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    1. RÉSURRECTION##


RÉSURRECTION. TERTULLIEN

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elle est le moyen et l’instrument de multiples œuvres sanctifiantes. L'Écriture l’exalte souvent, considérant les corps des hommes comme les temples de Dieu et les membres du Christ. Toute chair verra le salut de Dieu. Is., xl, 5. Les textes invoqués sont Is., xl, 6 ; Joël., ii, 28 ; Gal., vi, 17 (par opposition à Gen., vi, 3, et à Gal., v, 17) ; I Cor., ni, 17 ; vi, 15, 20. Dieu n’abandonnera pas à une corruption définitive ce corps qui lui représente les traits du Christ, cette créature qui lui est chère à tant de titres. C. v-xi, col. 800-810.

La puissance divine nous est garante de la possibilité de la résurrection. Si Dieu a créé le monde ex uihilo, ou même s’il l’avait élaboré d’une manière préexistante, il peut refaire pour l'être humain ce qu’il a déjà fait une première fois. Tertullien reprend ici les arguments que nous avons déjà rencontrés avant lui et il les illustre des mêmes analogies : le jour sortant de la nuit, les astres brillant après une éclipse, le renouvellement des saisons, la vie végétale germant dans la corruption, le phénix qui renaît de ses cendres et qu’il croit trouver dans Ps. xci, 13. Voir c. xii-xiii, col. 810-81 1.

Ici comme dans YApologelicum, l’argument décisif est tiré de la justice divine. Le jugement de Dieu doit être parfait ; il ne le serait pas, si l’homme n'était jugé tel qu’il a vécu. Tout l’homme, âme et corps, doit donc veniraujugement.C.xiv, col. 812. Pour illustrerla force de cet argument, Tertullien fait valoir l’union intime de l'àme et du corps dans la moindre de ses actions. Les mouvements secrets du cœur sont imputés à l'àme, et, pour le prouver, Tertullien interpiète en un sens très matériel Matth., v, 28 ; ix, 4. Aucune opération mentale qui ne dépende du corps. Si l’initiative appartient à l'âme, la justice parfaite ne doit pas s’en tenir au principal responsable, mais elle doit rendre même à chaque subalterne selon ses œuvres, ministros facti eu jusque deposcit.Le fait que le corps est l’instrument à l'égard de l'àme doit entraîner pour lui la rétribution de ses œuvres, d’autant que le corps, associé à toutes les opérations de l'âme, fait partie intégrante de l'être moral. C. xv, xvi, col. 813-814. Cette doctrine est consacrée par l'Écriture, l’Apôtre imputant à la chair les fautes commandées par l'âme et demandant au chrétien de glorifier et de porter Dieu en son corps. I Thess., iv, 4 ; I Cor., vi, 20. Toutefois, Tertullien abandonne ici l’argument qu’il avait fait valoir dans VApologelicum et dans le De leslimonio anima :, de l'âme incapable d'éprouver peine ou plaisir sans le corps. C. xvii, col. 816818. En résumé, il faut une sanction complète, laquelle peut s’exercer seulement après la résurrection, nonobstant les peines déjà endurées par l'âme aux enfers dans l’attente du dernier jugement.

Tous ces arguments de raison ne sont que la préface d’une démonstration scripturaire qui remplit les deux tiers du traité. Sur ce point fondamental du dogme, l'Écriture a parlé clairement et non en allégories. Or, la résurrection des corps qui doit se faire à la fin des temps est objet des prophéties et de l’enseignement des évangiles et des écrits apostoliques.

Objet des prophéties. Dans Luc, xxi, 26 sq., le Seigneur décrit les signes précurseurs de la résurrection et du jugement. S’il fallait entendre les prophéties concernant la résurrection d’une résurrection purement spiiituelle, telle que saint Paul la recommande aux Colossiens, c. i-ii, cette résurrection spirituelle, qui doit se faire dès maintenant, serait prématurée. Il faut donc admettre une autre résurrection, la résurrection corporelle, affirmée ailleurs par le même apôtre, Gal., v, 5 ; Phil., iii, Il sq. ; Gal., vi, 9 ; II Tim., i, 18 ; I Tim., vi, 14-15 ; et par saint Jean, I Joa., iii, 2, ainsi que par saint Pierre, Act., iii, 19 sq. C. xxiii-xxiv, col. 823-830. L’Apocalypse annonce, xx, Il sq., une résurrection générale pour la fin des temps. L’exégèse allégorique permettrait de retrouver la résurrection

corporelle prédite en maints passages des prophètes. La prophétie d'Ézéchiel a plus de portée qu’une simple allégorie et vouloir la restreindre, avec les hérétiques, à la simple restauration d’Israël, c’est en méconnaître le sens. Cf. les autres prophéties, Mal., iv, 2 sq. ; Is., lxvi, 14 ; xxvi, 19 ; lxvi, 22-24. Tertullien cite aussi Hénoch, lxvi, 5. C. xxv-xxxii, col. 830-841.

Enseignement des évangiles. S’il est un sujet dont Jésus parla sans parabole ni allégorie, c’est bien le jugement et la résurrection des corps. Voir surtout .Matth., xi, 22-24 (menaces) ; Matth., x, 7 ; Luc, xiv, 14 (promesses). Il est venu sauver tout ce qui a péri. Luc, xix, 10 ; cf. Joa., vi, 39-40. Il recommande de craindre qui peut précipiter dans la géhenne le corps et l'âme, Matth., x, 28 ; cf. Matth., x, 29 ; Joa., vi, 39 ; Matth., viii, 11, etc. Il affirme implicitement la résurrection contre les sadducéens, Matth., xxii, 23 sq. ; et si, pour Jésus, « la chair ne sert de rien », Joa., vi, 64 ; s’il proclame les élus semblables aux anges, Matth., xxii, 30, il ne faut rien conclure de là contre la résurrection : Jésus a voulu simplement convier ses auditeurs à la vie de l’esprit. Enfin, Jésus a ressuscité des morts, donnant par là des arrhes de la résurrection générale. C. xxxiii-xxxviii, col. 841-849.

Enseignement des écrits apostoliques. A part le grand fait de la résurrection du Sauveur, les apôtres n’introduisent aucun élément nouveau touchant la résurrection. D’ailleurs, seuls, les sadducéens les contredisaient. Paul a confessé sa croyance à la résurrection devant le sanhédrin, Act., xxiii, 6, devant Agrippa, xxvi, 28, et à l’Aréopage, xvii, 31. Il inculque la même croyance en presque toutes ses épîtres : il ne faut donc pas s’arrêter à quelques textes obscurs, comme II Cor., iv, 16 ; v, 1 sq. ; I Thess., iv, 14 sq. ; I Cor., xv, 51 sq. ; II Cor., v, 6 ; Eph., iv, 22 ; Rom., vin, 8 sq. ; vi, 6, et surtout I Cor., xv, 50. Sur les difficultés soulevées par les adversaires de la résurrection à l’aide de ces textes et sur les réponses de Tertullien, voir A. d’Alès, La théologie de Terlullien, Paris, 1905, p. 150-159. C. xxxix-l, col. 849-867.

Les derniers chapitres montrent l’identité des corps ressuscites, nonobstant les transformations dont parle saint Paul, I Cor., xv, 36 sq., pour les corps glorieux. La vie périssable fera place à une vie plénière de l’esprit. L'élément mortel sera absorbé pour que le corps puisse revêtir l’immortalité, non par une destruction, perditio, mais par un changement, demutatio, qui lui communiquera une nouvelle manière d'être : nec alius efficialUT, sed aliud. C. lii-lvi, col. 870-877.

Il faut enfin répondre aux objections vulgaires. Dans la résurrection, les infirmités disparaîtront ; tous entreront en possession d’un bonheur sans ombre. C. X-vin, col. 880 ; cf. Is., xxxv, 10 ; Apoc, vii, 17 ; xxi, 4. Qui cherche ici des figures, les trouvera dans la conservation merveilleuse des vêtements et des chaussures portées par les Israélites dans le désert, dans la préservation miraculeuse des trois enfants dans la fournaise, dans la protection accordée à Jonas et dans le privilège d’immortalité conféré à Hénoch et à Élie. Exemples déjà proposés par saint Irénée, voircol. 2523. Si l’on objecte que les mystères de l'éternité ne peuvent concerner nos corps mortels, il faut répondre avec l’Apôtre qu’au contraire nous sommes * héritiers des choses à venir ». I Cor., ni, 22. La grossièreté des fonctions corporelles disparaîtra : la résurrection exige l’intégrité des membres, non leur usage : tel un vieux navire qui ne tient plus la mer, mais qu’on a remis à neuf en considération d’anciens services. Le corps s’abstiendra d’actes qui n’ont plus de raison d'être dans le royaume de Dieu. C. lix-lxii, col. 881-885.

Conclusion : « Toute chair ressuscitera, identiquement, intégralement. Jésus-Christ, médiateur entre Dieu et l’homme, a fiancé dans sa personne la chair à