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RÉSERVE. CAS RÉSERVÉS, ABSOLUTION


Enfin, le législateur a pris la précaution de déléguer ipso jure le pouvoir d’absoudre des péchés réserves (sans censure) par les Ordinaires à certains confesseurs dans des circonstances déterminées.

a. De ce nombre sont d’abord les curés, durant tout le temps accordé pour l’accomplissement du devoir pascal. Par curés, il faut entendre également, aux termes mêmes du canon 899, tous ceux qui leur sont juridiquement assimilés, c’est-à-dire : les quasi-cures dans les territoires de mission et tous les vicaires paroissiaux qui ont plein pouvoir (vicaire-curé, économe, substitut, coadjuteur s’il supplée en tout le curé, mais non les vicaires coopérateurs, c’est-à-dire ceux que nous appelons ordinairement en France les vicaires tout court). Ce pouvoir dure autant que le temps déterminé par le droit général ou étendu par le droit particulier, pour l’accomplissement du devoir pascal ; il n’est donc pas limité à la seule confession faite en vue d’accomplir ce devoir, et on peut, au besoin, en user plusieurs fois pour la même personne, tant que le temps des Pâques n’est pas clos.

b. Le même pouvoir est encore délégué par le droit aux missionnaires, durant le temps qu’ils donnent au peuple les exercices d’une mission. Canon 899, § 3. Par mission, il ne faut pas seulement entendre les grandes prédications prévues par le canon 1349 dans chaque paroisse au moins tous les dix ans ; de l’avis de commentateurs autorisés, tombent aussi sous cette appellation les retraites fermées ou exercices spirituels faits en commun. Cf. Capello, De pœnitentia, n. 559 ; Vermeersch-Creusen, Epilome jur. can., t. ii, n. 180 ; il ne semble pas cependant que l’on puisse donner légitimement le nom de missions à de simples stations comme celle de l’A vent ou du mois de Marie, cf. Villien, dans Canoniste conlemp., mai-juin 1920, p. 202. On admet aussi que non seulement les missionnaires, mais encore tous les prêtres appelés à leur aide pour entendre les confessions jouissent du pouvoir d’absoudre des péchés réservés. Ajoutons qu’il n’est pas nécessaire qu’un fidèle « fasse sa mission », c’est-à-dire en suive tous les exercices, pour bénéficier d’une faculté qui est donnée avant tout au missionnaire ; un fidèle, appartenant à une paroisse autre que celle où se donnent les exercices spirituels, pourrait légitimement s’adresser à ce confesseur privilégié et en recevoir l’absolution. C’est l’esprit de la loi et l’intention du législateur de favoriser la libération des fautes plus graves.

6. Cessation de la réserve.

Le but de la réserve sera suffisamment sauvegardé, même si elle ne joue pas dans certaines circonstances extraordinaires où il est urgent de pourvoir à la paix des consciences.

a) Au nombre de ces circonstances, il y a en tout premier lieu le péril de mort : Tout prêtre, même non approuvé pour les confessions, fût-il irrégulier, hérétique, schismatique, réduit à l'état laïc, dégradé, peut alors validement et licitement absoudre n’importe quel pénitent de tous les péchés et de toutes les censures, quelque réservées ou notoires qu’elles puissent être, même si un autre prêtre approuvé est présent. Can. 882. Cette absolution ne vaut que pour le for interne. Com. d’interprét. du Code, 28 décembre 1927, Acla ap. Sedis, t. x., 1928, p. 61.

Seule l’absolution du complice in peccato turpi serait illicite, hormis le cas de nécessité ; mais elle serait toujours valide. Can. 881. Nous avons dit ailleurs que le confesseur complice de la révolte d’Action française serait tenu à un recours à la S. Pénitencerie dans le mois qui suivrait sa guérison, sous peine d’excommunication.

b) Une autre circonstance extraordinaire, prévue par le droit, est. le cas d’un voyage en nier (qui ne soit pas seulement une promenade <>u partie de plaisir), 'toutes les fois que le navire fait escale, les prêtres

qui y sont embarqués, pourvu qu’ils aient reçu le pouvoir de confesser d’un Ordinaire quelconque (soit avant leur départ, soit au cours du voyage), peuvent absoudre validement et licitement, même des cas réservés à l’Ordinaire du lieu de l’escale, tous les fidèles qui s’adressent à eux soit à terre, soit sur le navire. Can. 883, § 2. Ce pouvoir leur est accordé pour un, deux ou trois jours, si le navire reste aussi longtemps dans le port, ou si, pour continuer son voyage, un prêtre devait s’embarquer sur un autre vaisseau. Mais, après trois jours, ces pouvoirs ne seraient plus continués si ces prêtres pouvaient facilement aller trouver l’Ordinaire du lieu et se munir auprès de lui de pouvoirs réguliers. Com. d’interprét. du Code, 20 mai 1923, Acta ap. Sedis, t. xvi, 1924, p. 114.

c) En outre, le canon 900 énumère cinq cas dans lesquels toute réserve, quelle qu’elle soit, cesse et demeure sans effet. A noter que la cessation de la réserve ne doit pas s’entendre de la réserve des censures, mais uniquement de celle des péchés ; en revanche, le texte du canon 900 vise aussi bien les réserves pontificales que les réserves diocésaines. Com. d’interprét. du Code, 10 novembre 1925, Acta ap. Sedis, t. xvii, p. 583. La réserve des péchés est donc suspendue :

a. En faveur des pénitents malades qui ne peuvent sortir de leur maison. Les alités ne sont donc pas les seuls à jouir de cette faculté, mais tous ceux que la vieillesse, une infirmité, une blessure, un accident empêchent d’aller trouver un confesseur qualifié ; le fait pour eux de se lever ou même de faire quelques pas dans le jardin ne leur enlève pas le bénéfice accordé par le droit. Quelques auteurs étendent ce bénéfice même aux prisonniers, Capello, De pœnitentia, n. 552 ; c’est une interprétation qui n’est pas contre l’esprit de la loi. Cf. Clayes-Simenon, Manuale jur. can., t. ii, n, 145. Ce qui est certain, c’est que les religieux malades peuvent profiter de cette disposition favorable de la loi, même si dans la maison se trouvent des confesseurs privilégiés.

b. Les fiancés qui se confessent en vue de leur mariage ; il n’est pas nécessaire qu’ils soient unis par des fiançailles canoniques.

c. Toutes les fois que le supérieur compétent a refusé les pouvoirs nécessaires pour absoudre d’un cas déterminé ; par supérieur compétent, il faut entendre, en l’espèce, quiconque a pouvoir ordinaire ou délégué pour absoudre ou donner le pouvoir d’absoudre des cas réservés : si, par exemple, ce pouvoir a été demandé au vicaire forain (doyen) dont la délégation est prévue par le canon 899 et que celui-ci, à tort ou à raison, l’ait refusée, alors qu’il avait qualité pour l’accorder, il n’y a aucune obligation de recourir à l’Ordinaire. Cette disposition du Code, qui, à première vue, paraît extraordinaire, n’est pourtant que l’extension aux cas épiscopaux d’une législation appliquée depuis le xviie siècle aux cas réservés par les supérieurs religieux. Urbain VIII, confirmant le 21 septembre 1624 un décret de Clément VII (26 mai 1593) concernant les cas réservés des réguliers, y ajouta cette déclaration : Ut si hujusmodi regularium confessariis casus alicujus rescrvali facilitaient petentibus superior darc noluerit, possunt tamen confessarii il la vice pœnitenles reyulares, ctiam non obtenta facultate a superiore, absolvere. Bizzarri, Colleclanea, p. 24(5-247. Le motif invoqué est tpie la réserve ne doit pas tourner à la perte des âmes ; et, dans le cas. le confesseur qui demande la faculté d’absoudre est mieux placé que le supérieur pour juger des dispositions intimes du pénitent.

d. La réserve cesse encore, si, au jugement prudent iu confesseur, le recours constituait un danger de violation du secret sacramentel, ou même simplement