans une autre masse, et que l’artiste voulût de nouveau la reconstituer avec la même quantité de matière, il n’importerait pas à son intégrité quelles parcelles de matière seraient rendues à tel membre de la statue, si cependant tout ce qui lui appartenait était repris pour lui être rendu. C’est ainsi que Dieu, artisan admirable et ineffable, nous rendra notre chair, avec une célérité admirable et ineffable, dans tout ce qui la constituait. « Qu’importe à sa réintégration complète que les cheveux redeviennent cheveux et les ongles redeviennent ongles, ou que les éléments qui les constituaient soient changés en chair ou en d’autres parties, dès lors que la providence de l’artiste veille à ce que rien d’indécent ne se produise. » Enchir., c. lxxxix, col. 273.

Cette comparaison du moule fait songer à l’elSoç -/apaxTT, ptÇov d’Origène et l’indilTérence des éléments matériels relativement à la reconstitution future des corps ressuscites paraît entr’ouvrir la porte à des conceptions moins rigides que l’identité strictement matérielle.

d) En plus de l’identité, il y aura, dans les corps ressuscites, une intégrité parfaite, dégagée de toute défectuosité. Au sens littéral de Luc, xxi, 8, nous ne perdrons aucun des cheveux de notre tête ; il n’y aura que les choses laides et disproportionnées qui disparaîtront. Toutes les parties essentielles, tous les organes, même ceux de la génération, nous seront conservés. De civ. Dei, t. XXII, c. xix ; cf. c. xiv, t. xli, col. 780, 777. Les infirmités seront supprimées. Enchir., c. lxxxix, col. 273. Saint Jérôme, en vertu du principe que tous doivent ressusciter à l'âge parfait du Christ, voir ci-