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    1. OUESNEL##


OUESNEL. DISCUSSIONS AUTOUR DE LA HUELK

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la grâce de Jésus-Christ efficace par elle-même et la prédestination gratuite des élus, 1709. — Defensio auctorilatis Ecclesise vindicata contra erudilissimum virum Jansenio suppetias ferentem, Avitum Academicum et alios a quibus impugnata fuit, 1709 ; c’est la réponse de M. Denys à l’écrit intitulé Defensio Epistolse Leodiensis. — Seconde lettre à Mgr l’archevêque de Cambrai, toucliant le prétendu jansénisme, au sujet de la Réponse à la IIe lettre de M. de Saint-Pons, 1710. — Arles jesuilicæ in sustinendis perlinaciler novilatibus laxilatibusque sociorum (quarum plusquam mille hic exhibenlur) S. D. N. démentis papæ XI alque orbi universo denuntiatse per christianum aletophilum, editio’-'’, média fere parte auctior, 1710. — Du refus de signer le formulaire, qui est la suite de Trois lettres sur l’excommunication.

Parmi ces très nombreux écrits, qui prirent la défense du cas de conscience et attaquèrent plus ou moins directement la bulle Vineam Domini, l’ouvrage de Jacques Fouilloux est assurément le plus caractéristique. Il a pour titre Justification du silence respectueux ou Réponse aux instructions pastorales et autres écrits de M. l’archevêque de Cambrai, 1707, 3 vol. in-12. L’auteur se vante d’avoir suivi pas à pas Fénelon et d’avoir réfuté un à un tous ses arguments en faveur de la bulle et de la signature du formulaire. Il veut établir trois propositions fondamentales qui prouvent la légitimité du silence respectueux : 1. La croyance du fait, que suppose le formulaire, est une croyance certaine et absolue. 2. On ne peut exiger une croyance certaine et absolue en un fait qui paraît douteux qu’en vertu d’une autorité infaillible. 3. L’Église n’est pas infaillible dans le jugement qu’elle porte des auteurs et des livres. Cette dernière proposition est en opposition formelle avec les écrits de Fénelon. A cette attaque contre l’archevêque de Cambrai Fouilloux a ajouté des injures personnelles : Fénelon est un « esprit faux dont l’aveuglement est inconcevable, et l’ignorance profonde ; nouvel Apollinaire et nouveau Julien, dont les écrits ne sont que du galimatias ».

Le 1 er juillet 1708, Fénelon publia une Instruction pastorale pour réfuter le gros ouvrage de Fouilloux. Œuvres, t. xiv, p. 3-339. Il souligne la dissimulation des jansénistes pour éluder les définitions de l’Église et les vaines déclarations contre toutes les autorités ecclésiastiques, et même contre les conciles généraux qu’ils avaient paru respecter autrefois. L’Instruction pastorale est établie d’une manière fort méthodique : 1. De l’aveu du parti, l’Église a la promesse de l’infaillibilité pour juger des textes de ses symboles, de ses canons et des autres décrets équivalents. 2. La condamnation du texte de Jansénius est entièrement équivalente à un canon de concile œcuménique. 3. De l’aveu des écrivains du parti et, en particulier, de l’auteur de la Justification, il faut conclure que l’Église est infaillible sur les textes d’auteurs particuliers, comme Jansénius. 4. Enfin la tradition est décisivesur cette question, soit par les conciles, en particulier par le concile de Trente, soit par toutes les assemblées du clergé depuis 1653. Bref, l’Église est infaillible quand elle condamne des textes soit courts, soit longs, qui se rapportent à la conservation du dépôt de la foi, pour régler notre croyance et indépendamment de toute information sur l’intention personnelle des auteurs. Elle est certainement infaillible quand elle exige, par un serment solennel dans sa profession de foi, la croyance intérieure de l’héréticité du texte condamné ; il y a une différence essentielle entre le fait de l’intention de l’auteur et l’héréticité de son texte. Fénelon termine son instruction par ces paroles mémorables : « Ce n’est point être uni à l’Église que de ne l’écouter pas quand elle exige qu’on fasse un serment pour promettre une croyance absolue, sans

crainte d’être trompé… Rien n’est plus pernicieux que de vouloir demeurer dans le sein de l’Église pour lui faire la loi… C’est un nouveau genre de tentation, réservé aux derniers temps, que cette conduite des novateurs, qui affectent de demeurer au dedans de l’Église pour la séduire et qui ne gardent l’unité au dehors que pour diviser les esprits au dedans… Pendant qu’ils affectent de paraître si soumis, ils ne veulent rien écouter, ni examiner… » P. 335.

La Lettre de l’ar hevëque de Cambrai touchant les textes dogmatiques, où il répond aux principales objections (Œuvres, t. xiv, p. 343-410), est un résumé précis de toute la controverse sur le silence respectueux, et elle est capitale dans l’œuvre de Fénelon, car elle vise à détruire les difficultés soulevées contre l’argument fondamental mis en avant par lui : l’Église est infaillible touchant les textes dogmatiques. C’est, dit-il, la doctrine commune de l’Église et de la tradition. En vertu des promesses reçues de Jésus-Christ, l’Église est infaillible sur la signification des textes, qui conservent ou qui corrompent le dépôt de la foi ; sans cela, les vérités chrétiennes, qui sont exprimées dans des textes seront toujours douteuses ou incertaines : l’Eglise juge la catholicité ou l’héréticité îles textes avec la même autorité infaillible qui la fait juge de la foi. Si elle pouvait se tromper, elle ne pourrait pas exiger, avec serment, une croyance intérieure à ses jugements. Comme il le dira dans sa lettre au P. Lami, du 4 mars 1708 (Correspond., t. iii, p. 161) : « La croyance certaine est manifestement impossible sans un motif certain. » Or. le seul motif certain qui puisse imposer une croyance certaine, c’est l’infaillibilité de l’Église.

La destruction de Port-Royal.

La bulle Vineam

Domini eut en France un contre-coup imprévu : la destruction de Port-Royal, sur laquelle les amis de Quesnel ont coutume de s’apitoyer, oubliant qu’avant d’arriver à cette extrémité regrettable le pouvoir civil avait pris des mesures plus douces, qui furent sans effet à cause de l’entêtement des religieuses, soutenues par les conseils de leurs directeurs. Sainte-Beuve lui-même, qui a tant insisté sur les détails de cette destruction, laisse voir que les pauvres religieuses furent quelque peu responsables de leur malheur. M. Albert Le Roy a consacré un long chapitre, où il suit Sainte-Beuve, et il dit : « l’ar un raffinement odieux, on chargea de signifier la sentence d’extirper le jansénisme et de briser son nid, celui-là même qui était réputé le secret protecteur de la faction. » Il s’agit du cardinal de Noailles, traité avec tant de pitié dans les Gémissements d’une âme vivement touchée de la destruction de Port-Royal-des-Champs : il fit ce que n’aurait pas fait son prédécesseur, pourtant si peu ami de Port-Royal. Noailles désobéissait au pape, mais il s’inclinait devant les ordres du roi.

Le 18 mars 17nti, Gilbert, vicaire général de Noailles, intima à M. Marignier, confesseur des religieuses, l’ordre verbal de lire la bulle Vineam Domini et de souscrire, en leur nom, la formule préparée par l’archevêché : on leur demandait de renoncer au silence respectueux et d’abandonner la distinction du fait et du droit. Le 21 mars, le confesseur apposa sa signature, au nom des religieuses, en ajoutant les mots suivants : « Sans déroger à ce qui s’est lait a leur égard, à la paix de l’Église, sous le pape Clément IX. » Sainte-Reuve écrit justement : « Il était singulier et ridicule que, seules, une vingtaine de filles, vieilles, infirmes et la plupart sans connaissances suffisantes, qui se disaient avec cela les plus humbles et les plus soumises en matière de foi, vinssent faire acte de méfiance et protester indirectement en interjetant une clause restrictive. » On essaya de vaincre leur résistance ; ce fut inutile. Le P. Quesnel, consulté de loin,