Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 13.2.djvu/559

Cette page n’a pas encore été corrigée
2531
2532
RESURRECTION. ADVERSAIRES D’ORIGENE


évidence, donner la solution dernière du problème de la résurrection. Néanmoins, dans la pensée d’Origène, elle fait voir que la puissance divine, dans la reconstitution du même corps humain, met en jeu une force inhérente à l'âme, une ralio seminalis, capable de reconstituer l'être humain, sans lui rendre nécessairement sa condition primitive. Voir De princ, t. II, c. x, n. 3 ; t. III, c. vi, n. 1 sq., P. G., t. xi, col. 236, 333 ; Cont. Celsum, t. II, n. 77 ; t. V, n. 19, 22, 23 ; t. VIII, n. 32, 49, col. 914, 1208, 1216, 1564, 1589 ; cf./n Matth., tom. xvii, n. 28, P. G., t. an, col. 1557. L’insistance qu’Origène met à opposer le « corps spirituel » à la chair ne signifie donc nullement que le docteur alexandrin soit opposé à la résurrection : il indique simplement, à la suite de saint Paul, comment le Xoyoç oTC£p[i.aTt.xôç modifiera, dans le sens des exigences de l’esprit, la condition naturelle des corps glorifiés. En réalité, comme le remarque saint Jérôme lui-même (pourtant peu suspect de favoriser Origène), le docteur alexandrin s’est eilorcé d'éviter deux erreurs opposées : le matérialisme grossier qui voudrait, à la résurrection, reconstituer les corps avec toutes les fonctions, tous les besoins de l'état présent ; d’un autre côté, le spiritualisme outré des gnostiques et des manichéens qui excluent du salut le corps, pour en réserver les avantages à l'âme seule.

La pensée d’Origène ne semble pas avoir été bien comprise d’un certain nombre de Pères. Mais, on ne voit pas comment Justinien a pu accuser Origène d’enseigner que les corps ressuscites seraient sphériques. Voir ici, Origénisme, t. xi, col. 1583.

On consultera sur le problème de la résurrection des corps chez Origène : l’art. Origène (G. Bardy), t. xi, col. 1545-1547 ; A. d’Alès, art. Résurrection de la cliair, dans le Dicl. npnl. de la foi catholique, t. IV, col. 994-908 ; J.-B. Kraus, Die Lchre des Origenes tiber die Auferslehung der Todten, Ratisbonne, 1859 ; E. de Faye, Origène, sa vie, son œuvre, sa pensée, t. iii, Paris, 1829 ; P.-D. lluet, Origeniana, t. II, c. ii, q. ix, dans P. G., t. xvii, col. 080-995 ; Pamphile, Apologia pro Origène, x ; R. Cadiou, La jeunesse d’Origène, Paris, 1936, p. 117-126.

3. Adamanlius, dans le dialogue De recta in Deum jide, désigne certainement, dans la pensée de l’auteur anonyme, Origène lui-même, défendant la vérité catholique contre l’hérétique Marinos. La doctrine est cependant indépendante de celle d’Origène. D’une part, en efîet, est rejetée la préexistence des âmes qu’on attribuait à Origène, et les considérations physiologiques touchant le renouvellement du corps dans l’assimilation et l'élimination des éléments sont écartées par une fin de non-recevoir. Le corps ressuscitera tel que nous le possédons actuellement, et non un corps spirituel. Mais, d’autre part, l’auteur admet l’existence d’un principe corporel invariable, tel que l’atteste la permanence des cicatrices et des mutilations. L’analogie du grain jeté en terre et donnant naissance â une lige nouvelle s’y retrouve, v, 16, P. G., t. XI, col. 18531856, 1868.

Les adversaires d’Oriyène.

Par certains côtés,

la doctrine d’Origène prêtait le flanc à la critique. Qu’est cette virtualité physique, ce X6yoç 07rcpp.aTi.xoc qui subsiste après la mort ? C’est par cette force, cette énergie, qu’Origène explique les apparitions de Moïse et d'Élie. Si la résurrection doit s’expliquer seulement par la permanence de cette forme, schème (oyrij.a.), de l’individualité, l’on doit dire que Moïse et Elie sont ressuscites avant Jésus-Christ. Ou bien, pour éviter cet excès, il faut admettre une résurrection vraiment charnelle et contredire Origène. La forme du corps ne survit pas au corps et périt avec lui. Ainsi raisonnent, en substance, les adversaires d’Origène.

1. Saint Méthode d’Olympe.

On a lii, t. x.col. 1610, l’analyse de l’Aglaophon ou dialogue De la résurrection, composé par saint Méthode pour réfuter Origène.

Laissant de côté les considérations accessoires, nous n’avons à retenir que la critique essentielle. Méthode s’efforce de démontrer qu’Origène n’admet pas que la chair soit identiquement restituée à chacun. C’est la forme seule, le schème, l’elSoç xapax-njptÇov °I u i explique la résurrection. Elle seule donc représente la permanence de notre corps actuel. Si la nature du corps est « de s'écouler, de ne jamais demeurer identique à lui-même, mais de cesser et de recommencer autour de la forme qui distingue la figure humaine et maintient l’arrangement des parties », il ne saurait être question de véritable résurrection. Méthode, par la bouche de Memmian, critique les constatations, pourtant physiologiquement exactes, d’Origène et veut y substituer des éléments inadmissibles. Voir t. II, c. ix-xiv, édition Bonwetsch, p. 345-360. Dans l’interprétation de certains textes scripturaires, Origène avait insisté plus que de droit sur l’opposition entre l'âme et « ce corps matériel, véritable prison, où l'âme est captive, pesante enveloppe qui sans cesse la traîne au péché ». Cette dualité absolue de l'âme et du corps, héritée de la philosophie platonicienne, permettait à Méthode de comprendre 1' elSoç yocpaxT7)p[Çov dans un sens peutêtre très différent de celui d’Origène. Cette forme, principe d'énergie et d’identité en un corps sans cesse soumis au flux de la matière qui se renouvelle, devient, pour Méthode, un simple moule, extrinsèque à la matière qui en reçoit ses traits distinctifs. Il emploie même, c. xii, p. 391, la comparaison du tuyau dans lequel l’eau ne demeure pas un seul instant immobile, mais constamment s'écoule, la paroi du tuyau demeurant cependant la même : ce tuyau, c’est la forme dont parle Origène et dans laquelle les éléments corporels passent et se transforment ! Il ne semble pas que .Méthode ait compris exactement la pensée de l’Alexandrin ; il s’est attaché surtout à reprendre certaines formules plus ou moins discutables dont Origène avait enveloppé son système.

Par contre, on ne voit pas trop bien en quoi consiste, pour Méthode, la nature du corps ressuscité. « Cette lacune tient, de toute évidence, au défaut d’idée précise sur la nature et la croissance du corps. Il semble que, pour Méthode, le corps soit une unité stable dont Dieu a directement assuré l’organisation ; de cette synthèse, acquise une fois pour toutes, la mort dissout les éléments, mais au dernier jour Dieu saura retrouver chacun d’eux et restituer ainsi le corps qu’il nous avait jadis formé. » Art. Méthode d’Olympe, col. 1611.

Quoi qu’il en soit, on aurait tort de trouver en Méthode, au titre de sa critique négative contre Origène, un témoin de la tradition catholique. Origène et Méthode sont tous deux les témoins irrécusables de la croyance au dogme de la résurrection de la chair. C’est sur l’explication theologique de ce dogme qu’ils diffèrent, et leur opposition se retrouvera plus tard dans le camp même des théologiens latins. L’idée de « germe », sur laquelle Origène base son explication, appartient, à coup sûr, à la tradition. Nous l’avons constaté dès le début. C’est donc plutôt en ce sens qu’il faut orienter la pensée théologique, si l’on veut rester fidèle aux premières directives du magistère ordinaire.

2. Saint Eusthated' Aniioche reprend, sur un ton plus vif, les critiques de Méthode « de sainte mémoire ». « Origène, dit-il, a frayé imprudemment les voies aux hérétiques, en déterminant comme sujet de la résurrection, la forme, non le corps lui-même, toïç oûpeaicotouç ëScoxs TcâpoSov à60ù>.coç, ird eïSouç àXV oùx èîti acô|i, aTO< ; oojtoû tyjv àvâaxaaiv ôpiaâ^isvoç. De Engastrimytho contra Origenem, xxii, P. G., t. xviii, col. 660. On le voit, c’est la même critique, basée sur la même Interprétation,