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R EST IT UT I ON. COUP É H A T E U RS


messe implicite en même temps que le droit des tiers. Dès lors quiconque (curé, confesseur, avocat, médecin, notaire) agit « ex officio », dans l’exercice de sa charge, a le devoir de réparer le tort qui a été la conséquence d’un conseil donné par suite de son ignorance coupable, ou par suite de sa négligence. Cette réparation se fait à celui qui a demandé le conseil et à celui qui a supporté le dommage. S. Alphonse, t. III, n. 564. Si la négligence seule a été à l’origine du conseil, celui qui l’a donné n’aura à réparer que si, ce faisant, il est théologiquement coupable. Il ne le serait pas s’il n’y avait de sa part qu’une faute juridique. Les Décrétâtes l’affirment explicitement : Si culpa tua dalum est damniim. vel injuria irrogala… aul hœc imperilia tua sive negligentia cvenerunl, jure super his salisfacere te oporlet, nec ignorantia te cxrusal, si scire debuisli ex facto luo injuriam verisimiliter posse contingere, vel jacturam. Decrétales, t. V, tit. xxxvi, De injuriis cl damno data, cap. 9.

S’il n’est pas dans l’exercice de sa charge, et s’il est consulté à titre d’ami. — A l'égard de celui qui estvenu à lui par imprudence et qui, par suite du conseil reçu, supporte des dommages, il n’est tenu à aucune réparation, à moins qu’il n’ait agi par ruse pour circonvenir celui qui se confiait à lui ou pour faire croire qu’il était compétent. La règle du droit décrétalien est formelle : Nullus ex consilio, dummodo fraudulenter non fueril, obligatur. Reg. 62, De rcgulis juris, in VI. Mais il doit compenser les torts subis par de tierces personnes, vu qu’ils lui sont imputables, en ayant été la cause efficace.

Le conseil impulsif. — Le conseiller a le devoir de réparer les préjudices qu’il a causés à autrui par son conseil impulsif, vu qu’il en est originairement responsable. S. Alphonse, t. III, n. 558. Au conseil doctrinal et impulsif se rattachent certaines questions pratiques qu’il est utile d’aborder au moins brièvement.

Cas particuliers. — Pour empêcher un tort, le conseiller peut-il en suggérer d’autres ? Une réponse pertinente exige de distinguer si le dommage porte sur le même individu ou sur des personnes différentes. Dans le premier cas, s’il est moindre que celui qui était projeté, du fait que le conseiller se montre favorable aux intérêts de celui qui va être lésé, il n’y a pour lui aucune obligation. S’il est égal, il semble qu’il en est de même, puisque le mal qui était en vue n’est pas dépassé. Mais la justice serait violée s’il était plus grand. Il faudrait alors compenser tout ce qui est en plus du dommage primitivement décidé. S. Alphonse, t. III, n. 565.

Dans le second cas (le conseiller détourne le dommage sur des tiers), les théologiens enseignent d’une manière commune que l’obligation de justice existe, parce que le conseiller est ici, à coup sûr, l’auteur efficace du dommage. S. Alphonse, t. III, n. 565, n. 577. Il en serait cependant libéré si, pour éviter un préjudice très grave contre une personne déterminée, il parvenait, par ses raisons, à ce qu’un tort in lime soit causé à une autre, nullement poursuivie par le malfaiteur. La vertu de charité n’impose-t-elle pas à celle qui est alors lésée d’accepter ce léger inconvénient pour que son semblable ne soit pas affecté liés graveront ? En pareilles circonstances une sage prudence doit guider le conseiller.

c. Cessation de l’obligation. — Celui qui, sans faute, a donné un conseil mauvais est tenu de le rétracter lorsqu’il apprend la vérité. Malgré cela, il importe d’examiner les cas où il aurait cependant à réparer le dommage porté.

Celui qui a exprimé un conseil (doctrinal ou impulsif) d.im îiliealeut simple, n’a pis a restituer, s’il le révoque avant que soit commis le dommage. Dans cette hypothèse, en elïet, celui-ci provient de l’initiative

personnelle de l’agent d’exécution. S. Alphonse, t. III, n. 559. Mais, si le conseil nocif a été motivé, si par exemple l’on a fait ressortir les avantages, la facilité de l’action dommageable, le conseiller demeure responsable de ladite action, même s’il révoque son conseil avant l’exécution ; il en demeure en effet la cause efficace : il lui incombe donc de réparer. De fait, l’agent d’exécution est alors mû dans son action par les motifs de facilité, de sécurité ou autres qui ont été proposés, à moins qu'à la rétractation n’aient été ajoutés d’autres arguments au moins aussi forts que ceux qui furent fournis au moment du premier conseil.

Sain', Alphonse, t. III, n. 559, fait remarquer que le conseiller qui n’arrive pas à fournir à l’exécuteur des raisons capables d’empê -her l’action damnilicatrice est toujours obligé en charité, et même en justice si le conseil fut motivé, d’avertir celui qui va être lésé afin que ce dernier prenne ses dispositions pour éviter le mal qui le menace.

Ce qui précède permet de saisir la différence entrele mandataire et celui qui a reçu un conseil. Tandis que le premier agit au nom du mandant, le second exécute l’action en son nom propre et non pas en celui du conseilleur parce qu’il a fait siens les motifs reçus d’autrui.

c) Le consentant. — - Sous cette dénomination on entend celui qui produit efficacement un tort par son consentement, alors que, sans celui-ci, les autres agents d’exécution n’auraient ni pu, ni voulu agir contre la justice. Il y a différentes façons de consentir d’une manière efficace : ce sera une attitude extérieure approbatrice de la part d’un supérieur, une sentence judiciaire, à n’importe quelle instance, ou surtout un vote (électif, approbatif, délibératif ou exécutif). Ce dernier consentement sera spécialement étudié.

Le vote est consultatif s’il est donné sous forme de conseil ; les situations morales qui en découlent trouvent leur solution dans l’application des principes donnés à propos du conseilleur.

Il est délibératif, s’il s’exprime sous forme de décret. D’une manière générale, d’après l’opinion commune des théologiens, celui qui pose un acte de ce genre est à assimiler au mandant, car l’agent d’exécution agit au nom de celui qui a porté la sentence. Si le suffrage se fait à la majorité des voix, trois cas sont à distinguer, selon que le vote est secret, public ou négatif :

Si le vole est secret. — Du fait que les votants concourent per modum unius à la même fin et que moralement ils ne forment qu’une seule personne, ils sont tous solidairement tenus au prorata à la restitution du dommage qu’ils portent éventuellement, vu qu’en l’occurrence ceux qui sont causes efficaces ne peuvent être discernés de ceux qui ne le sont pas. S. Alphonse, t. III, n. 566. Au cas où certains se déroberaient à leur devoir de justice les autres seraient obligés de tout réparer. Lugo, disput. XIX, n. 85.

Si le vole est public. — S’il a lieu d’une manière simul l anée, la restitution se règle d’après les principes précédents ; mais il n’en est pas de même, si les suffrages sont exprimés successivement. S’il s’exprime après une convention préliminaire, il est indubitable que tous sont obligés de réparer : les premiers qui ont émis leurs suffrages comme ceux qui ont apporté des voix supplémentaires à la majorité requise. Antequam suffragium vere a singulis feratur, talis conspiralio potins fationem consilii habet ; quare qui solum in conventu fractionis consenserit, in commis ipsis vero inler effteaciter suffragantes non est, is non eodem ordine sed plerumqæ post hos ad restitulionem tenctur. Lehmkuhl. t. i, n. 1201.

S’il n’y a pas eu d’accord, il y a plus de difficultés à se prononcer sur la valeur morale de l’acte et donc sur l’obligation de justice qui en découle. Il semble