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    1. RESTITUTION##


RESTITUTION. A QUI RESTITUER

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rcs vel pretium omnino est erogandum in usus pios, juxta prsesumptam voluntatem domini, qui adhuc illius rci dominium retinet, quamdiu rcs potest in ejus manus redire. K contra, quando, spectatis circumstantiis longitudinis temporis vcl distantiæ loci, … non videtur possibile ut rcs ad dominum redeat, tune Ma fit nullius, et ideo acquiritnr a primo occupante, qui illctm non lenetur dure juxta voluntatem prioris domini, cum ille impossibilitale cam recuperandi jus dominii prorsus amiserit. S. Alphonse, t. III, n. 603. Si le bien est détruit ou consomme au moment où le propriétaire apparaît, il faut appliquer les principes énoncés à propos du possesseur de bonne foi (voir plus haut, col. 247 !  !.

b. S’il s’agit de biens provenant d’un délit et que le propriétaire ne puisse être connu, il faut les donner aux lieux sacrés ou aux pauvres ainsi que le décrète le pape Alexandre III : Qui sine ante, sive post interdictum nostrum usuras extorserint, cogendi sunt per pienam quam slatuimus in concilia, eus his a quibus exlorscrunl, vcl eorum liseredibus resdluere, vel lus non superstitibus, pauperibus erogare. Décrétâtes, I. V, tit. xix, De usuris, c. 5.

Si le détenteur est aussi pauvre que les « pauvres » auxquels il devrait restituer et s’il a des consanguins qui sont dans une situation identique, il lui est licite de s’attribuer ainsi qu’aux siens une partie ou la totalité des biens, dont il ne connaît pas le propriétaire. C’est qu’en effet le besoin certain et évident est une cause suffisante, même s’agissant d’un homme malhonnête, pour retenir le bien qu’il a ; cf. S. Alphonse, Praxis conjes., n. 24. Wouters, après et avec d’autres, dira même que le possesseur de mauvaise foi peut retenir ce qu’il a, sans plus. Op. cit., n. 1011, 4. Il faut cependant ici veiller à ne pas tomber dans l’excès : on est trop facilement aveugle dans sa propre cause. Sporer, Theologia moralis, t. ii, tr. iv, n. 10(5 ; Lacroix, Theologia moralis, t. II, part. II, n. 94 ; Lessius, De juslilia, t. II, c. xiii, dub. vi ; Lugo, disp. XX, n. 8.

Quand le bien est distribué : Si après une enquête diligente, il y avait eu par le détenteur distribution du bien aux pauvres, ceux-ci, au cas où le propriétaire apparaîtrait soudainement, ne sont obligés à aucune restitution s’il y a déjà eu consommation et qu’aucun enrichissement ne s’en soit suivi. Mais si cela a été la source d’un profit, il faudrait en rendre l'équivalent. Ceci est conforme à la règle de droit : Locupletari non débet cum alterius injuria vel jactura, Rcg. 48, 73e regulis juris, in VI ; Lessius, loc. cit., t. II, c. xiv, club, vu ; Molina, De justilia et jure, disp. 746. En effet la distribution n’avait été faite au moins implicitement que d’une manière conditionnelle : elle ne valait que si le propriétaire n’apparaissait pas. Si les biens existent encore in individuo ils doivent, semble-t-il, ctre restitués tels quels. Des auteurs prétendent cependant que non, car le pauvre ou le lieu pie ont acquis possession des aumônes reçues lorsque le propriétaire ne pouvait pas raisonnablement être censé s’y opposer. Lugo, op. cit., disp. XXXI, n. 32.

Mais si avant la répartition il n’y a pas eu d’enquête sérieuse et si, lorsque le propriétaire surgit, les biens existent encore aux mains des pauvres ou des lieux pies, ceux-ci ont le devoir de les restituer ou, à leur défaut, celui qui les a distribués, vu qu’il est coupable de négligence pour ne pas s'être informé suffisamment. Le maître légitime n’a pasà supporter les conséquences de la culpabilité de celui qui lui a nui. c’est conforme à la règle de droit : Non débet aliipiis alterius odio prœgravari, Reg. 22, De regulis juris', in VI. L’obligation. %i’ge a fortiori le distributeur quand le bien a été consommé de bonne foi par les pauvres ou le lieu pie. et qu’il n’y a eu pour ces derniers ni enrichissement, ni épargne.

c) Le propriétaire est multiple, sans que, l’on puisse préciser à qui revient le bien à restituer. — Si le doute porte sur plusieurs propriétaires, le bien est à partager entre eux. S. Alphonse, t. III, n. 589. Souvent, dans la pratique, quand ce cas se présentera, il sera bon de recourir à une transaction entre les intéressés, s’il y a discussion. Si le tort a été immédiatement supporté par des particuliers, c’est à eux qu’il faut rendre. Les marchands, par exemple, qui ont fraudé sur ce qu’ils ont vendu, pourront restituer en faisant à leur clientèle habituelle un meilleur prix ou en forçant le poids et la mesure : ils compenseront ainsi petit à petit les dommages causés. Mais cela n’est pas obligatoire, sauf à l'égard de ceux qui ont subi un tort grave : les autres sont présumés consentir à ce que la réparation soit faite aux pauvres de la cité. Cette façon de procéder serait surtout à recommander si les clients lésés n’ont été que de passage ou ne fréquentent pas habituellement la boutique. Sporer, op. cit., n. 117 ; Tamburini, Explicatio decalogi, t. VIII, tract, iv, c. 1, § 3, n. 19 ; Vermeersch, Principia, t. ii, n. 676. Dans ce cas le possesseur qui ignore à qui revient la propriété d’un bien peut le retenir pour lui, qu’il soit de bonne foi, ainsi que l’accordent tous les théologiens, ou même de mauvaise foi, au moins d’après l’avis, réservé il est vrai, de moralistes autorisés : nulla enim apparet ratio, cur hic excludendus videatur. Laudabililer tamen suadetitr, ut ejusmodi possessor rem ila possessam in causas pias impendat. Wouters, t. ii, n. 1011, p. 663.

Cette solution paraît d’ailleurs conforme au Code de droit canonique, muet sur les dispositions antérieures (Décrétâtes, t. V, tit. xix, De usuris, c. 5), en vertu desquelles tout ce qui avait été reçu par usure ou par simonie devait être distribué aux pauvres. Ce silence indiquerait qu’il ne faut plus en imposer l’obligation. Wouters, p. 664. Il est difficile cependant d’admettre qu’une possession initialement injuste puisse devenir légitime. Aussi est-il équitable de recommander fortement qu’une restitution soit faite aux pauvres ou à une œuvre pie. Vermeersch, Principia, t. ii, n. 676, 4.

Si un tort (déprédations, destructions, dévastations, etc.) a été porté à une collectivité, à une personne morale (universitas rerum ou universitas personarum), à une ville, à une cité, à un collège, etc., c’est aux magistrats ou aux chefs qu’il convient que soit faite la restitution, car ils sont les plus à même d’obvier au mal commis. Si la personne morale lésée poursuivait une fin uniquement déshonnête, elle serait considérée comme n’ayant pas le droit d’exister. Dès lors, chacun des membres qui la composent devrait théoriquement profiter « le la restitution (Vermeersch, Principia, t. ii, n. 676), mais pratiquement, vu que cela est souvent impossible, ce sont les pauvres et les œuvres pies qui seront les bénéficiaires.

Si le préjudice a été fait à l'État, les théologiens n’hésitent pas à dire qu’il est licite de restituer à des collectivités qui, vivant dans l'État, ne sont pas favorisées financièrement ou le sont moins qu’elles le devraient, telles sont les écoles chrétiennes. Wouters, op. cit., t. i, n. 1010, 3. D’autres diront que, lorsque l'État a été lésé, par une fraude au fisc par exemple, il faut restituer au ministère des finances ou détruire des obligations d'État. Vermeersch, Principia, t. ii, n. 676.

2. Cas où la restitution ne peut être faite à tous les créanciers. — Il est nécessaire, alors, de tenir compte de quelques principes dont on verra ensuite l’application pratique.

a) Les principes. - Z" principe. — Les dettes dont les créanciers sont connus passent plus probablement avant celles des incertains, car les premières sont plus proprement et spécifiquement dues que les secondes.